jeudi 18 mai 2017

FINI LA GUERRE

FINI LA GUERRE


Version française – FINI LA GUERRE – Marco Valdo M.I. – 2017
Chanson italienne – Finì la guerraDodi Moscati 1997





Si tu veux des soldats, t’as qu’à les faire en bois !



C’est l’occasion de rappeler que durant la guerre de 1915-18, les étudiants se proclamèrent interventionnistes.


Dialogue maïeutique

Lucien l’âne mon ami, voici une canzone dont le titre ne demande pas vraiment d’explication et je pense que tu ne m’en demanderas pas. Ce qui nous permettra de commencer notre dialogue maïeutique par une interrogation étonnée à propos du commentaire lapidaire du commentateur italien à mon sens trop général qui désigne les « étudiants » comme « interventionnistes » durant la guerre de 1915-18. D’abord, il convient de préciser ici que s’il s’agit d’étudiants, ce sont les étudiants italiens dont il est question.

En effet, Marco Valdo M.I. mon ami, ça paraît surprenant vu de maintenant – un siècle plus tard et après les grands mouvements étudiants contre la guerre au Vietnam et qui ont marqué l’année 1968, tous les mouvements pacifistes des années 50-60 et ceux contre la bombe atomique ; sans doute, les étudiants n’étaient-ils pas seuls à mener ces protestations, mais il y en avait beaucoup.

Dès lors, Lucien l’âne mon ami, quand on lit un tel commentaire, on est étonné, pour ne pas dire incrédule. Et pourtant ? Et pourtant, c’est exact, mais partiellement seulement. Il serait plus exact de noter : « une partie des étudiants », tout comme ce fut le cas pour le reste de la population. Pour ce qui est des étudiants de l’époque, je peux au moins citer un étudiant turinois qui ne l’était pas : Carlo Levi (né en 1902 – antifasciste militant de la première heure). Cet étudiant-là était le neveu, par sa mère, du militant socialiste Claudio Treves, nettement anti-interventionniste et ce jeune homme était, comme on dit plus couramment en italien, de matrice libertaire et dans la lutte contre le fascisme rejoindra le mouvement Giustizia e Libertà, dit libéral-socialiste et dont la visée était profondément révolutionnaire. Cela dit, e fut certainement le cas de la majorité des étudiants et dans les deux camps. L’exaltation patriotique est un virus qui infecte la jeunesse dès lors qu’il existe des frontières, des nations et des engouements massifs.
Au-delà de cette remarque, parlons de cette chanson, qui est composée d’une filastrocca toscane, qui lui sert de support et vise à favoriser la mémorisation. Comme tu le sais sans doute, la filastrocca est cette sorte de comptine, de ritournelle qui est généralement composée de propositions qui s’enchaînent par une logique interne, sans trop se soucier de coller à une réalité. On en connaît beaucoup (Filastrocca burlona, Filastrocca del Natale, Filastrocca del precario, Filastrocca delle parole, Filastrocca di Jacob detto il ladro, Filastrocca quanto costa , Filastrocca vietnamita et Di filastrocche e fucili) qui sont très appréciées des enfants qui les utilisent jusque dans leurs jeux. Quant à celle-ci je ne sais de quand elle date, ni de quelle guerre, elle relate un épisode. Car il y a une contradiction entre elle et le cœur de la chanson qui concerne la guerre de 1915-18, durant laquelle il n’y avait pas de raison d’aller « en France… pour tuer le capitaine ». Par contre, elle est certainement pacifiste et s’adresse en direct au roi d’Italie, Victor Emmanuel. Pour les détails, voir la chanson. Sauf peut-être pour un bout de phrase : « Victor Emmanuel, roi d’Italia : Combien d’hommes, chaque jour tu abats ? » qui anticipe assez bien le slogan des étudiants et manifestants étazuniens lors de la guerre du Vietnam, qui manifestaient en interpellant le président Lyndon Baines Johnson, qui avait pris la suite de J.F. K. (John Fitzgerald Kennedy), d’une façon presque similaire : « Hey ! LBJ ! How many kids do you kill today ? » – Hey! LBJ combien de gars as-tu tués aujourd’hui ? ».

Eh bien, Marco Valdo M.I. mon ami, puisque dans la filastrocca, il est question d’un âne, tu penses bien qu’il ne pourrait s’agir de moi qui ai vu des meuniers pendus et bien des fois, quand des mauvaises conditions (sécheresse, orages…) tarissaient les récoltes ou quand les troupes vagabondes ou d’envahisseurs s’en prenaient aux paysans, c’est-à-dire littéralement, aux gens du pays. Pour le reste, reprenons notre tâche et avec la patience du moulin poussé par l’âne ou le vent ou l’eau, tissons le linceul de ce vieux monde belliqueux, absurde, aride, avide et cacochyme.


Heureusement !

Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane



Trotte, trotte, petit poulain !
Mène l'âne au moulin !
Le moulin est foutu
Et le meunier s’est pendu,
Il s’est pendu au râtelier,
Sa femme prépare le dîner,
Elle le fait pour donner à manger
À Piccirillo qui part en France,
Avec sa hache, avec sa lance
Et son petit couteau dans sa gaine
Pour tuer le capitaine.
Le capitaine tombe à terre
Et ainsi finit la guerre.
Je maudis ceux qui veulent la guerre,
Les premiers étaient universitaires.
Combien de jeunes gens sous la terre ?
Combien de jeune sang pour des frontières ?
Victor Emmanuel, roi d’Italia :
Combien d’hommes, chaque jour tu abats ?
Si tu veux des soldats, t’as qu’à les faire en bois !
Mais les miens, laisse-les-moi.
Victor Emmanuel, que fais-tu ?
La meilleure jeunesse, tu la veux toute entière ?
La meilleure jeunesse, tu la veux toute entière ?
Et mon bel amour, quand me le rendras-tu ?

Trotte, trotte, petit poulain
Mène l'âne au moulin
Le moulin est foutu
Et le meunier s’est pendu
Il s’est pendu au râtelier
Sa femme prépare le dîner
Elle le fait pour donner
À Piccirillo qui va en France
avec sa hache et avec sa lance
avec un petit couteau dans sa gaine
Pour tuer le capitaine
Le capitaine tombe à terre
et ainsi finit la guerre.


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