JEAN LE VIOLONEUX
Version
française – JEAN LE VIOLONEUX – Marco Valdo M.I. – 2016
Chanson
italienne – Il
suonatore Jones – Fabrizio
De André – 1971
Toi
et moi, Lucien l’âne mon ami, et tous les gens des communes et des
villages de par ici savent ce que c’est qu’un violoneux et celui
qui ne le sait pas ne sait rien des musiciens populaires, des
musiciens de rue et de campagne. Il y en avait jusqu’au Québec
comme ce Monsieur
Pointu, qui avec son instrument conquit
les
oreilles et les cœurs de bien des gens dans le monde.
Et
comment donc, Marco Valdo M.I. mon ami, que des
violoneux j’en ai connus et pour cause, on marchait de concert. Et
même, de concert en concert, vu qu’ils allaient de village en
village, de hameau en hameau, de bourg en bourg animer les fêtes et
les bals. Et moi, moi je suivais ou même, parfois, j’aidais à
porter leur personne et leur violon. Ah, pour faire des fêtes, on en
a fait des fêtes. Et les filles dansaient, le plaisir qu’elles
avaient, le plaisir que leur donnait le violoneux et son violon. Oh,
il en a connu de bonnes fortunes, le coquin grâce à son instrument.
Pour ce qui est violoneux, j’en ai connus qui venaient de partout.
Faut dire que c’est plus facile à transporter que les
grandes orgues. Mais dis-moi, Marco Valdo M.I. mon ami,
le violoneux de la canzone que raconte-t-il ? D’où vient-il ?
Eh
bien, dit Marco Valdo M.I., c’est une excellente question. Ho, je
t’arrête tout de suite, car je vois à tes yeux moqueurs que tu
penses que j’ai répondu « une excellente question »
comme un orateur embarrassé qui ne saurait quoi te répondre et qui
aurait dit ça pour se donner le temps de réfléchir. Rassure-toi,
ce n’est pas le cas. Mais la réponse à ta question peut être
très courte ou bien, prendre le chemin de circonlocutions
indéfinies. Mais commençons par le commencement : Jean le
Violoneux est un violoneux régional, un de ceux qui vivent d’une
certaine activité et pratiquent le violon à la manière d’un
violon d’Ingres.
Oh,
Ingres, Ingres, mais c’était un peintre, ce gars-là ! Il
était encore tout jeune quand j’ai passé les Alpes avec lui quand
il se rendait à Rome. Un bien beau jeune homme et un peintre qui
savait peindre les femmes. Enfin, passons ! Ce que je peux en
dire, c’est qu’il jouait du violon comme un violoneux, c’était
sa passion cachée, le violon. Évidemment, on l’a su plus tard et
on a parlé du violon d’Ingres, précisément pour désigner une
passion, disons, un peu collatérale, dont on ne fait pas profession.
Le photographe Man Ray, des années plus tard, a réussi à joindre
en un joli tableau les deux passions de Monsieur Ingres et a proposé
aux regards ravis un très sensuel Violon d’Ingres à la tête
enturbannée.
Merveilleux
dos, superbe personne, très décent turban, mais on s’égare,
Lucien l’âne mon ami, on s’égare. Revenons
à Jean le Violoneux, si tu veux bien, Lucien l’âne mon ami. À la
différence des violonistes tziganes qui sont des itinérants du
spectacle, Jean le Violoneux est un artisan musical amateur et
strictement local. Il ne court pas le monde derrière son violon ;
il
vit, s’essaye à travailler, joue et meurt au pied de la colline où
coule la rivière à travers les champs.
C’est
du cimetière local qu’il nous narre sa vie. Voilà pour notre Jean
le Violoneux, incarnation paysanne de culture française du
« suonatore Jones » de Fabrizio De André, incarnation
paysanne de culture
italienne, lui-même incarnation du Fiddler
Jones,
qu’évoquait Edgar Lee Masters dans sa Spoon
River Anthology, publiée en
1916 à New-York ; une anthologie qui décrit
post-mortem la vie de plus de 200 personnages, tirés des gens de
deux petites villes de l’Illinois – Peterburg et Lewistown,
que
connut le poète ou dont il entendit parler.
Voyons
donc ce Jean le Violoneux que tu nous as concocté et reprenons notre
tâche à la durée indéfinie et tissons le linceul de ce vieux
monde, que nous mettrons pour l’occasion sous la colline avec Jean
le Violoneux et tous les autres cacochymes.
Heureusement !
Ainsi
Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
Dans
un tourbillon de poussière,
Les autres voient la sécheresse,
Moi, il me rappelle
La jupe de Fanfan
Dans un bal d’antan.
Je sentais ma terre
Vibrer de musique,
C’était mon cœur
Et alors pourquoi la cultiver encore,
La penser meilleure.
Je l'ai vue dormir, Liberté,
Dans les champs cultivés,
Ciel et argent, un jour,
Ciel et amour, toujours,
Protégée par un fil barbelé.
Les autres voient la sécheresse,
Moi, il me rappelle
La jupe de Fanfan
Dans un bal d’antan.
Je sentais ma terre
Vibrer de musique,
C’était mon cœur
Et alors pourquoi la cultiver encore,
La penser meilleure.
Je l'ai vue dormir, Liberté,
Dans les champs cultivés,
Ciel et argent, un jour,
Ciel et amour, toujours,
Protégée par un fil barbelé.
Je l'ai vue se réveiller, Liberté,
Chaque fois que j'ai joué,
Pour un frou-frou de filles
Au bal, à l’hiver, à l’été,
Pour un ami ivre.
Et
puis
quand
les gens savent,
Et les gens le savent que tu sais jouer,
Il te faut jouer
Toute ta vie sans rechigner
Et il te plaît qu’on t’écoute.
Et les gens le savent que tu sais jouer,
Il te faut jouer
Toute ta vie sans rechigner
Et il te plaît qu’on t’écoute.
J’ai
fini chez les macchabées
Avec une flûte cassée
Et un rire secret,
Et tant de pensées,
Et pas un regret.
Avec une flûte cassée
Et un rire secret,
Et tant de pensées,
Et pas un regret.