L’infinie
Terreur
Chanson
française – L’infinie Terreur – Marco Valdo M.I. – 2020
ARLEQUIN
AMOUREUX – 54
Opéra-récit
historique en multiples épisodes, tiré du roman de Jiří Šotola
« Kuře na Rožni » publié en langue allemande, sous le
titre « VAGANTEN, PUPPEN UND SOLDATEN » – Verlag C.J.
Bucher, Lucerne-Frankfurt – en 1972 et particulièrement de
l’édition française de « LES JAMBES C’EST FAIT POUR
CAVALER », traduction de Marcel Aymonin, publiée chez
Flammarion à Paris en 1979.
Un
à un, les petits comédiens expirent.
À
part le palatin, pas de militaire
Dans
cette compagnie burlesque.
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Dialogue
Maïeutique
Vois-tu,
Lucien l’âne mon ami, « La dernière Scène » se
terminait sur la vision atroce du massacre des petits comédiens
orphelins de leur directeur-déserteur par une bande de soldats ivres
qui avaient surgi dans l’auberge en pleine nuit. Ce fut un
pandémonium. Les marionnettes, le comte palatin Siegfried en tête,
avaient crânement tenté la voie de la résistance, mais la lutte
entre les pantins et les militaires de l’armée impériale était
par trop inégale.
Oui,
dit Lucien l’âne, je me souviens très bien de tout ça et du
comportement ignoble des soldats ; mais pourquoi me racontes-tu
ça ?
Eh
bien, répond Marco Valdo M.I., tout simplement, car malgré ce que
ce titre « La dernière Scène » laissait penser, le
combat continue. Avant de passer à la suite, je récapitule :
Siegfried, le comte palatin, était mort en preux ; Geneviève,
la comtesse par ailleurs duchesse de Brabant mourait en martyre,
odieusement et multiplement violée par les brutes avant d’être
étranglée par l’adjudant ; la belle Hélène, habituellement
généreuse de ses charmes érotiques, s’était défendue avec la
dernière énergie comme Jeanne la Pucelle ; Méphistophélès
avait rameuté les puissances infernales avant de succomber ;
Basile, alias Don Basilio, avait tenté – sans succès – de
négocier ; Labyrinthe, quasi-centenaire, avant de se suicider,
avait abattu l’adjudant, vengeant ainsi la comtesse. On en était
là et de fait, on pouvait penser l’affaire terminée.
Soit,
s’étonne Lucien l’âne, mais serait-ce que tu voudrais me faire
comprendre que ce n’est pas le cas ?
Très
exactement, répond Marco Valdo M.I., ce n’est pas le cas ; le
combat continue. C’est ce que raconte la nouvelle chanson. Au
passage, j’en profite pour préciser que c’est là le
cinquante-quatrième épisode de cette saga, qui donc actuellement
comporte un total de 1296 vers, sans compter la ritournelle de
Monsieur Polichinelle qui apporte elle 648 vers, soit au total 1944
vers.
Oh,
dit Lucien l’âne en riant, c’est beaucoup moins que la Chanson
de Roland, par exemple.
Bref,
reprend Marco Valdo M.I., on pensait l’affaire close, mais c’était
une erreur. Il restait des comédiens qui n’étaient pas encore
venus sur scène pour cette ultime représentation. À l’imitation
de Molière, ils avaient bien l’intention de finir leur vie sur les
planches.
On
ne se refait pas, dit Lucien l’âne.
Surtout
à la fin, insiste Marco Valdo M.I. ; ainsi, ceux qui n’avaient
pas encore pu se faire voir sont sortis de l’ombre. Pierrot, bien
que manchot, par sa seule présence inquiète les agresseurs à
l’idée que Bernadotte, le maréchal français dont ces pillards
dépendent, impose la peine capitale à ceux qui s’en prennent aux
civils.
C’était
un bon début assurément, remarque Lucien l’âne.
De
toute évidence, dit Marco Valdo M.I., mais aujourd’hui encore, il
y a beaucoup à faire en la matière sans même insister sur le fait
que ce n’est qu’une mesure cosmétique, en quelque sorte. Mais
revenons à nos marionnettes en résistance. Pierrot n’est pas le
seul acteur encore présent, car entre en scène alors, un autre
témoin : l’intellectuel, le philosophe, le savant de la
petite troupe, j’ai nommé le Docteur Johanès Faust, qui, en
raison de l’impérieuse nécessité, transcendant sa nature, se rue
au combat et de ses pieds et de ses poings, il frappe les troufions,
qui rient aux éclats, tant il les chatouille. Puis, ces turlutins
géants le trucident et en même temps que Pierrot, le tranchent en
morceaux. Ce que voyant, David, de sa fronde biblique et de ses cinq
cailloux, liquide cinq de ces truands. Puis, désarmé, il doit se
rendre et contre toutes les lois de la guerre, ces briscards le
torturent et il meurt dans cette horreur, les yeux noyés d’une
infinie terreur. Point final.
Quelle
histoire !, dit Lucien l’âne. Quelle héroïque résistance !
Décidément, ces petits hommes de bois me plaisent de plus en plus.
Ils auront toujours une place dans ma mémoire, une scène réservée
où ils pourront jouer tous les spectacles qui leur passeront par la
tête et là au moins, il y aura un spectateur. Quoi qu’il en soit,
tissons le linceul de ce vieux monde libidineux, mortuaire, funèbre,
statistique et cacochyme.
Heureusement !
Ainsi
Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
Par
manque d’expérience de la soldatesque,
Un
à un, les petits comédiens expirent.
À
part le palatin, pas de militaire
Dans
cette compagnie burlesque.
Les
cadavres restent bizarrement étendus,
La
faux de la mort tue à tours de bras
Et
les faux morts ne se relèvent pas.
Pierrot
le manchot éperdu a tout vu.
Oui,
Monsieur
Po,
oui, Monsieur
Li,
Oui, Monsieur Chi,
Oui, Monsieur Nelle,
Oui, Monsieur Polichinelle.
Oui, Monsieur Chi,
Oui, Monsieur Nelle,
Oui, Monsieur Polichinelle.
Faust
et Pierrot sont d’encombrants témoins,
Car
le Docteur aussi a tout vu de sous la table.
Pour
les tueurs, le poteau et le sable.
La
peine capitale, pas moins !
Maintenant,
c’est l’heure des courages,
Pierrot
crie, Faust frappe avec rage.
Les
soudards
s’amusent de leurs
colères,
Les
détranchent et laissent les morceaux à terre.
Oui,
Monsieur
Po,
oui, Monsieur
Li,
Oui, Monsieur Chi,
Oui, Monsieur Nelle,
Oui, Monsieur Polichinelle.
Oui, Monsieur Chi,
Oui, Monsieur Nelle,
Oui, Monsieur Polichinelle.
David,
embusqué dans la cour,
Fait
face à son tour.
Avec
sa fronde et cinq pierres,
Il
étend cinq mercenaires.
Sans
plus de munitions, sans armes, prisonnier
David
est longuement torturé.
Le
regard fixe, il meurt dans l’horreur,
Les
yeux noyés d’une infinie terreur.
Oui,
Monsieur
Po,
oui, Monsieur
Li,
Oui, Monsieur Chi,
Oui, Monsieur Nelle,
Oui, Monsieur Polichinelle.
Oui, Monsieur Chi,
Oui, Monsieur Nelle,
Oui, Monsieur Polichinelle.
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