La
Patrouille portant potence
Chanson
française – La
Patrouille portant potence
– Marco Valdo M.I. – 2015
ARLEQUIN
AMOUREUX – 12
Opéra-récit
historique en multiples épisodes, tiré du roman de Jiří Šotola
« Kuře na Rožni » publié en langue allemande, sous le
titre « VAGANTEN, PUPPEN UND SOLDATEN » – Verlag C.J.
Bucher, Lucerne-Frankfurt – en 1972 et particulièrement de
l'édition française de « LES JAMBES C'EST FAIT POUR
CAVALER », traduction de Marcel Aymonin, publiée chez
Flammarion à Paris en 1979.
Hop, hissez le rideau !
Cette cour, c'est mon berceau
Dit Matthias tout joyeux
Rentrant au logis de ses aïeux.
|
Donc,
Lucien
l'âne mon ami, nous
voici encore une fois de retour auprès de l'Arlequin amoureux. C'est
la douzième. Et, comme toujours avec chaque nouvelle chanson, je me
repose la même question.
Et
quelle question
pourrait-elle
être si lancinante ? Je pense qu'il devrait s'agir
de ce doute qui te prend et où comme nombre de ceux qui écrivent
des paroles, des musiques, qui peignent… tu t'interroges sur ce que
tu es en train de faire. Est-ce que je me trompe ?
Certes
pas, Lucien l'âne mon ami, au contraire, tu as mis le doigt sur ce
qui me transperce, car c'est bien une question comme celle-là qui me
revient à chaque fois. Je me demande si je fais assez bien, si je
fais bien de faire, si je ne ferais pas mieux de ne rien faire, si
cette façon de faire est bonne. Oh, je ne suis pas aussi tourmenté
qu'un Gombrowicz, mais enfin, c'est bien de cet ordre-là. On
est dans l'ordre de la création et non de la production. C'est en
quelque sorte vital, existentiel. Et puis, en finale, je conclus en
me disant que si le cerisier devait se poser de telles questions, il
n'y aurait jamais de cerises et honnêtement, je vois bien ce que ce
travail
a d'original, comme il s'écarte des chemins fréquentés et advienne
que pourra !
Moi,
dit Lucien l'âne, je vais te dire, Marco Valdo M.I. mon ami, ce que
j'en pense, moi qui suis ton compagnon de voyage et sans
doute,
ta conscience réflexive. D'abord, il te faut te persuader que tout
ceci est l'expression tranquille de ta liberté, qui ne demande qu'à
se déployer dans le temps et le lieu (hic et nunc) où tu résides.
Où pourrait-elle te trahir ? Ensuite, et c'est assez essentiel,
tu le fais pour le faire et sans véritablement d’autre intérêt
que la réalisation elle-même, au jour le jour, comme va la vie
elle-même. Cahin-caha !
C'est
une démarche lente et créatrice et cela est bien. Pour le reste,
comme tu le dis, advienne que pourra.
Tant
qu'on y est à parler de ça, laisse-moi te dire, Lucien l'âne mon
ami, un dernier mot. Ces séries – il y en a plusieurs – et ces
centaines de versions de chansons me semblent constituer elles-mêmes
une sorte de très grand récit, une épopée qu'on peut lire en la
prenant par tous les bouts. Et on pourrait en dire autant des CCG,
ouvrage collectif, s'il en est. Mais aussi on peut en extraire des
récits singuliers ou des histoires plus grandes. J'ai par exemple
repris à part, comme il
arrive qu'on le fasse d'une
partie d'un livre – par exemple, les 100 chansons des Histoires
d'Allemagne et les deux vialatteries qui les introduisent et j'en ai
fait une version digitale
(http://ansdegrass.blogspot.be/)
en
les présentant
dans l'ordre chronologique comme elles le seraient dans un livre.
C'est
un tout cohérent et une sorte de livre électronique. Je
l'ai fait aussi pour Dachau
Express et
ses 24 chansons. Je devrai le faire pour le Cahier
Ligné et
ses 104
chansons. Et les autres… Je sais aussi que ce sont là des suites
tellement démesurées qu'elles en deviennent des chansons
impossibles. On pourrait certes en extraire l'une ou l'autre, mais
elles seraient comme orphelines.
D'accord,
Marco Valdo M.I. mon ami, voilà qui me paraît tout
à fait
bien mis au point et maintenant, dis-moi où on en est dans cette
histoire d'Arlequin amoureux.
Arlequin,
souviens-toi, Lucien l'âne mon ami, était après un long voyage
arrivé devant chez lui, devant la ferme familiale. Au village, il a
déjà appris que sa mère est morte, que sa sœur est morte et que
son frère cadet Lukas est devenu le maître des lieux et est en
cheville avec une matrone, qui porte au doigt la bague de la mère
morte – tout un signe. Cette nouvelle chanson demande : que
va-t-on faire du revenant ? C'est souvent
malheureusement ainsi que
se pose la question du retour du soldat et pire encore, du déserteur.
Moment crucial que l'entrée dans la maison. Il va se jouer là
un drame terrible entre 4 personnages : Mattias-Matysek, notre
Arlequin de retour ; Lukas, son frère cadet ; Rosalie la
matrone, la fiancée de Lukas et Barbora, sa fille. En fait, il y en
a même un cinquième : Arlecchina, qui ne s'adresse qu'à
l'Arlecchino. C'est un drame, car Matthias découvre très vite qu'il
n'est pas le bienvenu, qu'on le suspecte de vouloir reprendre la
ferme, qu'il est ou sera dénoncé par son frère et qu'il ne lui
reste qu'à reprendre son errance – après l'hiver, lui
concède-t-on, on attendra bien jusque là. Comme il est dit :
Rosalie veut sa maison… la bague de la mère morte en témoigne. On
retrouve ici l'effrayant instinct maladif de propriété, ce goût
avide de la richesse, même médiocre, même minuscule.
Oh,
Marco Valdo M.I. mon ami, des histoires atroces circulent depuis
longtemps qui racontent ces sordides manœuvres engendrées par la
possession de la possession. C'est une des sources de la Guerre
de Cent Mille Ans que les riches, les possédants et les aspirants à la richesse
(aussi médiocre, aussi petite soit-elle) – mènent contre les
pauvres pour maintenir leur pouvoir, assurer leur propriété et
leurs
privilèges, étendre leurs possessions. Alors, il nous faut plus
encore reprendre notre tâche et tisser le linceul de ce vieux monde
propriétaire, possesseur, avide et cacochyme.
Heureusement !
Ainsi
Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
Hop,
hissez le rideau !
Cette
cour, c'est mon berceau
Dit
Matthias tout joyeux
Rentrant
au logis de ses aïeux.
Qui
donc es-tu toi ?
Je suis la fille, on me nomme Barbora.
Je suis la fille, on me nomme Barbora.
Que
fais-tu là, Barbora ?
J'égerme
les pommes de terre, comme tu vois.
Oui,
Monsieur Po, oui, Monsieur Li,
Oui, Monsieur Chi,
Oui, Monsieur Nelle,
Oui, Monsieur Polichinelle.
Oui, Monsieur Chi,
Oui, Monsieur Nelle,
Oui, Monsieur Polichinelle.
Matysek
entre dans la maison.
Qui
est celle-là ? La mère du laideron.
Jeune,
elle avait taille fine et pied léger
Elle
avait épousé le savetier, à présent décédé.
Resterait-il
la nuit, allait-on le loger ?
Nous
sommes frères, Matysek, dit Lukas.
Coucher
ici ou filer après le repas ?
Rien
ne presse, il n'est pas temps de s'en aller.
Oui,
Monsieur Po, oui, Monsieur Li,
Oui, Monsieur Chi,
Oui, Monsieur Nelle,
Oui, Monsieur Polichinelle.
Oui, Monsieur Chi,
Oui, Monsieur Nelle,
Oui, Monsieur Polichinelle.
Au
matin, le coq s'égosille
Les
mouches bourdonnent, le pigeon s'envole.
Eh,
pollo, tu t'enracines, tu es toujours là.
Allez
vous rhabiller, madreperla.
Arlecchino,
où est ta raison ?
Je
ne bouge plus d'ici, Arlecchina.
Mais, pollo, Rosalie, la fiancée de Lukas
Mais, pollo, Rosalie, la fiancée de Lukas
Veut
obstinément sa maison.
Oui,
Monsieur Po, oui, Monsieur Li,
Oui, Monsieur Chi,
Oui, Monsieur Nelle,
Oui, Monsieur Polichinelle.
Oui, Monsieur Chi,
Oui, Monsieur Nelle,
Oui, Monsieur Polichinelle.
Matysek,
j'ai parlé au curé.
Matthias,
j'ai tout dit au bailli.
Matthias,
il faut t'en aller.
Ou
bientôt, tu seras repris.
Nous
sommes frères, dit Lukas, écoute-moi bien.
On
me l'a dit, Matysek, en confidence.
Après
l'hiver, le printemps vient
Et
pour le déserteur, la patrouille portant potence.
Oui,
Monsieur Po, oui, Monsieur Li,
Oui, Monsieur Chi,
Oui, Monsieur Nelle,
Oui, Monsieur Polichinelle.
Oui, Monsieur Chi,
Oui, Monsieur Nelle,
Oui, Monsieur Polichinelle.
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