MA BELLE CIAO
Version française – MA BELLE CIAO – Marco Valdo M.I. – 2021
Chanson italienne – Mia bella ciao – Giulio Wilson – 2021
Jacob Jordaens – 1636 – 1638
Dialogue maïeutique
Les trois quarts du temps, Lucien l’âne mon ami, au moment où je termine une version en langue française d’une chanson, je me demande quel pourrait bien être le commentaire qu’on pourrait en faire et franchement, il s’agit là d’une vraie question.
Je l’imagine volontiers, répond Lucien l’âne, car moi-même, je me le demande aussi. D’autant qu’on n’a aucun goût pour le didactisme.
Certes, reprend Marco Valdo M.I. ; toutefois, lorsqu’une telle note existe, je m’empresse de la traduire ou parfois de la résumer. Cependant, ici, il n’y en a pas. Alors, il nous faut spéculer. Première chose, il y a évidemment ce « Bella Ciao », qui renvoie plus que certainement à « Bella Ciao », célébrissime chanson de résistance, dont l’histoire est ici bien documentée et où je renvoie les curieux. Pour nettement distinguer cette bella ciao-ci de celle-là, je lui ai donné un titre plus français : Ma Belle Ciao. Pour le reste, je laisse l’imagination de la chanson faire son chemin. Elle a certainement beaucoup à dire à qui voudra y réfléchir.
Verlaine par exemple disait de la chanson :
« C’est
des beaux yeux derrière des voiles,
C’est le grand jour
tremblant de midi,
C’est, par un ciel d’automne attiédi,
Le
bleu fouillis des claires étoiles ! »
et mille autres choses à propos de la chanson bien douce :
« Et
dans les longs plis de son voile
Qui palpite aux brises
d’automne
Cache et montre au cœur qui s’étonne
La
vérité comme une étoile. »
Ou
peut-être, la chanson dit autre chose, allez savoir, il suffit de
méditer.
Oh, dit Lucien l’âne, c’est la meilleure manière avec les chansons ; les méditer ; un peu, beaucoup, c’est selon. Dans le fond, pour nombre d’entre elles, c’est ce qu’elles ont comme but. Quant à nous, tissons le linceul de ce vieux monde ignare, atteint d’une étrange folie, d’ennui et de guerre, full of song and fury and signifying nothing et, at last, cacochyme.
Heureusement !
Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
À nous, nous qu’on nomme les géants,
Si proches encore, mais distants.
De là-haut, on ne comprend pas que le bon sens
N’a pas de sens pour l’envie des gens ;
Les livres sont de futiles occupations
Et les chansons tralalalaire,
Ces tubes à chanter au bord de la mer,
Emblèmes culturels de notre civilisation.
À nous, nous qu’on nomme les géants,
Trois pas en arrière, un pas en avant
Et nous nous pensons grands,
Et nous nous fions aux puissants,
Et nous ne sommes jamais contents.
Et nous mangeons du tofu végétalien
Et la matriciana avec du speck italien,
Mais au supermarquette,
Ne regardez pas les étiquettes
Ne vous souciez de rien,
Occupez-vous seulement de vos biens.
Un
matin,
Je me suis réveillé,
Ma « Belle Ciao »,
Ce monde était fou.
Un matin,
Je me suis retrouvé,
Ma « Belle Ciao »,
Avec mes rêves pendus au clou,
En noir et blanc, une vieille photo.
À nous, nous qu’on nomme les géants,
Nous sommes des occupants, tant et tant,
Esclaves de la modernité,
Des erreurs du passé
Sur les vivants innocents
Et entre les bombes ou l’au-delà
Ou dans l’esprit de qui sait quoi,
Nous sommes les esclaves du progrès
Des partis, de leurs congrès.
Ainsi tout vient et tout va,
Qui sait vraiment pourquoi ?
Où est-ce qu’on va ? Je ne le sais pas.
Un matin,
Je me suis réveillé,
Ma « Belle Ciao »,
Ce monde était fou.
Un matin,
Je me suis retrouvé,
Ma « Belle Ciao »,
Avec mes rêves pendus au clou,
En noir et blanc, une vieille photo.
J’ai
en poche ma liberté
Mais demain, que vaudra la liberté ?
Qui sait… qui sait…
Un matin,
Je me suis réveillé,
Ma « Belle Ciao »,
Ce monde était fou.
Un matin,
Je me suis retrouvé,
Ma « Belle Ciao »,
Avec mes rêves pendus au clou
En noir et blanc, une vieille photo.
À nous !, les géants, à nous…
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