samedi 27 juin 2020

Le Cimetière




Le Cimetière

Chanson française – Le Cimetière – Marco Valdo M.I. – 2020

Scènes de la vie quotidienne au temps de la Guerre de Cent Mille Ans.
Histoire tirée du roman « Johnny et les Morts » – du moins de la traduction française de Patrick Couton de « Johnny and the Dead » de Terry Pratchett. (1995)


Allée du cimetière


Dialogue Maïeutique

Avant toute chose, dit Lucien l’âne, j’aimerais quand même que tu me dises ce qu’est un alderman, car ce sont les premiers mots de la chanson et c’est le premier personnage qui apparaît. J’aimerais donc que tu me dises ce que c’est ou du moins que tu m’en dises assez pour que je me fasse une idée.

Eh bien, Lucien l’âne mon ami, disons qu’un alderman est, dans les pays anglo-saxons, est une sorte de magistrat ou d’officier public municipal

Dans les pays anglo-saxons, dit Lucien l’âne, il me semble que souvent, les choses sont très différentes, tout en étant finalement assez semblables.

On peut dire les choses ainsi, reprend Marco Valdo M.I. et c’est nettement le cas, par exemple, en matière de circulation automobile, de poids et mesures, d’unités, de monnaie et même, et surtout peut-être, en matière de cuisine et de nourriture. Cependant, tu as raison, finalement, ça se ressemble. Donc, pour ce qui est de l’alderman, on retiendra que c’est un personnage important sur le plan local.

Maintenant, dit Lucien l’âne, qu’est-ce que c’est que cette histoire de cimetière ?

Ah, dit Marco Valdo M.I., si j’ai commencé cette série – car c’est une série – par le cimetière, c’est qu’il est le lieu et un des éléments centraux de cette anthologie, calquée – je ne le cache pas – sur celle de Spoon River d’Edgar Lee Masters et sur les chansons qu’en avait tirées Fabrizio De André et d’autres, à commencer par La Colline (La collina, o Dormono sulla collina) et les divers personnages : Juge (Un giudice), Médecin (Un Medico), Soldat (Harry Wilmans, il soldato - Mario Peragallo), Musicien (Il suonatore Jones) et Fou (Un matto). Ici, on commence par le cimetière et le premier « mort » : l’alderman. Je laisse le soin au temps (car il me faudra du temps pour les écrire) de dévoiler les nouvelles figures et le fond de l’affaire. Cependant, en voici le cadre : Johnny, le même garçon que dans Tuer ou ne pas Tuer, en raison du climat familial épouvantablement difficile au moment de la séparation de ses parents, se réfugie chez son grand-père – Papy. Il continue à aller à l’école mais par un raccourci qui traverse le cimetière et c’est là qu’il va entendre certains morts, puis qu’il va connaître une étrange aventure, qui met en émoi la petite ville de Blackbury, en pleine décrépitude avec ses commerces fermés, ses usines en ruines, du fait que la municipalité veut vendre le vieux cimetière à un groupe de promoteurs immobiliers. On y rencontre des « héros de la guerre », héros malgré eux, évidemment. On y viendra en son temps.

Quand j’y pense, dit Lucien l’âne, cette petite ville me semble subir le même destin que bien d’autres dans bien des pays. On prend, on utilise et puis, on jette.

Cependant, avant que tu conclues, Lucien l’âne mon ami, je voudrais donner encore une ou deux indications, d’abord, à propos de la grand-mère Mémé, femme du Papy, qui avait dû être placée (Alzheimer ?) dans un centre d’accueil pour personnes âgées au doux nom de « Rayon de Soleil » et son quotidien en tout pareil à tous ceux qui se retrouvent à finir la vie dans un mouroir :

« Au Rayon de Soleil, à presque cent ans,
Mémé, l’hiver dernier, est morte
En regardant la télé et la porte
En attendant le repas suivant. »

On avait déjà abordé cette question en parlant de la chanson de Patrick Font : « La Vieille » et celle de l’euthanasie dans « Euthanasiez-moi » avec cette mémé Wuillemin qui dit l’implacable vérité et sa revendication de liberté.

Oh, dit Lucien l’âne, je suis très impatient de connaître la suite de cette anthologie en gestation. Pour l’heure, tissons le linceul de ce vieux monde décrépit, âpre, avide, cupide et cacochyme.

Heureusement !

Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane



L’alderman Bowler, un homme sensé,
De toute sa vie, n’avait rien remarqué.
Johnny, lui, remarque plein de choses
Et voir les morts le rend tout chose.

Les gens normaux ignorent presque tout
Sauf les choses importantes, voyez-vous :
Se lever, se laver, déjeuner, aller aux toilettes,
Les gens normaux vivent ainsi ; rien ne les inquiète.

Tout le jour, Maman fume comme un pompier.
Las de crier, Papa est parti.
Les choses vont peut-être s’arranger.
Johnny s’est installé chez Papy.

Pour aller à l’école le matin et revenir le soir,
Le long du canal, il prend le sentier,
Traverse le cimetière par-derrière le crématoire :
Ça raccourcit le chemin de moitié.

Un vieux cimetière peuplé de freux, de hiboux,
De mulots, de rats, de chats et de renards.
Un chouette endroit sympa, avec un sous-sol où
Les squelettes sourient dans le noir.

Au Rayon de Soleil, à presque cent ans,
Mémé, l’hiver dernier, est morte
En regardant la télé et la porte
En attendant le repas suivant.

Le cimetière est une vraie ville
Entre l’avenue du Sud et l’allée du Nord,
Il y a une placette, une sorte de centre-ville
Avec ses mausolées des riches morts.

Sur le marbre en lettres de bronze terni,
Alderman Thomas Bowler,
Pro bono publico, c’est écrit.
Johnny frappe à la porte en fer.

Oui, dit l’alderman, c’est pourquoi ?
Vous êtes mort ? Certainement !
En mil-neuf-cent-six, par là.
Un très bel enterrement, vraiment.

Comment tu t’appelles, mon jeune ami ?
Johnny. Comment c’est d’être mort ?
Bof, parfois, on s’ennuie très fort.
Passe quand tu veux, je ne bouge pas d’ici.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire