Sus
au Trésor de Guerre
Chanson
française – Sus
au Trésor
de
Guerre– Marco Valdo
M.I. – 2018
Ulenspiegel le Gueux – 109
Opéra-récit en multiples épisodes, tiré du roman de Charles De Coster : La Légende et les aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d’Ulenspiegel et de Lamme Goedzak au Pays de Flandres et ailleurs (1867).
(Ulenspiegel – IV, XIII)
Ulenspiegel le Gueux – 109
Opéra-récit en multiples épisodes, tiré du roman de Charles De Coster : La Légende et les aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d’Ulenspiegel et de Lamme Goedzak au Pays de Flandres et ailleurs (1867).
(Ulenspiegel – IV, XIII)
Dialogue
Maïeutique
En
ce temps-là, Lucien l’âne mon ami, Lamme attendait sa mort sur la
potence et maudissait ses bourreaux. Avec Till et Nelle, il marchait
au supplice en portant sa bedaine en colère. C’est le point de
départ de cette chanson où le sort soudain bascule.
Bien
sûr, dit Lucien l’âne, comme les personnages de légendes ne
peuvent mourir aussi banalement, Nelle, Till et Lamme ne mourront pas
cette fois-ci ; ils ont le destin de mourir tranquillement un
jour lointain dans la paix des Pays libérés. Ou peut-être, ne
mourront-ils jamais comme tous les gens de cet autre monde d’où
toi-même, tu es issu.
Et
toi aussi, reprend Marco Valdo M.I. un peu songeur. À propos de
personnages de légendes, il m’est venu à l’esprit que le nom le
plus approprié pour cette histoire de Till et consorts serait « La
Chanson de Till ou la Geste de Liberté », ce qui la
replacerait dans le courant des grandes chansons des trouvères et
renouerait avec le fil interrompu. Par la même occasion, on
redonnerait à la chanson – canzone, cantone… – sa vraie
dimension.
C’est
une bonne idée, répond Lucien l’âne. Donc, nos personnages, nos
héros – osons le mot – marchent à la mort et puis, que se
passe-t-il ?
La
nuti tombe et dans la pénombre, soudain, arrivent « au galop »
les renforts des Gueux qui avaient été longtemps empêchés par les
circonstances ; ils déboulent à cette dernière extrémité
(du moins pour Nelle, Till et Lamme ; pour les pendus et les
décapités, c’est trop tard) comme le tonnerre brise la cuirasse
des nuages. C’est un véritable coup de théâtre et pour les
soldats espagnols bien campés dans leur récente victoire, c’est
la surprise : le massacre change de camp. Pour l’armée du
ducaillon Frédéric, digne fils du duc d’Albe, c’est la
débandade. Dans la foulée, la flotte des Gueux s’est dégagée et
a repris la maîtrise des bouches du Rhin et de la Meuse, le contrôle
de cet enchevêtrement de mer, de lacs et de canaux.
Lors
donc, si je comprends, dit Lucien l’âne, nos héros, qui sont des
héros comme le sont les héros de bande dessinée ou comme du
théâtre de Tchanchès ou les marionnettes de Toone.
Tu
ne crois pas si bien dire, Lucien l’âne mon ami, car les
marionnettes de chez Toone sont la descendance directe de celles qui
naquirent à Bruxelles sous l’impulsion involontaire de Philippe
II, le tyran espagnol qui avait fait fermer les théâtres pour
éteindre les foyers de rébellion qui y couvaient ou qui auraient pu
y couver. En conséquence, dans les rues sombres de Bruxelles,
jaillirent comme des champignons après la pluie de petits théâtres
clandestins où des comédiens toujours interdits donnaient leurs
voix aux
pouchenelles, qui sont les poupées de bois de ce théâtre en
réduction. Et pour nos héros, il est temps de retourner sur leur
navire où ce n’est que festin et ripaille. Et la fête est
pimentée par l’arrive d’une flotte de Lisbonne, escortée parla
marine du Roi d’Espagne. Une de ces armadas qui venait ravitailler
et renforcer l’armée d’occupation. Ignorant les derniers
retournements, cette flotte va se jeter dans l’antre des Gueux et
ces derniers vont s’empresser de s’en emparer et de mettre la
main sur un formidable trésor de guerre : un demi-million de
pièces d’or ; de quoi poursuivre la lutte, sans compter les
épices, le sucre, les armes, les munitions, la poudre…
Voilà
une terrible aventure qui finit bien, conclut Lucien l’âne. Alors,
tissons le linceul de ce vieux monde corseté d’or et d’argent,
avare, avide, arrogant et cacochyme.
Heureusement !
Ainsi
Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
Nelle,
Till et Lamme marchent sans bruit.
Heure
de mort dans la noire nuit,
Nelle
dit : « D’autres délivreront les Pays. »
« Oh,
ma douce, pourquoi m’as-tu suivi ? »
Les
Espagnols baillent encore aux corneilles.
Par-dessus
les blés, sonnent cliquetis
D’armes ;
on entend mille cris,
Les
arquebuses étincellent comme soleils,
« Vive
les Gueux ! », ils arrivent en courant,
« Vive
les Gueux ! », les piques en avant,
« Vive
les Gueux ! », ils descendent au galop,
« Vive
le Gueux ! », hache au poing, le coteau.
Sur
les soldats que les torches éclairent
Et
que la nuit noire méduse
Tirent,
tirent les arquebuses
Mille
et mille petits éclairs.
Tue !
Tue !, tombent les Espagnols,
Pris
dans le cercle de fer et de feu.
« Pas
de pitié pour ces guignols,
Guerre
sans merci, Vive les Gueux ! »
Plus
tard, sur la mer libre, les Gueux
Chantent
aux mouettes les chants de liberté,
Chantent
aux goélands les jours joyeux
Et
le bonheur des Pays libérés.
Lamme
descend à terre dans chaque port
Et
ramène des vivres à foison :
Volailles,
moutons, bœufs et porcs,
Pommes,
carottes, haricots et salaisons.
Noces
et festins sur les navires,
La
senteur des sauces s’élève au ciel.
Une
flotte de Lisbonne du large vire.
Pour
le Gueux, c’est tout miel.
La
flotte sans nouvelle ignore
Que
les Gueux tiennent les ports.
Le
combat s’engage ; après mille morts,
La
flotte ibérique se rend au plus fort.
Et
les Gueux de compter : joyaux, sucre,
Épices,
muscade, girofle, gingembre ;
Réaux,
ducats, cinq cent mille pièces d’or
Trésor
de guerre : l’Espagnol paye le prix fort.
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