samedi 27 mai 2017

LES ENNEMIS SONT ENTRÉS DANS LA VILLE

LES ENNEMIS SONT ENTRÉS

DANS LA VILLE

Version française – LES ENNEMIS SONT ENTRÉS DANS LA VILLE – Marco Valdo M.I. – 2017
d’après
la version italienne – I NEMICI ENTRARONO IN CITTA' – Riccardo Venturi – 2017

Texte : Giorgios Skourtis
Musique : Giannis Markopoulos





La chanson « Μπήκαν στην πόλη οι οχτροί » fut écrite par Giorgios Skourtis en 1970, en pleine dictature, et mise en musique par un des plus importants musiciens grecs contemporains,. Elle fut interprétée par le Crétois Nikos Xylouris, qui trois ans après, ira la chanter parmi les étudiants du Polytechnique en révolte et en attente d’être massacrés. La chanson, en général, décrit bien ce qui arrive lorsque « les ennemis entrent en ville » : arrestations, meurtres, des déportations, pendant que la « majorité » rit, plaisante, il regarde les filles et crie hourra parce que l'« ordre » et la « sécurité » sont revenus.
Publié par Riccardo Venturi

Monologue de Lucien l’âne

Mon ami Marco Valdo M.I., qui a écrit la version française, dit Lucien l’âne, est pour le moment très pris par d’autres activités ; je parlerai donc pour lui afin de vous proposer une réflexion, si tant est qu’un âne comme moi puisse réfléchir et que vous aurez la patience de m’écouter. Voici de quoi il s’agit : J’aimerais souligner la parenté de cette chanson grecque de 1970 avec cette chanson allemande attribuée généralement à Bertolt Brecht et qui sans doute, trouve plus exactement son origine dans le texte de Martin Niemöller, pasteur de son état : Als die Nazis die Kommunisten holten (1945 ou antérieure), même si je garde l’impression que la source de ce poème de Niemöller est bien antérieure et devrait se trouver dans les récits d’origine religieuse, liés aux persécutions, qui font partie du fonds de la prédication, particulièrement dans les églises protestantes. À tout le moins, ça y ressemble beaucoup. Cette parenté tient à deux choses : le caractère progressif de l’histoire ici d’un quatrain à l’autre et cette dénonciation de la lâcheté, de l’indifférence d’un « nous », qui s’accommode finalement de tout régime en ignorant totalement le sort des persécutés ; un « nous » volontairement aveugle, sourd et muet, e « nous » pleutre, qui est très exactement le contraire de cet autre « nous » de la Résistance.

Par ailleurs, cette chanson me rappelle aussi Les loups sont entrés dans Paris (1964), où on trouve cette même progressivité de l’histoire et au fond, les mêmes « loups ».

Ainsi Parlait Lucien Lane.




Les ennemis sont entrés dans la ville,
Les ennemis ont forcé les portes
Et nous, dans nos quartiers, on riait ;
Oui, le premier jour, on riait.

Les ennemis sont entrés dans la ville
Les ennemis ont emmené nos frères,
Et nous, avec les filles, on parlait.
Oui, le jour d’après.


Les ennemis sont entrés dans la ville,
Les ennemis ont mis le feu en ville
Et nous, dans la nuit, on criait,
Oui, au troisième jour, on criait.

Les ennemis sont entrés dans la ville,
Les ennemis marchaient l’épée à la main
Et nous, on riait débiles.
C’était le lendemain.


Les ennemis sont entrés dans la ville
Les ennemis se mirent en civil
Et nous, encore toujours, on riait
Oui, le cinquième jour, on riait.


Les ennemis sont entrés dans la ville
Les ennemis ont pris le tribunal et l’hôtel de ville
Et nous, on criait « Vivat ! » et « Hourra ! »
Et nous, on criait « Vivat ! » et « Hourra ! »
Et depuis, chaque jour, Hourra !

Et depuis, chaque jour, Vivat !

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