Le Cœur et l’Esprit
Chanson
française – Le Cœur
et l’Esprit – Marco Valdo M.I. –
2018
Ulenspiegel le Gueux – 59
Opéra-récit en multiples épisodes, tiré du roman de Charles De Coster : La Légende et les aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d’Ulenspiegel et de Lamme Goedzak au Pays de Flandres et ailleurs (1867).
(Ulenspiegel – III, XXIII)
Ulenspiegel le Gueux – 59
Opéra-récit en multiples épisodes, tiré du roman de Charles De Coster : La Légende et les aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d’Ulenspiegel et de Lamme Goedzak au Pays de Flandres et ailleurs (1867).
(Ulenspiegel – III, XXIII)
Laurence Sterne |
Dialogue maïeutique
« Le
Cœur et l’Esprit », en voilà un beau titre, dit
Lucien
l’âne. Encore
faut-il savoir de quoi il est question. Peut-être même que ce
pourrait être une de nos devises et pourquoi pas, une devise des
Chansons contre la Guerre.
En
effet, Lucien l’âne mon ami, c’est un titre qui évoque toute une
forme de personnalité, toute une manière d’être et de se
comporter. C’est en quelque sorte
une boussole morale, une inclinaison
de l’être qui penche toujours du bon côté.
Ainsi
en va-t-il pour le titre, mais dis-moi Marco Valdo M.I. mon ami,
dis-moi un peu ce que raconte la canzone, car – comme tu peux t’en
douter – j’attends avec impatience la suite de l’histoire. Pour
moi, tes chansons sont devenues comme les épisodes d’un feuilleton
comme en écrivait Pierre Allexi Joseph, Ferdinand de Ponson du
Terrail, connu sous le titre de vicomte de Ponson du Terrail.
Je
reconnais bien là ton goût pour les noms à rallonge. Cependant,
Lucien l’âne mon ami, je préférerais invoquer le feuilletoniste
anglais ou presque, il publia au fur et à mesure de l’écriture –
cette révélation prit dix ans, son proprement extraordinaire et
décapant « Vie et opinions de Tristram Shandy », qu’on
ne se fatigue jamais de relire, car il est à chaque fois une autre
découverte.
Oh,
je le sais, dit Lucien l’âne en riant, moi qui le relis depuis
l’époque ce coïtum interruptum (accusatif) et tout ce qui
s’ensuit comme on boit un porto datant de sa naissance. Imagine ce
que ce serait dans mon cas ; d’ailleurs, à ma naissance, le
porto n’existait pas.
Soit,
dit Marco Valdo M.I., je ne voudrais pas tromper les gens : le
porto est un vin vénérable, quand même. Ah, Sterne – ce presque
archevêque d’York, car s’il n’avait écrit et eu des
polémiques et des aventures amoureuses trop voyantes, il l’eut été
comme son aïeul.
Mais
quand même, Marco Valdo M.I. mon ami, Laurence Sterne, l’auteur de
Tristram, archevêque d’York, Yorick porté au rang d’archevêque,
troisième personnage du Royaume d’Angleterre, voilà qui aurait
redoré la couronne et mis l’humour au rang de grandeur nationale.
De
fait, Lucien l’âne mon ami, il est parfaitement louable d’imaginer
Sterne comme archevêque, Sterne relatant aux fidèles de Sa Majesté
les joies du baptême à la canule, Sterne est bien celui à qui nous
devons tant et le droit de dialoguer à notre guise. Mais, vois-tu,
Lucien l’âne mon ami, tout ceci n’a que peu à voir avec la
canzone. Quoique… sauf à considérer évidemment que la chanson –
comme le « je » de Rimbaud – est une autre, ainsi
qu’elle l’a souvent démontré.
Oui,
dit Lucien l’âne, ça ne lui va pas de servir de faire-valoir au
commerce ou de trafiquer l’argent et le reste. D’ailleurs, elle
se révolte, comme Till. Elle en a marre d’ânonner des insanités,
de débiter des débilités. Bien sûr qu’il lui faut du son
(parfois), mais enfin, elle a toute sa tête. Donc, lors de l’épisode
précédent dans la réalisation en direct de leur
guet-apens,
nous avions laissé nos amis Till et Lamme avec la nécessité de
s’éloigner au plus vite de l’auberge de Marlaire et surtout, des
cadavres des trois prédicants, qu’ils venaient d’assassiner –
pur la bonne cause pourtant. Entretemps, ils sont arrivés à Huy,
mais ayant changé de rive à Andenne pour égarer leurs poursuivants
éventuels, ils ont franchi li pontia et ont repris le cours de leur
périple, car ils doivent, comme on le sait, aller à Maestricht en
dépit de tous les obstacles, en passant obligatoirement par Landen,
comme le démontre la canzone. On les retrouve là-bas, après le cri
de l’alouette et le chant du coq hardi – lequel, comme on sait
ici, est le coq wallon, symbole de liberté, avec celui qui les a
accueillis. Je ne te dirai pas le reste, sinon à quoi servirait de
lire la chanson.
Bien
sûr, Marco Valdo
M.I. mon ami, il y faut du suspense, un brin de mystère, un
territoire inconnu et inexploré et étant moi aussi un explorateur
invétéré, un âne itinérant dans toute l’histoire, furetant
sans désemparer depuis des milliers d’années, j’apprécie
particulièrement d’avoir à découvrir ce que je ne sais pas ou
que je ne connais pas encore. Maintenant, si tu le veux, revenons à
notre tâche et tissons le linceul de ce vieux monde sans cœur, sans
esprit, sans vue de lui-même, sans conscience, sans volonté et
cacochyme.
Heureusement !
Ainsi
Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
Lamme
demande : « Où allons-nous ? »
« À
Maestricht », dit Till.
Lamme
dit : « Il faut être fou,
Le
duc espagnol tient la ville. »
Till
dit : « Pour les trois prédicants,
Les
corbeaux, les hiboux et les vautours
S’en
chargent opportunément
Tour
à tour. »
Lamme
dit : « À Maestricht, ils sauront
Et
à la mort, ils nous mèneront,
Haut
et court, ils nous pendront. »
Till
répond : « Nous passerons.
À
Maestricht, nous devons être tantôt ;
En
passant par Landen, nous y serons bientôt.
À
Landen, l’alouette sifflera.
À
Landen, le coq hardi répondra. »
À
Landen, l’alouette siffle,
À
Landen, le coq hardi répond.
« Vive
le Gueux, amis libres !
Entrez
en ma maison.
Envoyés
du Prince, entrez,
Mangez
et buvez !
Voyez
le jambon et les boudins,
Les
verres emplis de vin. »
Lamme
boit comme le sable sec ;
Lamme
mange à grand bec.
Filles,
gars, tous viennent le voir
Titan
besognant des mâchoires.
« Cent
paysans partiront
Dans
une semaine
Pour
travailler à grande peine
Aux
digues de Bruges et environs.
Par
des chemins divers,
À
cinq ou six, ils iront
À
Bruges, les Gueux trouveront
Les
barques pour atteindre la mer. »
Et
dit encore le maître des lieux
« Je
donnerai arme et argent :
Dix
florins à chaque gueux
Et
un grand coutelas bien tranchant. »
Till
dit : « C’est là magnificence. »
Thomas,
le maître des lieux, dit :
« Je
ne besogne pas pour la récompense,
J’agis
selon le cœur et l’esprit. »
« Le
Cœur et l’Esprit », en voilà un beau titre, dit
Lucien
l’âne. Encore
faut-il savoir de quoi il est question. Peut-être même que ce
pourrait être une de nos devises et pourquoi pas, une devise des
Chansons contre la Guerre.
En
effet, Lucien l’âne mon ami, c’est un titre qui évoque tut une
forme de personnalité, tout une manière d’être et de se
comporter. C’est en quelque sorte
une boussole morale, une inclinaison
de l’être qui penche toujours du bon côté.
Ainsi
en va-t-il pour le titre, mais dis-moi Marco Valdo M.I. mon ami,
dis-moi un peu ce que raconte la canzone, car – comme tu peux t’en
douter – j’attends avec impatience la suite de l’histoire. Pour
moi, tes chansons sont devenues comme les épisodes d’un feuilleton
comme en écrivait Pierre Allexi Joseph, Ferdinand de Ponson du
Terrail, connu sous le titre de vicomte de Ponson du Terrail.
Je
reconnais bien là ton goût pour les noms à rallonge. Cependant,
Lucien l’âne mon ami, je préférerais invoquer le feuilletoniste
anglais ou presque, il publia au fur et à mesure de l’écriture –
cette révélation prit dix ans, son proprement extraordinaire et
décapant « Vie et opinions de Tristram Shandy », qu’on
ne se fatigue jamais de relire, car il est à chaque fois une autre
découverte.
Oh,
je le sais, dit Lucien l’âne en riant, moi qui le relis depuis
l’époque ce coïtum interruptum (accusatif) et tout ce qui
s’ensuit comme on boit un porto datant de sa naissance. Imagine ce
que ce serait dans mon cas ; d’ailleurs, à ma naissance, le
porto n’existait pas.
Soit,
dit Marco Valdo M.I., je ne voudrais pas tromper les gens : le
porto est un vin vénérable, quand même. Ah, Sterne – ce presque
archevêque d’York, car s’il n’avait écrit et eu des
polémiques et des aventures amoureuses trop voyantes, il l’eut été
comme son aïeul.
Mais
quand même, Marco Valdo M.I. mon ami, Laurence Sterne, l’auteur de
Tristram, archevêque d’York, Yorick porté au rang d’archevêque,
troisième personnage du Royaume d’Angleterre, voilà qui aurait
redoré la couronne et mis l’humour au rang de grandeur nationale.
De
fait, Lucien l’âne mon ami, il est parfaiement louable d’imaginer
Sterne comme archevêque, Sterne relatant aux fidèles de Sa Majesté
les joies du baptême à la canule, Sterne est bien celui à qui nous
devons tant et le droit de dialoguer à notre guise. Mais, vois-tu,
Lucien l’âne mon ami, tout ceci n’a que peu à voir avec la
canzone. Quoique… sauf à considérer évidemment que la chanson –
comme le « je » de Rimbaud – est une autre, ainsi
qu’elle l’a souvent démontré.
Oui,
dit Lucien l’âne, ça ne lui va pas de servir de faire-valoir au
commerce ou de trafiquer l’argent et le reste. D’ailleurs, elle
se révolte, comme Till. Elle en a marre d’ânonner des insanités,
de débiter des débilités. Bien sûr qu’il lui faut du son
(parfois), mais enfin, elle a toute sa tête. Donc, lors de l’épisode
précédent dans la réalisation en direct de leur
guet-apens[[58007]],
nous aviosn laissé nos amis Till et Lamme avec la nécessité de
s’éloigner au plus vite de l’auberge de Marlaire et surtout, des
cadavres des trois prédicants, qu’ils venaient d’assassiner –
pur la bonne cause pourtant. Entretemps, ils sont arrivés à Huy,
mais ayant changé de rive à Andenne pour égarer leurs poursuivants
éventuels, ils ont franchi li pontia et ont repris le cours de leur
périple, car ils doivent, comme on le sait, aller à Maestricht en
dépit de tous les obstacles, en passant obligatoirement par Landen,
comme le démontre la canzone. On les retrouve là-bas, après le cri
de l’alouette et le chant du coq hardi – lequel, comme on sait
ici, est le coq wallon, symbole de liberté, avec celui qui les a
accueillis. Je ne te dirai pas le reste, sinon à quoi servirait de
lire la chanson.
Bien
sûr, Marco Valdo
M.I. mon ami, il y faut du suspense, un brin de mystère, un
territoire inconnu et inexploré et étant moi aussi un explorateur
invétéré, un âne itinérant dans toute l’histoire, furetant
sans désemparer depuis des milliers d’années, j’apprécie
particulièrement d’avoir à découvrir ce que je ne sais pas ou
que je ne connais pas encore. Maintenant, si tu le veux, revenons à
notre tâche et tissons le linceul de ce vieux monde sans cœur, sans
esprit, sans vue de lui-même, sans conscience, sans volonté et
cacochyme.
Heureusement !
Ainsi
Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
Lamme
demande : « Où allons-nous ? »
« À
Maestricht », dit Till.
Lamme
dit : « Il faut être fou,
Le
duc espagnol tient la ville. »
Till
dit : « Pour les trois prédicants,
Les
corbeaux, les hiboux et les vautours
S’en
chargent opportunément
Tour
à tour. »
Lamme
dit : « À Maestricht, ils sauront
Et
à la mort, ils nous mèneront,
Haut
et court, ils nous pendront. »
Till
répond : « Nous passerons.
À
Maestricht, nous devons être tantôt ;
En
passant par Landen, nous y serons bientôt.
À
Landen, l’alouette sifflera.
À
Landen, le coq hardi répondra. »
À
Landen, l’alouette siffle,
À
Landen, le coq hardi répond.
« Vive
le Gueux, amis libres !
Entrez
en ma maison.
Envoyés
du Prince, entrez,
Mangez
et buvez !
Voyez
le jambon et les boudins,
Les
verres emplis de vin. »
Lamme
boit comme le sable sec ;
Lamme
mange à grand bec.
Filles,
gars, tous viennent le voir
Titan
besognant des mâchoires.
« Cent
paysans partiront
Dans
une semaine
Pour
travailler à grande peine
Aux
digues de Bruges et environs.
Par
des chemins divers,
À
cinq ou six, ils iront
À
Bruges, les Gueux trouveront
Les
barques pour atteindre la mer. »
Et
dit encore le maître des lieux
« Je
donnerai arme et argent :
Dix
florins à chaque gueux
Et
un grand coutelas bien tranchant. »
Till
dit : « C’est là magnificence. »
Thomas,
le maître des lieux, dit :
« Je
ne besogne pas pour la récompense,
J’agis
selon le cœur et l’esprit. »
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