Marco
et les Escrocs
Canzone
léviane – Marco
et les Escrocs –
Marco Valdo M.I. – 2018
Ainsi,
aujourd’hui, Lucien l’âne mon ami, je recommence à écrire de
nouvelles chansons lévianes. Il y en aura sans doute plusieurs, mais
je ne sais vraiment pas te dire combien. Celle-ci est tirée d’un
récit de Carlo Levi intitulé « Briganti e contadini »
(1958), ce qu’on peut traduire en français par « Brigands et
paysans ». Le personnage principal dénommé ici Marco est un
lointain cousin de ce Marcovaldo auquel Italo Calvino avait consacré
tout un roman. C’est d’ailleurs en référence à Marcovaldo
qu’il porte ici ce prénom. Quant aux escrocs, ils n’ont pas de
nom ; ce sont des escrocs ; deux escrocs déguisés en
policiers. Ou l’inverse. Cependant, pour l’honorabilité de la
profession, on n’en dira rien.
C’est
mieux, dit Lucien l’âne. Imagine un peu que ce soit le cas ;
des policiers véreux, corrompus, manipulateurs, cupides, extorquant
le passant, ce serait désolant.
Dès
lors, Lucien l’âne mon ami, pour mettre fin à toute dérive, il
convient de préciser le contexte. Si j’ai parlé de Marcovaldo,
c’est que le Marco qui nous occupe est lui aussi un paysan, monté
à la ville pour chercher de quoi subsister. Comme son presque
homonyme, comme tous les émigrés, il est assez décalé par rapport
à la vie de cette ville anonyme et compte tenu de son ignorance
supposée et de sa situation de faiblesse, de son désarroi, il est
l’objet d’intimidations et la proie d’escrocs.
Certes,
dit Lucien l’âne, ce sont là des choses anciennes et qui sont
toujours d’actualité et d’autant plus que le nombre de nouveaux
arrivants s’accroît. Il y faudrait une politique d’accueil
intelligente et fonctionnelle. Mais, me semble-t-il, celle-là relève
de l’oxymore.
C’est
la cas bien souvent, répond Marco Valdo M.I., mais cette fois, Marco
ne se laisse pas abuser par les escrocs, car comme on dit par chez
nous, il sent venir l’oignon et s’il accepte la proposition
d’aide de ses anges gardiens, il se tient sur ses gardes et laisse
venir les événements en restant prêt à se dégager. Comme tu vas
le voir, c’est finalement ce qui va se passer. Par ailleurs, ces
escrocs ne sont pas de grands arnaqueurs, ils n’ont rien de ces
grands hommes d’affaires qui se bâtissent des fortunes réelles ou
feintes, qui se portent à des sommets de pouvoir à force de
mensonges, de tricheries, de dettes et d’arrogances diverses. Les
escrocs que l’on trouve ici sont des escrocs au petit pied, ils ne
sont pas mieux lotis (et peut-être même moins) que Marco qu’ils
tentent de dévaliser et leur combine va lamentablement foirer. Ce
sont des branques, des branquignols, des caves, des nuls.
En
somme, dit Lucien l’âne, c’est une histoire drôle dans le genre
de celles des Pieds Nickelés ou de Charlot et le côté amusant pour
moi tient aussi au fait qu’il s’agit d’une fable contemporaine,
à la manière de celles d’Ésope ou de La Fontaine, mais où on
aurait remplacé les animaux par des humains. Cela dit, reprenons
notre tâche et tissons le linceul de ce vieux monde escroc, perclus,
menteur, minable et cacochyme.
Heureusement !
Ainsi
Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
Au
village, Marco est un arbre
Dans
sa forêt ;
Marco
est l’histoire
D’un
homme vrai.
Comme
tant de ses frères,
De
son finistère,
Il
a quitté le village
Pour
d’autres paysages.
Mais
à la ville,
Qui
est-il ?
Parmi
tous ces gens de la terre,
Chassés
par la misère.
Homme
petit, tête ronde,
Venu
d’un bout du monde,
Avec
sa peau de paysan,
Ses
yeux noirs et ses gestes lents.
Il
marche à pas pesants
Du
pas de l’âne prudent.
Il
parle avec réticence
Et
garde pour lui sa confiance.
À
la ville, Marco n’est personne
Autour
de lui, les autos klaxonnent
Souvent,
les policiers le contrôlent.
En
ville, la vie de pauvre n’est pas drôle.
« Eh,
vous, là ! Vos papiers ! »
« Vous
travaillez ? »
« Vous
avez de quoi subsister ?
De
l’argent sur vous. Oui, oui, j’en ai »
« Alors,
ça peut s’arranger.
Nous
on peut vous aider.
On
connaît un bon travail, facile,
Bien
payé et tranquille. »
Marco
quand même intéressé,
Pensez
donc, un travail assuré.
Dit
« et pourquoi pas ?
Mais
au fait, c’est quoi ? »
« Un
poste de tout premier choix :
Concierge
et jardinier
Au
couvent des sœurs de la Sainte Croix ;
C’est
la sécurité. »
C’est
assez loin. Alors, on y va.
En
chemin, ils m’offrent un café,
Plus
tard, un petit repas.
On
arrive enfin. On va sonner.
C’est
un lieu assez écarté.
Et
le soir tombe déjà.
Mais
avant, il faut nous donner
La
valise et l’argent que tu as là.
Le
ton monte et descend ;
On
crie, on menace.
C’est
le face-à-face.
Donne-nous
ton argent !
Oh,
l’argent, je n’en ai pas ;
Je
comptais sur ce boulot
Que
je n’aurai pas.
Bande
d’escrocs !
Marco
laisse la valise et s’enfuit.
Il
court, il court.
Où
est le village, où sont les brebis ?
Ce
soir, le ciel est bien lourd.
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