Le
Coq aveugle
Chanson
française – Le Coq aveugle – Marco Valdo M.I. – 2015
ARLEQUIN
AMOUREUX – 23
Opéra-récit
historique en multiples épisodes, tiré du roman de Jiří Šotola
« Kuře na Rožni » publié en langue allemande, sous le
titre « VAGANTEN, PUPPEN UND SOLDATEN » – Verlag C.J.
Bucher, Lucerne-Frankfurt – en 1972 et particulièrement de
l’édition française de « LES JAMBES C’EST FAIT POUR
CAVALER », traduction de Marcel Aymonin, publiée chez
Flammarion à Paris en 1979.
Le
Coq aveugle
Chanson
française – Le Coq aveugle – Marco Valdo M.I. – 2015
ARLEQUIN
AMOUREUX – 23
Opéra-récit
historique en multiples épisodes, tiré du roman de Jiří Šotola
« Kuře na Rožni » publié en langue allemande, sous le
titre « VAGANTEN, PUPPEN UND SOLDATEN » – Verlag C.J.
Bucher, Lucerne-Frankfurt – en 1972 et particulièrement de
l’édition française de « LES JAMBES C’EST FAIT POUR
CAVALER », traduction de Marcel Aymonin, publiée chez
Flammarion à Paris en 1979.
Dialogue
Maïeutique
« Alors,
le coq aveugle affirme son règne » devrait être, Lucien l’âne
mon ami, le titre de cette chanson.
Oui,
moi je veux bien, dit Lucien l’âne, mais qu’est-ce que ça peut
bien vouloir signifier ? Alors, un coq fait cocorico pour
impressionner les poules et toute la basse-cour et comme Chantecler,
le monde entier ? C’est là illusion de gallinacé à la
conscience de soi hypertrophiée, un fantasme d’emplumé.
Eh
bien, justement, Lucien l’âne mon ami, Même si ton raisonnement
est à première vue exact, il n’en est rien. Ce qui prouve une
fois encore qu’avec la chanson, l’évidence n’est pas
nécessairement l’expression de la réalité. Trêve de théorie,
voici ce qu’il en est. D’abord, il y a un premier paradoxe à
élucider, car comment un coq aveugle peut-il savoir que le jour se
lève, du fait que dans l’imaginaire des humains, le rôle du coq
est d’annoncer l’arrivée du jour, dès qu’il aperçoit –
censément avant tout le monde – la première lueur. La solution se
trouve dans le vers précédent, où l’on entend le meuglement de
la vache. La vérité donc, s’il y en a une, serait que le coq
réagit à l’appel de la vache et qu’il importe peut qu’il voie
quoi que ce soit.
Et
alors, dit Lucien l’âne, tout ça pour ça ? Ça me semble
assez banal. Franchement, il n’y a pas de quoi fouetter un chat.
Dans
un certain sens oui, dit Marco Valdo M.I., mais cette banalité
matinale des fermes de campagne cache en l’occurrence quelque chose
d’effrayant, un crime d’autant plus épouvantable qu’on le
dissimule dans cette banalité.
Et
quoi donc, demande Lucien l’âne ?
Pour
ça, reprend Marco Valdo M.I., il faut lire le troisième vers de ce
trio sonore, fait de deux bruits et d’un silence :
« À
l’étable, de bonne heure, meugle une vache,
Alors,
le coq aveugle affirme son règne,
Si
seule, en silence, Barbora saigne. »
À
la fulgurance de tes yeux noirs comme le diamant de la Reine des
Fées, on voit venir la question de Lucien l’âne qui serait :
« Mais pourquoi donc cette fille Barbora saigne ? Et
pourquoi son silence a une telle importance ? À tout le moins,
elle devrait pleurer, sangloter. »
C’est
que, répond Marco Valdo M.I., Barbora est terrorisée, outre que
d’être dans sa plus intime chair blessée et violée. Cette
chanson est l’histoire d’un viol et de fait, elle est contée
sans hauts cris, dans un silence à peine rompu par un coq
volontairement aveugle, qui aurait bien aimé faire l’impasse, mais
pas sourd au cri de la vache, elle aussi témoin du drame, il
cocoricote quand même. Meuh et cocorico sont les seules alarmes, les
seules traces évanescentes du crime. Car cette histoire atroce est
proprement indicible et cependant, la chanson, la dit abruptement et
sans fard :
« Le
nouveau marié déjà lassé de la mère,
De
la fille Barbora, le jupon relève
Et
s’enfonce comme un pieu en terre. »
Oh,
dit Lucien l’âne, voilà un drame familial comme j’en ai tant
croisé le récit depuis que je vais par le monde. Un récit toujours
chuchoté, susurré, à peine formulé, souvent noyé dans une opaque
complicité ou éteint pas la terreur.
Ainsi,
reprend Marco Valdo M.I., l’essentiel de cette chanson a été
dit ; sauf peut-être cette allusion au Premier Consul à vie
qui permet de replacer cet épisode dans l’histoire de l’Europe.
Par parenthèse, à propos du premier Consul, on peut aussi trouver
une allusion à lui dans ce coq aveugle qui affirme son règne.
« La
paix, la paix prend la pose.
Consul
à vie, Bonaparte s’est nommé »
Comme
quoi, si la paix s’impose sur les champs de bataille militaires, la
Guerre de Cent Mille Ans se poursuit jusque dans les endroits les
plus reculés qui sont eux, les champs de bataille civils. En fait,
les puissants s’en prennent sans cesse aux faibles et affirment
leur domination, quelles que soient l’étendue ou la nature de leur
dominium.
Je
sais tout cela, dit Lucien l’âne, je sais ce drame de la
domination et les ravages que fait ce penchant imbécile. J’en ai
toujours la nausée à la bouche et l’amertume au cœur. Alors,
tissons le linceul de ce vieux monde écœurant, nauséeux,
dominateur et cacochyme.
Heureusement !
Ainsi
Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
Donc,
Matěj
a fait la promesse
D’abandonner
son droit d’aînesse,
De
délaisser pour toujours son héritage,
De
se contenter de mener les vaches au bocage.
Sans
autre ambition, étaler le foin,
Fumer
la viande, distiller le grain,
Coucher
dans la resserre
Et
se désaltérer de pauvre bière.
Oui,
Monsieur Po, oui, Monsieur Li,
Oui, Monsieur Chi,
Oui, Monsieur Nelle,
Oui, Monsieur Polichinelle.
Oui, Monsieur Chi,
Oui, Monsieur Nelle,
Oui, Monsieur Polichinelle.
La
paix, la paix prend la pose.
Consul
à vie, Bonaparte s’est nommé,
Cette
pauvre paix au parfum de rose s’impose
Et
Matthias s’installe en ses foyers.
Rosalie
et Lukas se marient,
Les
commères fébriles cancanent
À
tire-larigot de la virginité neuve
Et
du dadais englué dans la veuve.
Oui,
Monsieur Po, oui, Monsieur Li,
Oui, Monsieur Chi,
Oui, Monsieur Nelle,
Oui, Monsieur Polichinelle.
Oui, Monsieur Chi,
Oui, Monsieur Nelle,
Oui, Monsieur Polichinelle.
Retour
du cabaret de sa nuit de noce
Le
nouveau marié déjà lassé de la mère,
De
la fille Barbora, le jupon relève
Et
s’enfonce comme un pieu en terre.
À
l’écart, le déserteur, dans une meule, se cache.
À
l’étable, de bonne heure, meugle une vache,
Alors,
le coq aveugle affirme son règne,
Si
seule, en silence, Barbora saigne.
Oui,
Monsieur Po, oui, Monsieur Li,
Oui, Monsieur Chi,
Oui, Monsieur Nelle,
Oui, Monsieur Polichinelle.
Oui, Monsieur Chi,
Oui, Monsieur Nelle,
Oui, Monsieur Polichinelle.
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