Version
française – LE LAVEUR DE PAREBRISES
– Marco
Valdo M.I. – 2017
Chanson
italienne – Il
lavavetri – Nuvole
Pesanti – 2004
Texte
de De Siena
Musique de De Siena-Sirianni-Voltarelli
Musique de De Siena-Sirianni-Voltarelli
Comme
la chanson s’intitule « Le laveur de parebrises », il
m’est venu à l’esprit l’idée qu’il fallait préciser en
commençant que le laveur de parebrises, qu’il vaudrait mieux
appeler le barbouilleur de parebrises, est de ces personnages de nos
sociétés urbaines ; c’est une figure récente de
l’imaginaire collectif.
Forcément,
dit Lucien l’âne en riant, il n’y a pas si longtemps qu’il
existe des parebrises automobiles.
Certes,
reprend Marco Valdo M.I. ; donc, le laveur de parebrises surgit
d’un coup devant les autos à l’arrêt au carrefour pendant la
durée calibrée des feux de signalisation. Il se déroule alors une
scène que raconte la chanson. D’un côté (du parebrise),
l’automobiliste coincé à son volant dans son cocon d’acier et
de verre, l’œil rivé sur le sémaphore et les pieds en suspension
dans le vide au-dessus des pédales. Il est extrêmement concentré
tant il ne pense qu’à ça. De l’autre côté du parebrise, juste
en face de lui, le laveur de parebrises avec un torchon humide, une
éponge, parfois une raclette, qui s’efforce de laver le parebrise
et par cela-même, de forcer l’automobiliste à un petit geste de
rétribution.L’ensemble est plutôt symbolique et rituel, car comme
je l’ai déjà signalé, pour ce qui est de laver le parebrise,
l’opération est généralement assez inefficace. Il y a là un
moment de tension, dans la mesure où l’automobiliste n’a pas
vraiment envie que l’on « nettoie » son parebrise.
En
effet, dit Lucien l’âne, j’ai déjà assisté à de pareils
affrontements, qui peuvent devenir très dramatiques, au moment où
le feu passe au vert ; à ce moment, l’auto s’élance sans
trop se préoccuper du laveur de parebrises. C’est
un ballet mortel, un peu comme la tauromachie. Dan l’idéal, on
peut imaginer que de tels moments pourraient être moins tendus si
les automobilistes reprenaient leurs esprits.
Oui,
Lucien l’âne mon ami, même furtif, ce serait un moment
sympathique entre deux êtres humains et tout pourrait se présenter
comme un instant de détente pour l’automobiliste et une rencontre
conviviale avec le laveur. Un peu comme l’échange du matin avec le
marchand de journaux, le garçon de café, la boulangère, le
facteur, le chauffeur de bus, que sais-je encore. Mais là aussi, de
nos jours, les choses finissent par se gâter. On parle d’heure, de
ponctualité, de presse, de stress, de burn-out. Toutefois, outre
qu’il entrave la marche de l’automobile, le laveur de parebrises
est marqué d’un signe pire encore que tous les autres, il est
auréolé de soupçon. Vois-tu, Lucien l’âne, les gens pensent :
c’est un étranger, un immigré, un migrant, un clandestin
peut-être, un sans-papiers,
un sans domicile, à tout le moins, une sorte de mendiant.
D’ailleurs, il ne travaille pas ; en tout cas, il n’exerce
pas une profession respectable. Dès lors, on le méprise, on se
méfie et que fait la police ? Dans la tête des automobilistes
aux autos rutilantes, aux machines dont le
prix nourrirait le laveur de parebrises
pendant des années, ce n’est jamais qu’un de ces faquins des
temps anciens. Pour un peu, ils l’assimileraient aux moustiques qui
collent sur le parebrise de leur véhicule.
Oh,
dit Lucien l’âne, je l’entends encore ce mot faquin qui avait
tout l’air d’une apostrophe infamante, d’une insulte.
Cependant,
continue Marco Valdo M.I., la chanson se place à un autre niveau.
Elle raconte cette aventure urbaine du point de vue de l’acteur ;
elle nous dévoile ce qui se passe pour le laveur, dans la tête du
laveur. Si le but pour ce dernier est de décrocher un peu
d’argent (Faut bien qu’il vive ! Olé !),
cet objectif précis et immédiat de son action ne l’empêche pas
de se garder à l’écart
de
ce jeu social, une zone de vie personnelle :
« Il
voyage dans sa
tête,
Il se réfugie dans son enfance
Quand alors encore son avenir
Était le bonheur.
Le bonheur ! »
Il se réfugie dans son enfance
Quand alors encore son avenir
Était le bonheur.
Le bonheur ! »
C’est
ce qui le sauve, comme ce recul hors du monde afin de se retrouver
soi-même et de résister ainsi à la pression quotidienne sauve le
prisonnier.
Tout
comme nous le faisons nous aussi, les ânes quand on nous réduit aux
travaux forcés, dit Lucien l’âne. Maintenant, voyons cette
histoire singulière et puis, reprenons notre tâche volontaire et
tissons le linceul de ce vieux monde inégal, inéquitable, injuste,
méprisant, méprisable et cacochyme.
Heureusement !
Ainsi
Parlaient Marco Valdo M.I et Lucien Lane
Avec
dans la main l’éponge
Et la mousse dans l’éponge,
Il a dans les yeux le parebrise
De cette auto qui arrive
Et la mousse dans l’éponge,
Il a dans les yeux le parebrise
De cette auto qui arrive
Et
ensuite s’en ira.
Appuyé au poteau,
Il met ses rêves dans son seau.
Comme un chat, il s’approche
Du moteur et il se réchauffe
Et ensuite s’en va.
Appuyé au poteau,
Il met ses rêves dans son seau.
Comme un chat, il s’approche
Du moteur et il se réchauffe
Et ensuite s’en va.
Et
il lave lave et lave lave
Les vitres de cette voiture officielle
Qui maintenant est à l’arrêt au rouge
Et dans un instant sera déjà lointaine.
Les vitres de cette voiture officielle
Qui maintenant est à l’arrêt au rouge
Et dans un instant sera déjà lointaine.
Il
lave les vitres
et il est
content ;
Il n’a cure pour le moment
De ce travail idiot,
De celui qui fait « no »
Et ensuite va partir.
Il voyage dans sa tête,
Il se réfugie dans son enfance
Quand alors encore son avenir
Était le bonheur.
Le bonheur !
Il n’a cure pour le moment
De ce travail idiot,
De celui qui fait « no »
Et ensuite va partir.
Il voyage dans sa tête,
Il se réfugie dans son enfance
Quand alors encore son avenir
Était le bonheur.
Le bonheur !
Et
s’ouvre s’ouvre
la fenêtre
Et lentement la main, petite
Fait tomber une pièce, petite
Premier euro du laveur de parebrises
Et lentement la main, petite
Fait tomber une pièce, petite
Premier euro du laveur de parebrises
Mais
une violente et
soudaine
Averse de saison est là,
Lave les yeux du laveur de parebrises,
Lui chuchote des choses étranges,
Et ensuite s’en va.
Averse de saison est là,
Lave les yeux du laveur de parebrises,
Lui chuchote des choses étranges,
Et ensuite s’en va.
Et
il lave lave et lave lave
Le cœur de cet homme en bleu
Accroché maintenant à ses privilèges
Et dans un instant ou deux,
Déjà sera tombé.
Le cœur de cet homme en bleu
Accroché maintenant à ses privilèges
Et dans un instant ou deux,
Déjà sera tombé.
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