BUNDESWEHR
Version française – BUNDESWEHR – Marco Valdo M.I. – 2016
Chanson allemande – Bundeswehr – Slime – 1982
Bundeswehr, Bundeswehr, ça me dit quelque chose, dit Lucien l’âne en s’ébrouant par saccades. Ne serait-ce pas l’armée allemande ?
En
effet, Lucien l’âne mon ami, la Bundeswehr est l’armée
allemande actuelle.
Ce
qui m’inquiète, moi, dit Lucien l’âne d’un ton
inhabituellement grave, c’est qu’elle est forcément l’héritière
de celle qui l’a précédée et que de ce fait, elle pourrait se
comporter comme celle-là et rejouer certain scénario dont nul être
sensé ne voudrait voir la répétition.
Tu
as directement mis le doigt sur le nœud du problème que pose
l’existence d’une armée allemande, enchaîne Marco Valdo M.I.
Laissons de côté la réflexion sur l’utilité ou non d’une
armée régulière, ce n’est pas le sujet ici. Ici, l’objet de la
chanson est de critiquer la Bundeswehr et au travers de cette
critique particulière, en effet, laisser entendre le rôle néfaste
de l’armée, telle qu’elle est et telle qu’elle fonctionne.
Pour
ce qui est de la Bundeswehr, elle a comme qui dirait une tare
congénitale, car on la considère – à mon sens à juste titre –
comme l’héritière de ses grandes aïeules, même si elle a évolué
par rapport à ce passé. Ainsi, après tous ses exploits, ses
erreurs, ses désastres qui se sont étalés sur plus d’un siècle,
l’armée allemande est devenue la Bundeswehr et depuis presque
trois quarts de siècle, elle s’est assagie. C’est en tout cas ce
que pensent les voisins ; ça fait plus de septante ans qu’elle
ne les a plus envahis. Néanmoins, il y a des choses qui ne
s’oublient pas.
Mais
dis-moi, Marco Valdo M.I., pourrais-tu rafraîchir la mémoire à
propos de cette histoire d’armées allemandes en cascade.
Tout
commence avec la Prusse, un royaume combattant, dont certain
commentateur de l’époque disait : « La Prusse n’est
pas un État qui possède une armée, mais c’est une armée qui
possède un État » ou quelque chose d’approchant. C’est
tout dire. C’était il y a deux cents ans.
Ensuite,
dans un passé plus récent, disons un bon gros siècle d’ici, elle
avait été transformée en armée allemande par – tiens qui
voilà ! – Otto von Bismarck, dont – je te le rappelle –
l’ensemble de nos Histoires d’Allemagne constitue le Rêve,
c’est-à-dire cette Grande Allemagne encore en gestation et qui
devra bien, un jour, se muer en grande Europe en se diluant parmi les
autres gens du continent. C’était la Deutsches Heer (1871-1919),
qui fut remplacée par la Reichswehr (1919-1935), née sur ses
cendres.
Ensuite,
nouveau pouvoir oblige, on créa la Wehrmacht (1935-1945), mais comme
les nazis se méfiaient des militaires – qui n’étaient pas
nécessairement des enthousiastes du régime, ils la flanquèrent
d’une armée nazie, la Waffen SS.
Ensuite,
suite à l’immense déroute de l’armée du Reich de Mille Ans qui
n’en dura que douze (et c’était douze de trop), elle fut mise en
quarantaine – de 1946 à 1955. En 1955, elle renaît en puisant
largement dans ses cadres anciens – ce qui explique la présence de
nombreux (ex-) nazis parmi les officiers de la nouvelle armée
reconstituée sous le nom de Bundeswehr en République fédérale et
pendant un temps, en République démocratique, sous le nom de
Nationale Volksarmee (1955-1990), laquelle « armée du peuple »
sera en quelque sorte absorbée par la Bundeswehr lors de la
réunification allemande.
Soit,
Marco Valdo M.I., voici connue la généalogie de la Bundeswehr, mais
cet historique n’est pas, je le suppose, l’histoire que raconte
la chanson.
Pour
bien la comprendre, Lucien l’âne mon ami, il faut que j’ajoute
un élément d’explication complémentaire. En 1982, la situation
était quand même fort différente d’aujourd’hui :
l’Allemagne était encore divisée et il y avait encore un service
militaire obligatoire des deux côtés. Ce service militaire était
imposé aux hommes et impliquait donc le passage par la Bundeswehr et
par la NVA (Nationale VolksArmee) ; un séjour généralement
non choisi et peu apprécié par la plupart et pas nécessairement en
raison d’un engagement pacifiste ou par objection de conscience,
mais principalement en raison de l’absurdité du système
militaire.
De
plus, la population allemande jeune, celle qui devait être
incorporée dans cette armée n’était pas vraiment convaincue des
mérites et de l’utilité de cette héroïque institution. Sans
doute devait-il en aller de même façon avec l’incorporation dans
la Nationale Volksarmee, mais dans la canzone, il n’est question
que de la Bundeswehr.
Oui,
oui, Marco Valdo M.I. mon ami. Ce régime de la conscription n’est
pas une nouveauté pour moi ; je l’avais vu naître en France
lors de la Révolution où les hommes s’en allaient chantant la
Marseillaise affronter les troupes des envahisseurs – « Aux
armes ! Etc », où ce régiment de Sambre et Meuse
marchait toujours au cri de Liberté.
Quant
à la canzone, Lucien l’âne mon ami, cette chanson est une sorte
d’adresse à un gars qui a accepté de faire le service militaire –
bon gré, mal gré, on ne sait pas trop – dans cette Bundeswehr
qui, comme je te l’ai dit, sans doute sous la pression d’une
grande partie de la population allemande, elle-même mise sous
pression par les voisins et les autres pays du monde, s’est assagie
et ne paraît plus partager les mêmes ambitions que ses aïeules, ni
se préparer aux mêmes débordements.
Quant
à la chanson, elle essaye de convaincre ce jeune conscrit de
l’inanité de la chose militaire. Comme bien tu le penses, c’est
une chanson nettement antimilitaire et même aujourd’hui où le
service militaire a été aboli et où donc, on n’entre dans la
Bundeswehr que comme volontaire, elle garde tout son sens.
Eh
bien, Marco Valdo M.I., voyons-la et reprenons notre tâche
volontaire et tissons le linceul de ce vieux monde armé, trop armé,
encombré de militaires, casqué et cacochyme.
Heureusement !
Ainsi
Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
Il faut apprendre à tuer pour le pays,
Mais le pays aura cramé.
Avant même que tu aies tiré,
L’ennemi l’aura déjà détruit.
Gauche 2, 3 ! Gauche 2, 3 !
Marche ! Soldats ! Marche !
Gauche 2, 3 ! Gauche 2, 3 !
Jusqu’à crever dans la boue
Gauche 2, 3 ! Gauche 2, 3 !
Le cerveau plein de merde, à la main le fusil.
Oui, c’est la Bundeswehr, la grande armée.
Il faut apprendre à tuer pour le pays
Mais le pays aura cramé
Avant que tu n’aies tiré,
L’ennemi l’aura déjà détruit.
Tu
as un joli uniforme vert,
Tu ne fais rien en dehors de la norme,
Tu t’es parfaitement adapté ,
Pourtant tu iras quand même tout de suite taule.
Tu ne fais rien en dehors de la norme,
Tu t’es parfaitement adapté ,
Pourtant tu iras quand même tout de suite taule.
Il faut apprendre à tuer pour le pays,
Mais le pays aura cramé.
Avant même que tu aies tiré,
L’ennemi l’aura déjà détruit.
Tu
te laisses commander ainsi
Par un ancien officier nazi,
Mais qu’importe la morale,
Fais ton devoir, peu importe le reste.
Par un ancien officier nazi,
Mais qu’importe la morale,
Fais ton devoir, peu importe le reste.
Il
faut apprendre à tuer pour le pays,
Mais le pays aura cramé.
Avant même que tu aies tiré,
L’ennemi l’aura déjà détruit.
Mais le pays aura cramé.
Avant même que tu aies tiré,
L’ennemi l’aura déjà détruit.
Gauche 2, 3 ! Gauche 2, 3 !
Marche ! Soldats ! Marche !
Gauche 2, 3 ! Gauche 2, 3 !
Jusqu’à crever dans la boue
Gauche 2, 3 ! Gauche 2, 3 !
Le cerveau plein de merde, à la main le fusil.
Oui, c’est la Bundeswehr, la grande armée.
Il faut apprendre à tuer pour le pays
Mais le pays aura cramé
Avant que tu n’aies tiré,
L’ennemi l’aura déjà détruit.