mardi 13 mars 2018

NON, CE N'EST PAS FINI PLACE LORETO


NON, ÇA N’EST PAS FINI

PLACE

LORETO


Version française – NON, ÇA N’EST PAS FINI PLACE LORETO – Marco Valdo M.I. – 2018
Chanson italienne – Non è finita a Piazzale LoretoFausto Amodei – 1971

Texte et musique : Fausto Amodei



Pour ceux qui croient que le fascisme est mort avec Mussolini, oh oui,
Pour ceux qui croient que Berlusconi (Salvini et tutti quanti) n’est pas fasciste, mais si !



Dialogue maïeutique

Salut à toi, Lucien l’âne mon ami, toi qui viens de si loin dans le temps, de tellement loin que personne ne s’en souvient, que nul ici n’en saurait dire le début, même pas toi. Eh bien, Lucien l’âne mon ami, j’imagine que tu sais ce qu’est la place Loreto et ce à quoi elle renvoie dans la chanson et dans l’histoire de l’Italie contemporaine.

Évidemment, Marco Valdo M.I. mon ami, que je le sais parfaitement bien, mais j’aimerais entendre ton explication, car il s’agit là d’un symbole important. Disons quand même que c’est une place de Milan où l’on a pendu des gens au sortir de la guerre.

C’est d’elle en effet, Lucien l’âne mon ami, qu’il s’agit et on y pendit par les pieds les cadavres de Mussolini et de certains de ses amis. Cela tenait d’ailleurs plus de la cérémonie expiatoire que de la punition. On ne punit pas un cadavre pour la raison qu’il n’aurait même pas l’occasion de s’en rendre compte. Disons que l’affaire était une catharsis, une désinfection symbolique visant à l’élimination des miasmes du fascisme. Ce n’était en réalité qu’un juste retour des choses : le fascisme avait pendant vingt ans noyé l’Italie dans les symboles de sa puissance.

Je me disais aussi que pendre des cadavres devait avoir un sens symbolique, dit Lucien l’âne. Mais ensuite ?
Ensuite, reprend Marco Valdo M.I., il me semble que le remède n’a pas eu les effets escomptés ; peut-être son champ d’action se limitait-il à la place Loreto, car les miasmes ont continué à se répandre et même, à prospérer. Souviens-toi, Carlo Levi, dès après la guerre, après le sabordage du gouvernement issu de la Résistance en décembre 1945, signalait cette persistance ; et Piero Calamandrei, dès 1946, parlait de « desistenza » – qu’on traduira en français par« désistance » (Calamandrei la définissait ainsi : « questo generale abbassamento ... merita di avere anch’esso il suo nome clinico, come il necessario opposto dialettico della resistenza: "desistenza" » – Cet abaissement général… mérite d’avoir lui aussi son nom clinique, comme le nécessaire opposé dialectique de la résistance : « désistance ») ; plus tard encore (1972), cette chanson reprenait le même message alarmant. Et depuis lors, comme on peut le lire tous les jours dans la presse – et depuis des années et des années, les choses ne se sont pas arrangées, tout au contraire. Il faut dire qu’en Italie, comme ailleurs, on n’a pas voulu mettre à mal les anciennes couches dirigeantes, ni mettre au jour les difformités de la culture en place ; en bref, on n’a ni voulu, ni pu assainir le climat général. Les hommes de pouvoir ont gardé les mœurs des hommes de pouvoir, ils sont restés aux commandes, sous d’autres appellations, sous d’autres couleurs, de vrais caméléons, prêts à se rallier à tous les régimes, à tous les pavillons en guettant le moment de revivifier leur foi. Et il y a lieu de penser que ce moment approche. Brecht avait raison : « Le ventre est encore fécond d’où sortit la bête immonde » (et en original allemand : Der Schoß ist fruchtbar noch, aus dem das kroch). Non, décidément non, « l’histoire n’est pas terminée », et oui, décidément oui, « à la place Loreto commença notre délivrance »

Ainsi, Marco Valdo M.I., j’en conclus qu’il faut à toute force contrer cette désistance qui pourrit notre quotidien et obstinément tisser le linceul de ce vieux monde autoritaire, raciste, idiot, fasciste et cacochyme.

Heureusement !

Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane



Non, Place Loreto, l’histoire n’est pas terminée ;
On a gagné une bataille, mais pas la guerre,
Car la taille d’une plante n’est pas achevée
Tant que les racines restent sous la terre.

Si on veut vraiment enlever la racine,
Il faut retourner tout le terrain sans crainte,
Il ne suffit pas de changer la surface et la croûte,
Il faut vraiment changer de culture.

Si on ne change pas la culture, si on traîne
À arracher la racine, mais toute la racine, alors,
On se retrouve avec un corps
Sur lequel repousse la mauvaise plante.

Il ne suffit pas de changer d’engrais, de changer de fumure
Pour que cette nouvelle plante naisse différente
Tant que les racines restent,
Seuls les germes anciens se perdent.

La plante, qu’elle grandisse peu ou beaucoup,
Arrachons-la avant qu’elle ne grandisse encore ;
Il vaut mieux perdre un an, perdre la récolte
Plutôt que risquer de détruire tout.

Arrachons la mauvaise plante, mais toute entière
Afin qu’elle ne produise ni graines, ni fruits, ni feuilles.
Ses fruits font venir la peste noire,
Ses graines apportent la mort et le deuil.

Il ne suffit pas de raconter nos médailles
Et le souvenir de nos morts tombés alors ;
Il faut affronter les nouvelles batailles
Pour ôter cette moisissure qui nous empoisonne encore.

Cette moisissure qui empoisonne villes, usines,
Casernes, écoles, tribunaux et familles,
Cette moisissure apportera à nouveau la ruine,
Et pourrira les récoltes nouvelles.

Le fascisme est cette pourriture qui nous attaque ;
Il change de couleur, mais il reste toujours le même,
Qui sur l’orbace a mis la cravate
Et qui nomme manganelle, sa matraque.

Les sbires fascistes sont protégés de nos jours
Par leurs vieux protecteurs de toujours
Qui un temps ont fait tuer Gobetti
Et il y a quelque temps, ont fait tuer Pinelli.

Et ces vieux protecteurs sont une engeance
Qui change le bon vin en vinaigre
Mais unis, nous devons le crier plus fort encore
Qu’à la place Loreto commença notre délivrance.

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