LE TANGO DU CRIME
Version
française – LE TANGO DU CRIME – Marco Valdo M.I. – 2016
Chanson
allemande – Kriminal-Tango
– Hazy
Osterwald-Sextett – 1959
Le
Tango du Crime est la version française de Kriminal-Tango (Texte :
Kurt Feltz ; Musique : Piero Trombotta) est une chanson de
1959, qui fut interprétée et popularisée par le Hazy
Osterwald-Sextett et qui connut un grand succès.
Ohlala,
Marco Valdo M.I. mon ami, un tango du crime. Quelle histoire !
Il s’en passe des choses dans l’Allemagne de cette chanson.
Oui,
Lucien l’âne, il s’en passe des choses dans cette Allemagne. Je
précise d’abord qu’il s’agit de l’Allemagne Fédérale,
peut-être à Berlin, sans doute, à Berlin ou dans une autre ville
d’Allemagne de l’Ouest, impérativement de l’Ouest. La guerre
est maintenant finie depuis longtemps et la vie quotidienne, y
compris la vie nocturne, retrouve progressivement ses marques. Le
miracle économique est passé par là, le plan Marshall aussi,
Berlin retrouve une vie nocturne comme du temps de Weimar. Il y a
quand même une nuance et elle est de taille.
J’aimerais
bien savoir de quelle nuance d’une telle taille la vie allemande
nocturne peut bien être marquée, dit Lucien l’âne en levant ses
deux oreilles en points d’interrogation.
Je
disais qu’elle retrouve une vie nocturne comme du temps de Weimar
et ce n’est pas inexact, mais la nuance est que le phénomène
d’américanisation est encore bien plus fort qu’il ne l’avait
été dans les années vingt et cette fois s’étend à toutes les
heures du jour. Que raconte la chanson, où se déroule son
histoire ?, je vois que cela te turlupine. On se trouve dans une
boîte de nuit où l’on danse le tango ; un de ces lieux où
sévit un orchestre et où des couples viennent se distraire,
viennent passer la soirée, la nuit et dans cet endroit à
l’atmosphère argentine, il va se commettre un crime. Une sorte de
roman noir express et finalement, loi du genre, parodique et
sinistrement drôle et chanté avec un sérieux mortel. Un
crime aura lieu, mais on ne saura pas grand-chose de plus ; la
police non plus. Le seul qui aurait pu les renseigner est précisément
le mort.
Je
brûle quand même d’en savoir un peu plus Marco Valdo M.I mon ami,
car tu m’as intéressé et tu ne peux me laisser comme ça.
Alors
voilà ce que raconte la chanson : un couple vient danser,
s’installe au bar, à une table, que sais-je. Il s’installe pour
la soirée. On ne dit pas à quoi ils ressemblent, sauf que c’est
un gars et une fille ; le genre maquereau avec une donzelle. Le
maquereau serre la donzelle. Tango, tango. On boit du champagne. J’ai
mis du champagne pour la rime, mais dans la version allemande, ils
boivent des Manhattans (mélange de martini et de whisky). Dans cette
boîte un peu minable – c’est un bouge, le tango dure toute la
nuit.
On
dirait une ambiance argentine, comme on dit qu’il y en a à Buenos
Aires, dit Lucien l’âne.
Donc,
nos deux danseurs, provisoirement attablés – lui, Jacky Brown ;
elle, Baby Miller, ce qui ne doit pas être leurs noms, mais ça fait
plus américain s’attendent quand même à quelque chose. Lui, en
tous cas et il lui qu’elle se mette à l’abri quand il lèvera
son verre. Un homme entre, Jacky lève son verre, on éteint
précipitamment els lumières, on tire. L’homme est à terre. La
police arrive. Personne n’a rien vu, personne ne sait rien. Point.
Le tango repart. Voilà l’histoire.
On
se croirait dans un film américain, comme dans une histoire de
gangster ; brrr, j’en ai froid dans les poils du dos, dit
Lucien l’âne en frissonnant de toute son échine.
Précisément,
comme au cinéma et le cinéma raconte (lui aussi) la vie et
principalement (surtout là et à l’époque) la vie comme en
Amérique (aux Zétazunis d’Amérique et encore, dans certains
quartiers des villes). Une chanson qui participe du mirage américain,
amplement diffusé et injecté dans les populations.
On
est loin de la chanson sociale et politique de Weimar,
dit Lucien l’âne. Même si celle-ci me paraît jeter un
éclairage assez cru sur l’américanisation de l’Allemagne (de
l’Ouest) et l’ampleur de ce phénomène.
Remarque,
Lucien l’âne mon ami, Bertolt Brecht avait quant à lui écrit
« L’Opéra de Quatre Sous » qui se déroule dans un
milieu analogue et Arturo Ui, qui s’y passe tout autant, avec une
atmosphère de fait divers et de crime assez proche de cette chanson.
D’un autre côté, à l’époque de cette chanson, dans la France
d’après-guerre (et sans doute dans les autres pays de la future
Europe), on notait le succès de tout ce qui venait d’Amérique –
cinéma, voitures, frigos, etc et Boris Vian écrivait des romans
noirs « américains ». Il faudra d’ailleurs à
l’Allemagne beaucoup de temps pour se détacher de cette emprise ;
elle n’y est pas encore tout à fait parvenue ; elle ne
pourra à mon sens s’en dégager que si elle arrive réellement à
se diluer dans l’Europe, non pas en tant que nation, ni en tant que
collection de peuples, mais en se sabordant en tant que nation,
peuple, etc pour atteindre la citoyenneté européenne individuelle
des citoyens – sans frontière. Ce qui vaut pour les gens
d’Allemagne, vaut tout autant pour tous les autres citoyens
d’Europe.
Tu
y vas fort, Marco Valdo M.I. mon ami.
Peut-être,
Lucien l’âne mon ami, mais c’est la seule voie pour « se
dégager de cette emprise ». Évidemment, les
implications de pareille dilution des nations dans l’Europe sont
énormes et multiples, mais quand même assez plus intéressantes que
les pusillanimités actuelles, faites de méfiances, d’envies et de
rancœurs.
On
ne réglera pas ça ce soir et en attendant il nous faut reprendre
notre tâche et tisser le linceul de ce vieux monde méfiant,
envieux, pusillanime et cacochyme.
Heureusement !
Ainsi
Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
Dansent
un tango serré,
Il lui dit doucement : « Baby,
Fais-toi petite, si je fais santé. »
Il commande deux champagnes.
Arrive un homme avec des lunettes
Jack lève son verre et Baby tremble,
On coupe alors soudain la lumière.
Il lui dit doucement : « Baby,
Fais-toi petite, si je fais santé. »
Il commande deux champagnes.
Arrive un homme avec des lunettes
Jack lève son verre et Baby tremble,
On coupe alors soudain la lumière.
Tango
criminel dans le bouge,
Sombres formes et lumière rouge.
Soir après soir brûle la mèche,
Dans l’air, sue une tension moite
E tous dansent un tango,
Tous, sans rien soupçonner.
Ils demandent à l’orchestre :
« Vous n’avez rien de plus chaud ? »
Car ils ne peuvent pas imaginer,
Ce qui aux petites heures
Dans le bistrot nocturne
Va bientôt se passer, pendant le tango.
Sombres formes et lumière rouge.
Soir après soir brûle la mèche,
Dans l’air, sue une tension moite
E tous dansent un tango,
Tous, sans rien soupçonner.
Ils demandent à l’orchestre :
« Vous n’avez rien de plus chaud ? »
Car ils ne peuvent pas imaginer,
Ce qui aux petites heures
Dans le bistrot nocturne
Va bientôt se passer, pendant le tango.
Éclairs
rouges, attention,
Un coup de feu dans la tension,
Jacky et Baby dansent un tango,
Un tango très chaud.
La police n’a rien trouvé,
Rien de suspect.
Sauf l’homme aux lunettes,
Que le tir dans le noir a frappé,
Pourrait dire ce qui s’est passé,
Mais l’homme a cessé de parler.
Un coup de feu dans la tension,
Jacky et Baby dansent un tango,
Un tango très chaud.
La police n’a rien trouvé,
Rien de suspect.
Sauf l’homme aux lunettes,
Que le tir dans le noir a frappé,
Pourrait dire ce qui s’est passé,
Mais l’homme a cessé de parler.