Le
Jardin des Vanilliers
Chanson
française – Le Jardin des Vanilliers – Marco Valdo M.I. – 2020
ARLEQUIN
AMOUREUX – 35
Opéra-récit
historique en multiples épisodes, tiré du roman de Jiří Šotola
« Kuře na Rožni » publié en langue allemande, sous le
titre « VAGANTEN, PUPPEN UND SOLDATEN » – Verlag C.J.
Bucher, Lucerne-Frankfurt – en 1972 et particulièrement de
l’édition française de « LES JAMBES C’EST FAIT POUR
CAVALER », traduction de Marcel Aymonin, publiée chez
Flammarion à Paris en 1979.
La Rivière Juchitán
Diego Rivera (1955)
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Dialogue
Maïeutique
Et,
dit Marco Valdo M.I., tel un conteur reprenant son récit à
l’endroit où il l’avait abandonné précédemment, l’aventureuse
déambulation de Matthias le déserteur se poursuit sans lui laisser
beaucoup de répit, ni pour lui, ni pour sa petite troupe en bois. Ce
n’est pas qu’il n’essaye pas de trouver des parades, de se
dissoudre dans le paysage, de disparaître aux yeux du monde, mais le
sort de l’Arlequin amoureux est une destinée de déserteur
malchanceux. Il avait pourtant – c’est précisément ce que
raconte la chanson – cru trouver une solution définitive en se
faisant passer pour mort, en faisant enregistrer son décès aux
registres d’état-civil et en récupérant au passage l’identité
du mort qu’on enterrait, un certain Ondrěj Serenus.
Oh,
interrompt Lucien l’âne, voilà un joli patronyme et tout à fait
approprié à son but, car en français, on dirait André Serein.
En
effet, reprend Marco Valdo M.I. et au passage, Mathieu avait hérité
du passeport en bonne et due forme et du statut très rassurant de
vétéran, d’ancien soldat démobilisé. Malheureusement, sa
supercherie est rapidement éventée et son identité de remplacement
ne lui assure plus la même sécurité. Il en est revenu à sa vie de
proscrit dormant ici et là et toujours forcé de déguerpir et de se
déplacer.
Décidément,
dit Lucien l’âne, la vie de déserteur ne vaut pas mieux que celle
d’un âne indépendant : on est libre de ses mouvements, mais
à condition de ne jamais s’arrêter longtemps. À la longue, c’est
épuisant. Cependant, ce qui m’intrigue une fois encore, c’est le
titre de la chanson. Je n’ai jamais vu, ni entendu dire qu’il y
eût des vanilliers en Bohême.
Certes,
Lucien l’âne mon ami, tu as raison de poser la question et bien
sûr, il n’y a pas de jardin de vanilliers dans les vallées, ni
les montagnes de Bohême ; il y fait bien trop froid ou pas
assez chaud, c’est comme on voudra. C’est justement pour ça
qu’ils en rêvent. Je veux parler des membres de la petite troupe
d’Arlequin- Matthias-Andrea, etc., lesquels sont fatigués,
exténués et même, assez désespérés de ces pluies incessantes
qui les glacent jusqu’aux os, même en bois. C’est d’ailleurs
pareil pour le directeur-déserteur qui les mène. Ce jardin des
vanilliers, c’est un rêve, celui d’un pays lointain ensoleillé
et chaud. Au fait, tu connais la chanson de Erich Kästner, parodiant
Goethe : qui s’intitule : « Kennst
du das Land wo die Kanonen blühen ? » et donc, tu
apprécieras ma question – en espérant que je n’ai pas fait
d’erreur en allemand : « Kennst du das Land wo die
Vanillebaüme blühen ? » (Connais-tu le pays où
fleurissent les vanilliers ? »). Sais-tu le pays d’où
provient le vanillier, maintenant exporté ailleurs dans le monde ?
J’imagine que comme moi, tu ne le sais pas trop.
Oh,
Marco Valdo M.I. mon ami, je ne le sais même pas du tout. Serait-ce
d’Inde, de Polynésie ou d’Afrique ?
Eh
bien, non, tu as tout faux, Lucien l’âne mon ami. Comme je te l’ai
avoué, je ne savais pas non plus que le vanillier était originaire
du Mexique. Ainsi, il est tout à fait approprié d’illustrer le
rêve de cette chanson par un tableau du peintre mexicain Diego
Rivera qui donne une idée assez idyllique d’un lieu chaud et somme
toute, édénique. Il aurait d’ailleurs pu s’appeler : « Au
Sud d’Éden ». En réalité, son titre exact est : « La
Rivière Juchitán » (1955).
Eh
bien, dit Lucien l’âne, même si j’apprécie tes commentaires et
tes indications, il nous faut conclure. Alors, tissons le linceul de
ce vieux monde chaud, glacial, humide, réfrigérant, brûlant,
étouffant et cacochyme.
Heureusement !
Ainsi
Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
Toujours
fuir, proscrit, toujours repartir,
Soit,
mais danser sous la pluie, c’est périr.
Un
pitre ne peut vivre sans faire rire.
Seul,
il se dessèche d’un ennui à mourir.
Pour
le soleil au bout du jour harassé,
Tout
est pareil au même : un carré
De
choux par des nonnes rougissantes engraissé
Vaut
un parterre de roses naissantes bigarré.
Oui,
Monsieur Po, oui, Monsieur Li,
Oui, Monsieur Chi,
Oui, Monsieur Nelle,
Oui, Monsieur Polichinelle.
Oui, Monsieur Chi,
Oui, Monsieur Nelle,
Oui, Monsieur Polichinelle.
Avec
le passeport et la virginité militaire
D’Ondřej
Serenus comme paravent,
Un
Matthias mort arrange les affaires
De
l’amoureux Arlequin
toujours vivant.
Andrea
Serena, Bohémien, Italien d’ascendance,
Aux
joues plantées de poils grenus,
Joue
son personnage comique d’apparence :
Petit,
grassouillet, trapu, tel un singe tordu.
Oui,
Monsieur Po, oui, Monsieur Li,
Oui, Monsieur Chi,
Oui, Monsieur Nelle,
Oui, Monsieur Polichinelle.
Oui, Monsieur Chi,
Oui, Monsieur Nelle,
Oui, Monsieur Polichinelle.
Andro
Sereno précédé de sa barbe grise,
Courtaud
et gonflé aux jointures,
Erre
de grange en pré, de pré en remise,
Libre
déserteur allant à l’aventure.
Cette
pluie à verse glace à l’été ;
Geneviève,
comtesse palatine de Trêves,
Et
toute la troupe en bois rêvent
D’un
éternel séjour au jardin des vanilliers.
Oui,
Monsieur Po, oui, Monsieur Li,
Oui, Monsieur Chi,
Oui, Monsieur Nelle,
Oui, Monsieur Polichinelle.
Oui, Monsieur Chi,
Oui, Monsieur Nelle,
Oui, Monsieur Polichinelle.
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