lundi 26 janvier 2015

L'ARMÉE MUETTE


L'ARMÉE MUETTE




Version française – L'ARMÉE MUETTE – Marco Valdo M.I. – 2015
Chanson italienne – Esercito silente – Carmen Consoli2015

de "L'abitudine di tornare" (2015)




Funérailles de Giovanni Falcone




Palerme : guerres et faidas de mafia, l'état absent qui paraît seulement aux enterrements, la loi du silence, la lutte de Peppino Impastato, le massacre de la construction de l'aéroport de Punta Raisi, aujourd'hui dédié à Falcone et Borsellino.


Ô, Marco Valdo M.I. mon ami, toi qui m'avais conté l'histoire de Salvatore Carnevale, dit Turi, celle de Rita Atria [[37309]] et celle de Peppino Impastato [[6391]] et ses Cent pas [[4266]] et de plein d'autres encore, comme ce Néron échappé de la paléohistoire [[7890]]… te voilà revenu une fois encore en Sicile et une fois encore, tu racontes cette même histoire de cette île rongée par cette gangrène mafieuse…


Et finalement pire que tu l'imagines, car cette île transmet sa peste aux autres parties du monde. Bien sûr, la canzone de Carmen Consoli parle de l'île et de ces bandes de demeurés morticoles, qui entretiennent un rapport lointain avec la civilité et l'urbanité, mais elle parle surtout de Palerme, cette ville elle aussi malade de la peste, cette ville où se concentre le mal. Quand je dis elle, je dis la chanson, mais aussi la chanteuse. Une fille de cet étrange pays, une femme de talent et de courage. De ce courage qu'ont eu tous ceux qui s'en sont pris à la pieuvre et à ses tentacules. Ce courage aussi de dire ses vérités à la face d'une ville taiseuse, silencieuse face aux exactions, face aux tueurs, face aux menaces, face aux chantages, face aux maîtres-chanteurs, face aux petites frappes et aux grandes gueules, face à cette armée muette qui se terre et vit de complicité avec l’innommable. Une armée lâche, ralliée à la sournoiserie et aux mesquineries de l'avidité. En fait, vois-tu Lucien l'âne mon ami, si l'on replace cette histoire de mafia dans le cadre de la Guerre de Cent Mille Ans que les riches font aux pauvres pour maintenir leur domination, pour étendre leur pouvoir, pour accroître leurs richesses, pour exploiter encore et toujours plus les êtres humains et tout ce qui les entoure, donc si on les remet à leur place, on comprend très bien qu'ils ne sont finalement qu'une sorte de milice à la solde des riches et rien d'autre. Certes, je te l'accorde, ils en tirent eux-mêmes profit, comme le font tous ceux qui se nourrissent au détriment des autres. En fait, ce sont des parasites…


Et encore, c'est gentil. Car si on les compare aux termites, on constate que les termites mangent le bois mort et ont ainsi un rôle extrêmement positif, tandis que ceux-là vivent de la substance vivante. Alors, face à ces morticulteurs, tissons le linceul de ce vieux monde compromis, comploteur, gangrené, parasité et cacochyme.


Heureusement !


Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane



Comment peut-on croire que cette ville
Baignée par le soleil et la mer pourra oublier
Ses anciennes rancunes et ses blessures ouvertes
Ses faidas historiques, le chagrin des mères qui jamais plus n'embrasseront leur enfant
L'État très désolé qui dépose une couronne tricolore marquée « absent
Mais derrière les persiennes, les vieux et les enfants observent

Le cortège long et ému, Général, c'était là votre armée.

Dieu sait si le bon Dieu connaît cet enfer
S'il y a un plan pour le racheter
Paix et espérance non !, elles ne vivent pas de ce côté
C'est un immense désert
Dieu sait si le bon Dieu pardonnera le silence

Comment peut-on croire que cette ville
Baignée par le soleil et la mer saura oublier
Les offenses gratuites, les agonies souffertes
Les luttes historiques de celui qui défia le milieu à coups de musique et de poésie
Les regards stupéfaits des gens qui n'ont jamais rien vu, ni rien entendu
Les avions volent et les sillages comme des trames s'enlacent
Cet aéroport : un massacre qui maintenant porte un nom respectable.

Dieu sait si le bon Dieu connaît cet enfer,
S'il a un plan pour le racheter.
Paix et espérance non !, elles ne vivent pas de ce côté
C'est un immense désert
Dieu sait si le bon Dieu pardonnera le silence
Dieu sait si le bon Dieu pardonnera le silence
Dieu sait si le bon Dieu pardonnera Palerme
Chuuuttt !


dimanche 25 janvier 2015

L'ASPIRANT CANCIONE À BICYCLETTE

L'ASPIRANT CANCIONE À

BICYCLETTE

Version française – L'ASPIRANT CANCIONE À BICYCLETTE – Marco Valdo M.I. – 2011




J'ai volé la bicyclette du lieutenant
Qui m'attendra longtemps.





Une extraordinaire chanson, que celle-ci où l'aspirant Cancione a volé la bicyclette du lieutenant et est parti en avant... Un exploit digne de notre ami le Soldat Chveik [[8859]], dont tu as chanté les mérites.


En effet, l'aspirant Cancione est comme un frère du brave soldat Chveik... et c'est tout à sa gloire. Et figure-toi, Lucien l'âne mon ami, que j'avais égaré cette traduction dans un coin perdu de l'immense mémoire de cet ordinateur… Je viens seulement de la retrouver des années plus tard. Un peu par hasard, il faut bien le dire. Voici donc l'histoire de ce joyeux cycliste… Un frère aussi de ce Hoopdriver de Wells, homme serein s'il en fût jamais, qui se lança dans une (depuis!) célèbre épopée aussi burlesque que cycliste ou de Benchley, qui s'en fut lui conquérir le Pôle Nord à bicyclette.


En vélo et à sa manière, lui aussi, comme nous, tisse le linceul de ce vieux monde où les guerres se suivent et les morts se ressemblent, monde infernal et cacochyme.


Heureusement !



Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane.

Et vraiment Marco Valdo M.I. mon ami, tu es comme moi une vraie tête en l'air. Comment as-tu pu oublier de rapprocher cette canzone de la Chanson du Militaire à Bicyclette, de notre ami Ahmed Il Lavavetri. ….

Je me le demande encore…, dit Marco Valdo M.I. tout penaud.


Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane.



L'aspirant Cancione à bicyclette,
À la fin de la guerre, l'âme guillerette,
Rentre au pays par les voies détournées
Et l'accompagnent ces pensées :

Je suis fatigué de la guerre
Comme beaucoup sur cette terre
Tous à la maison, immédiatement
Et basta, on retourne.
Comme il est écrit justement.

J'ai volé la bicyclette du lieutenant
Qui m'attendra longtemps.
Je ne connais qu'une seule direction
En passant par Roma
Je veux rejoindre Pianura
Je vais au Sud, c'est ma destination

Cette guerre, c'est fini
Et nous, nous resterons ici
Nous sommes de plus en plus convaincus
Qu'il n'y a pas eu
De vainqueurs... Seulement des vaincus.

J'ai envie d'oublier tout ça
De recommencer, de rentrer chez moi,
De regarder le soleil couchant
De faire des enfants
De vivre sereinement.

Les bombes font du bruit
Elles couvrent les cris et les chants
Des oiseaux et des enfants
Et laissent en silence, alors,
Un silence de mort.

Mais si dans ce silence
D'abord, une personne, puis dix, puis mille
Hommes et femmes tous ensemble
Claquent des doigts
Le rythme de la paix surgira.
L'aspirant Cancione à bicyclette
À la fin de la guerre l'âme guillerette
Rentre au pays par les voies détournées
Et l'accompagnent ces pensées :


jeudi 22 janvier 2015

Ne Vous Mariez pas les Filles

Ne Vous Mariez pas les Filles

Chanson française – Ne Vous Mariez Pas Les Filles – Boris Vian – 1958

Paroles: Boris Vian
Musique: Alain Goraguer



Avez-vous vu un homme à poil...





Alors, Marco Valdo M.I. mon ami, te voilà à nouveau avec une chanson de Boris Vian…


Oui, bien sûr, une chanson de Boris Vian. Il y a beaucoup de chansons de Boris Vian, mais celle-ci m'est revenue en mémoire en traduisant la canzone de Carmen Consoli
« La signora del quinto piano » [[48851]], qui raconte un féminicide… Un de plus, car comme on peut le constater le féminicide est un sport fort développé. Il se pratique individuellement, en groupe, en famille ou même, de façon quasi-rituelle dans certains coins du monde.


C'est, en effet, une pratique courante chez les humains, dit Lucien l'âne en raclant le sol d'un sabot aussi noir que rageur, ou l'inverse.


Dans le cas de la chanson de Carmen Consoli, on peut même préciser qu'il s'agit d'un uxoricide, si je ne m'égare pas dans mes souvenirs langagiers.


De fait, vérification faite, « uxoricide » est le terme exact et depuis longtemps, selon moi, au moins déjà du temps de François Ier. Je parle évidemment du grand roi de France ; je te rappelle qu'il mesurait 1,99 m et qu'on le désignait par toute une série de sobriquets tels que : le Père et Restaurateur des Lettres, le Roi Chevalier, le Roi Guerrier, le Grand Colas, le Bonhomme Colas ou encore François au Grand Nez.


Pour en revenir à mon propos, à la chanson, à Boris Vian,à Carmen Consoli, à la dame du cinquième étage, assassinée comme il est dit par son mari, lors même que la police s'en tamponnait le coquillard, se voulait rassurante, elle m'était revenue cette chanson de Vian où le grand Boris conseillait aux demoiselles, aux filles et à tout ce qui porte jupon, de ne pas se marier. Je me suis dit qu'il avait raison ; du moins, éviterait-on les uxoricides. Évidemment, comme toujours avec Vian, il convient de garder en tête le plaisir d'humour. Même si, ces derniers temps, certains individus ont largement démontré leur incapacité à penser le monde et la vie . L'acide comique décape les croyances, c'est là, un de ses graves défauts.


Alors, déversons des tonnes d'acide comique, d'acide ironique, d'acide rigolique sur la terre et ses habitants, ça les rafraîchira et les débarrassera de bien des miasmes prophétiques. Et puis, reprenons notre tâche et tissons avec le sourire le suaire de ce vieux monde uxoricide, homicide, assassin, meurtrier, massacreur et cacochyme.



Heureusement !


Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane


Avez-vous vu un homme à poil
Sortir soudain de la salle de bains
Dégoulinant par tous les poils
Et la moustache pleine de chagrin?
Avez-vous vu un homme bien laid
En train de manger des spaghetti
Fourchette au poing, l'air abruti
La sauce tomate sur son gilet
Quand ils sont beaux, ils sont idiots
Quand ils sont vieux, ils sont affreux
Quand ils sont grands, ils sont feignants
Quand ils sont petits, ils sont méchants
Avez-vous vu un homme trop gros
Extraire ses jambes de son dodo
Se masser le ventre et se gratter les tifs
En regardant ses pieds l'air pensif?

Ne vous mariez pas, les filles, ne vous mariez pas
Faites plutôt du cinéma
Restez pucelle chez vot
re papa
Devenez serveuse chez un bougnat
Élevez des singes, élevez des chats
Levez la patte à l'Opéra
Vendez des bo
îtes de chocolat
Prenez le voile ou le prenez pas
Dansez à poil pour les gagas
Soyez radeuse avenue du Bois
Mais ne vous mariez pas, les filles
Ne vous mariez pas

Avez-vous vu un homme gêné
Rentrer trop tard pour le dîner
Du rouge à lèvres sur son col
Du flageolant
dans la guibole
Avez-vous vu au cabaret
Un monsieur qui n'est plus très frais
Se frotter avec insistance
Sur une petite fleur d'innocence
Quand ils sont bêtes, ils vous embêtent
Quand ils sont forts, ils font du sport
Quand ils sont riches,
ils garent l'artiche
Quand ils sont durs, ils vous torturent
Avez-vous vu à votre bras
Un maigrichon aux yeux de rat
Friser ses trois poils de moustache
Et se redresser, l'air bravache.

Ne vous mariez pas, les filles, ne vous mariez pas
Mettez vos robes de gala
Allez danser à l'Olympia
Changez d'amant quatre fois par mois
Prenez la braise et gardez-la
Cachez la fraîche sous vos matelas
À cinquante ans, ça servira

À vous payer des beaux petits gars
Rien dans la tête, tout dans les bras
Ah, la belle vie que ça sera
Si vous ne vous mariez pas, les filles
Si vous ne vous mariez pas

LA DAME DU CINQUIÈME ÉTAGE


LA DAME DU CINQUIÈME ÉTAGE


Version française – LA DAME DU CINQUIÈME ÉTAGE – Marco Valdo M.I. – 2015
Chanson italienne – La signora del quinto pianoCarmen Consoli2015
de "L'abitudine di tornare" (2015)






Dans tes chansons de dénonciation, de « La dame du cinquième étage » qui décrit un féminicide à « La nuit la plus longue » sur les barques d'immigrés, tu utilises un ton de féroce sarcasme, accompagné cependant d'une musique presque douceâtre : est-ce un choix stylistique ?

« Non, il provient de notre culture sicilienne. Le bon Pirandello a introduit le concept d'humour qui est le sentiment du contraire : devant l
a voiture des quatre saisons et derrière la tragédie. C'est un peu dans le style sicilien de décrire aussi les tragédies de manière sarcastique, humoristique. Il suffirait de voir Emma Dante qui est vraiment la représentation de l’esprit sicilien. Je pense qu'en cela, je suis vraiment fille de ma terre ».

Interview de Carmen Consoli



La dame du cinquième étage a un pic dans son salon, un gardien sûr
Son ex est chaque soir devant la porte avec un marteau en main
Il n'y a aucune raison d'avoir peur, d'avoir peur
Voilà la conclusion des fonctionnaires de la questure

La dame du cinquième étage profite du chaos urbain
Elle sort toujours au matin et d'un pas rapide, elle va à son travail

Mademoiselle, auriez-vous vu mon mari ?
De quelle couleur était son vêtement ?
Combien de lettres avait-il en poche ?
Une, deux, trois, ou…

La dame du cinquième plan avait un python antiviol dressé
Un beau jour l'animal a fui de son nid blindé et arriva au rez-de-chaussée
Il n'eut pas le temps de claquer des dents de peur
Le beagle chihuahua hypertendu peu amical de la concierge
Trois semaines plus tard, captura le reptile en fuite
Cela mit au jour la disparition mystérieuse de sa maîtresse

Mademoiselle, n'auriez-vous pas vu un homme avec un marteau ?
De quelle couleur était son vêtement ?
Combien de lettres avait-il en poche ?

Mademoiselle, n'auriez-vous pas vu un homme avec un marteau ?
De quelle couleur était son vêtement ?
Combien de temps a-t-il été dans le coin ?
Vous a-t-il adressé la parole ?

La dame du cinquième étage fut retrouvée dans sa baignoire
La lettre d'un an auparavant – preuve accablante laissée déposée à la questure –
Décrivait avec précision le rituel de sépulture
Mais il n'y avait aucune raison d'avoir peur, d'avoir peur

Mademoiselle, n'avez-vous pas vu un homme avec un marteau ?
De quelle couleur était son vêtement ?
Combien de lettres avait-il en poche ?

Mademoiselle, n'auriez-vous pas vu un homme avec un marteau ?
De quelle couleur était son vêtement ?
Combien de lettres avait-il en poche ?

L'homme au marteau a été aperçu dans un bar du centre de Buenos Aires
Le python quelques mois après sa capture est retourné dans son habitat naturel en Thaïlande.
Le concierge a décidé d'adopter Tino le mâtin, un chien amical et affectueux
Au cinquième étage, vit Mathilde, une femme acariâtre, allergique aux chats et aux parents
Ah, j'oubliais, les fonctionnaires de la questure continuent à dire qu'il n'y a
Aucune raison d'avoir peur, d'avoir peur, d'avoir peur…