Le
Cimetière
Chanson
française – Le Cimetière – Marco Valdo M.I. – 2020
Scènes
de la vie quotidienne au temps de la Guerre de Cent Mille Ans.
Histoire
tirée du roman « Johnny et les Morts » – du moins de
la traduction française de Patrick Couton de « Johnny and the
Dead » de Terry Pratchett. (1995)
Allée du cimetière |
Dialogue
Maïeutique
Avant
toute chose, dit
Lucien l’âne,
j’aimerais
quand même que tu me dises ce qu’est un alderman, car ce sont les
premiers mots de la chanson et c’est le premier personnage qui
apparaît. J’aimerais donc que tu me dises ce que c’est ou du
moins que tu m’en dises assez pour que je me fasse une idée.
Eh
bien, Lucien l’âne mon ami, disons qu’un alderman est, dans les
pays anglo-saxons, est une sorte de magistrat ou d’officier public
municipal
Dans
les pays
anglo-saxons, dit Lucien l’âne, il me semble que souvent, les
choses sont très différentes, tout en étant finalement assez
semblables.
On
peut dire les choses ainsi, reprend Marco Valdo M.I. et c’est
nettement le cas, par exemple, en matière de circulation automobile,
de poids et mesures, d’unités, de monnaie et même, et surtout
peut-être, en matière de cuisine et de nourriture. Cependant,
tu as raison, finalement, ça se ressemble. Donc, pour ce qui est de
l’alderman, on retiendra que c’est un personnage important sur le
plan local.
Maintenant,
dit Lucien l’âne, qu’est-ce que c’est que cette histoire de
cimetière ?
Ah,
dit Marco Valdo M.I., si j’ai commencé cette série – car c’est
une série – par le cimetière, c’est qu’il est le lieu et un
des éléments centraux de cette anthologie, calquée – je ne le
cache pas – sur celle de Spoon River d’Edgar
Lee Masters et
sur les chansons qu’en avait tirées Fabrizio De André et
d’autres,
à commencer par La Colline (La
collina, o Dormono sulla collina) et
les divers personnages : Juge (Un
giudice),
Médecin (Un
Medico),
Soldat (Harry
Wilmans, il soldato - Mario
Peragallo),
Musicien (Il
suonatore Jones)
et Fou (Un
matto).
Ici,
on commence par le cimetière et le premier « mort » :
l’alderman. Je laisse le soin au temps (car il me faudra du temps
pour les écrire) de dévoiler les nouvelles figures et le fond de
l’affaire. Cependant, en voici le cadre : Johnny, le même
garçon que dans Tuer
ou ne pas Tuer, en raison du climat familial épouvantablement
difficile au moment de la séparation de ses parents, se réfugie
chez son grand-père – Papy. Il continue à aller à l’école
mais par un raccourci qui traverse le cimetière et c’est là qu’il
va entendre certains morts, puis qu’il va connaître une étrange
aventure, qui met en émoi la petite ville de Blackbury, en
pleine décrépitude avec ses commerces fermés,
ses usines en ruines, du
fait que la municipalité veut vendre le vieux
cimetière
à un groupe de promoteurs immobiliers. On y rencontre des « héros
de la guerre », héros malgré eux, évidemment. On
y viendra en son temps.
Quand
j’y pense, dit Lucien l’âne, cette petite ville me semble subir
le même destin que bien d’autres dans bien des pays. On prend, on
utilise et puis, on jette.
Cependant,
avant que tu conclues, Lucien l’âne mon ami, je voudrais donner
encore une ou deux indications, d’abord, à propos de la grand-mère
Mémé, femme du Papy, qui avait dû être placée (Alzheimer ?)
dans un centre d’accueil pour personnes âgées au
doux nom de « Rayon de Soleil » et
son quotidien en tout
pareil à tous ceux qui se retrouvent à finir la vie dans un
mouroir :
« Au
Rayon de Soleil, à presque cent ans,
Mémé,
l’hiver dernier, est morte
En
regardant la télé et la porte
En
attendant le repas suivant. »
On
avait déjà abordé cette question en parlant de la chanson de
Patrick Font : « La
Vieille » et celle de l’euthanasie dans
« Euthanasiez-moi »
avec cette mémé Wuillemin qui dit l’implacable vérité et sa
revendication de liberté.
Oh,
dit Lucien l’âne, je suis très impatient de connaître la suite
de cette anthologie en gestation. Pour l’heure, tissons le linceul
de ce vieux monde décrépit,
âpre, avide, cupide et cacochyme.
Heureusement !
Ainsi
Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
L’alderman
Bowler, un homme sensé,
De
toute sa vie, n’avait rien remarqué.
Johnny,
lui, remarque plein de choses
Et
voir les morts le rend tout chose.
Les
gens normaux ignorent presque tout
Sauf
les choses importantes, voyez-vous :
Se
lever, se laver, déjeuner, aller aux toilettes,
Les
gens normaux vivent ainsi ; rien ne les inquiète.
Tout
le jour, Maman fume comme un pompier.
Las
de crier, Papa est parti.
Les
choses vont peut-être s’arranger.
Johnny
s’est installé chez Papy.
Pour
aller à l’école le matin et revenir le soir,
Le
long du canal, il prend le sentier,
Traverse
le cimetière par-derrière le crématoire :
Ça
raccourcit le chemin de moitié.
Un
vieux cimetière peuplé de freux, de hiboux,
De
mulots, de rats, de chats et de renards.
Un
chouette endroit sympa, avec un sous-sol où
Les
squelettes sourient dans le noir.
Au
Rayon de Soleil, à presque cent ans,
Mémé,
l’hiver dernier, est morte
En
regardant la télé et la porte
En
attendant le repas suivant.
Le
cimetière est une vraie ville
Entre
l’avenue du Sud et l’allée du Nord,
Il
y a une placette, une sorte de centre-ville
Avec
ses mausolées des riches morts.
Sur
le marbre en lettres de bronze terni,
Alderman
Thomas Bowler,
Pro
bono publico, c’est écrit.
Johnny
frappe à la porte en fer.
Oui,
dit l’alderman, c’est pourquoi ?
Vous
êtes mort ? Certainement !
En
mil-neuf-cent-six, par là.
Un
très bel enterrement, vraiment.
Comment
tu t’appelles, mon jeune ami ?
Johnny.
Comment c’est d’être mort ?
Bof,
parfois, on s’ennuie très fort.
Passe
quand tu veux, je ne bouge pas d’ici.
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