jeudi 17 janvier 2019

MOI, JE NE VEUX PAS MOURIR


MOI, JE NE VEUX PAS MOURIR


Version française – MOI, JE NE VEUX PAS MOURIR – Marco Valdo M. I. – 2019
Chanson italienne (italien et yiddish) – Mir viln nisht shtarbnAldo Giavitto – 1997


« Mir viln nisht shtarbn !
MOI, JE NE VEUX PAS MOURIR ! »


Dialogue Maïeutique

Mon bon Lucien l’âne, mon ami, voici une chanson dont ta mémoire, comme celle de tous ceux qui la connaîtront, comme la mienne à moi qui en ai fait cette version française, toutes ces mémoires ne sauront se libérer aisément. Bien qu’elle se réfère à un moment particulier, elle le doit, comme universelle. Les guerres ont toutes les mêmes effets pour ceux qu’elles tuent et pour les vivants qu’elles laissent. L’enfant dont la mère hurle de terreur alors qu’elle fuit en le tenant dans ses bras sera marqué à jamais par cette horreur – quelle que soit la guerre, quel que soit l’assaillant, quel que soit le siècle, l’année, l’heure ou le moment de ce trauma.

Je le pense aussi, Marco Valdo M.I. mon ami. J’ajouterai donc quelle que soit la langue dans laquelle il dira ou criera ou hurlera :

« Mir viln nisht shtarbn !
MOI, JE NE VEUX PAS MOURIR ! »

Ceci étant dit, Lucien l’âne mon ami, il se trouve – même si la mémoire rappelle les enfants du ghetto de Lodz – une grande ville de Pologne, qui furent emmenés au centre d’extermination de Chelmno et pour ceux – enfants et adultes – qui restaient à la mi-1944, à celui d’Auschwitz ; au total, ils furent près de 200 000 à être ainsi éliminés. Mais par sa force évocatrice, qui est comme un écho au tableau de Charles Szymkovicz – un peintre que j’aime et que je sais que tu aimes beaucoup – qui évoque lui aussi les enfants du ghetto, par le malheur qu’elle dénonce, elle pourrait relater mille autres fuites éperdues de mille autres lieux, de mille autres temps, conséquences de la permanence de la guerre et du désastre humain qu’elle constitue. L’héritage qui en découle est enfoui et gardé dans le creux du silence, dans cette zone d’ombre de l’être qu’est l’inconscient. La canzone est un tableau en trois séquences qu’il te faudra découvrir et qui mènent à la proclamation qui lui donne son titre :

« Mir viln nisht shtarbn !
MOI, JE NE VEUX PAS MOURIR ! »

Eh bien, moi non plus, dit Lucien l’âne. Comme tu le sais, je ne veux pas mourir et je m’y emploie depuis longtemps. Cependant, tissons le linceul de ce vieux monde médiocre, écrasant, barbare, assassin et cacochyme.

Heureusement !

Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane.



Moi, quand je suis né, les bombes sifflaient.
La lueur des feux de Bengale éclairait
L’obscurité de deux yeux que la terreur
Barrait dans la confusion
De la nuit avec le jour, de la sueur avec le pleur,
Le visage d’une femme qui me serre sur le cœur,
Courant sans but, pieds nus, sans direction…
Toi, quand tu es né, tu criais dans le silence
Comme les cent autres qui sont morts à ta place
En un instant, mais loin, au-delà d’une frontière
qui distingue
La vie du souffle, le rire du sourire,
Le visage d’une femme sur les lambeaux de son visage
Aussi tremblant qu’un ancien rêve…
Toi, quand tu naîtras, rare gage d’espérance
Dans le ventre d’une histoire qui bouleverse, mais nous enchante
La lumière de deux yeux ne simplifie pas la rupture, mais allège
Les songes trépidants, la pression des couchants,
Les souvenirs semés comme pollen du temps,
Mais l’héritage de chaque homme est son silence…
Mir viln nisht shtarbn…
MOI, JE NE VEUX PAS MOURIR
Mir viln nisht shtarbn !
MOI, JE NE VEUX PAS MOURIR !

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