mercredi 12 juillet 2017

Espagne 1937

Espagne 1937

Chanson française – Marco Valdo M.I. – 2017



Voici, Lucien l’âne mon ami, une nouvelle chanson qui s’intitule Espagne1937. Elle fait suite, dans une très courte série, à celle que j’avais intitulée « La Maison des Morts » (on trouvera là un complément à ce commentaire). Comme cette première chanson, elle est tirée du récit d’Arthur Koestler qui relatait sa terrible mésaventure espagnole et son destin d’otage, de prisonnier politique et de condamné à mort dans la partie de l’Espagne aux mains des putschistes franquistes, alors qu’A.K. était à Malaga comme envoyé d’un journal libéral britannique. Condamné à mort sans procès, il est détenu dans la prison de Séville.

« Ce que j’ignorais, c’est que la cour martiale de Malaga avait déjà prononcé ma condamnation à mort sans m’avoir auparavant cité à comparaître. La seconde chose que je ne savais pas, c’était qu’à ce jour – samedi 13 février 1937 – cinq mille hommes avaient été exécutés à Malaga depuis la chute de la ville ; dont six cents pour ma seule prison. »

Il échappe à son exécution, après plusieurs mois de prison, sous les pressions du gouvernement britannique et suite à un échange de prisonniers (on l’échange contre l’épouse d’un haut responsable franquiste), opéré à la frontière entre l’Espagne et Gibraltar.

Je me souviens très bien, Marco Valdo M.I. mon ami, de cette Maison des Morts (la prison de Séville) et du commentaire introductif, autrement dit de notre dialogue maïeutique à son sujet.

Cette canzone-ci, Lucien l’âne mon ami, est elle-même un dialogue, quoique tronqué. Un dialogue entre un franquiste qui justifie le putsch militaire et sa devise arrogante : « España ¡Una, Grande y Libre ! », son régime réactionnaire et clérical et l’idéologie simple qui y fleurit, d’une part et d’autre part, son auditeur forcé, qui compte tenu de son statut de prisonnier ne peut laisser deviner sa pensée que par des questions. Enfin, je te laisse apprécier la chose.

Ah, Marco Valdo M.I., méfions-nous de la simplicité de raisonnement, qui laisse toujours présager qu’on nous prend pour des « simples d’esprit ». À y regarder de plus près, je trouve que cette histoire peut encore servir à comprendre ce qui guide certaines gens au pouvoir aujourd’hui ; cette simplicité politique me rappelle celle du discours de certains dirigeants de grands pays d’aujourd’hui. À mon sens, il faudrait replacer ces discours dans le cadre de la Guerre de Cent Mille Ans que les riches (en ayant l’air de rien et de revendiquer la paix sociale) font aux pauvres pour asseoir leur pouvoir et protéger leurs intérêts et leurs privilèges, généralement connus sous le nom de l’« ordre établi ». En somme, comme la plupart de tes canzones, on trouve au-delà de ce qui est raconté une parabole d’un usage plus général. Mais, reprenons notre tâche et tissons le linceul de ce vieux monde monotone, simple, conservateur, réactionnaire et cacochyme.

Heureusement !


Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane



Où allons-nous, monsieur ?
Dans une autre ville
Là, tous les gens sont heureux
Quoi ?
Tous heureux !
Tous les gens sont heureux et libres.
Quoi ?
Libres !
Expliquez-moi.
Chez nous, en Espagne –
Une, grande, libre,
Les choses sont comme ça.
Chez nous, les pauvres
Ne luttent pas contre les riches ;
Nous avons un autre système.
Ici, on n’est pas riche ou pauvre,
Mais seulement bon ou méchant.
Voyez donc, c’est évident !
Les bons pauvres et les bons riches
Forment un parti.
Les mauvais pauvres et les mauvais riches,
L’autre parti.
Comment les distinguer ?
Ici, on ne réfléchit pas beaucoup.
Comment les distinguer ?
C’est facile comme tout :
Chez nous, en Espagne – Una, grande, libre,
Dans notre parti, on reste entre soi.
Les bons riches avec les bons riches
Les bons pauvres avec les bons pauvres.
Dans l’autre parti, c’est aussi comme ça.
Riche ou pauvre, chacun reste chez soi.
Les riches par ici,
Les pauvres par là.
On n’est pas ennemis.
On ne se connaît même pas.
Les bons vont à l’église et saluent le roi.
Les mauvais crient vive la République et ne prient pas.
Chez nous, en Espagne –
Una, grande, libre.
Oh, vous savez quoi ?
Dans tous les pays, c’est comme ça.

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