RIEN
NE RESTE DE L’ÉCOLIÈRE
D’HIROSHIMA
Version
française – RIEN NE RESTE DE L’ÉCOLIÈRE D’HIROSHIMA –
Marco Valdo M.I. – 2017
Chanson
italienne – Nulla
rimane della scolara di Hiroshima – Primo
Levi – 1978
À
Hiroshima, Japon, où tomba la première bombe atomique, il existe un
Parc de la Paix, dans lequel on a bâti un monument aux enfants.
Voici ce qu’en dit le site qui y est consacré :
« Le
Monument des Enfants est dédiée à Sadako Sasaki, fillette de 2 ans
lors de l’explosion de la bombe, qui vivait alors à deux
kilomètres de l’épicentre.
Alors
que la plupart de ses voisins furent tués ou blessés, Sadako sembla
être épargnée. Aucune blessure… visible.
Jusqu’en
1954, ce fut une petite fille comme les autres.
Bonne
élève, enfance sans problème. Tout allait bien. Elle faisait même
de la compétition de course à pied.
Mais,
en 1954 tout bascula.
Après
une course, elle fut prise de vertiges. On crut à une fatigue
passagère.
Mais
les vertiges se multiplièrent. Emmenée à l’hôpital de la Croix
Rouge on diagnostiqua une leucémie, le « mal de la bombe
atomique ».
Elle
n’avait plus beaucoup de temps à vivre. Son souhait fut alors
d’avoir son tout premier kimono. Ses parents lui offrirent
également un sac-pochette et des zori (sandales) traditionnels.
A
l’hôpital, sous l’influence de sa compagne de chambre, Kiyo
Okura, de deux ans son aînée, elle se mit à lire des romans et
écrire à des correspondantes dans des magazines pour filles.
L’hôpital
de la Croix Rouge reçut alors du papier coloré et le distribua aux
enfants pour qu’ils fassent des pliages (origamis).
On
raconta alors à Sadako la
« légende
des 1000 grues ».
Au
Japon, la grue est symbole de longévité. On raconte qu’elle peut
vivre 1000 ans. En pliant du papier en forme de grues selon l’art
de l’origami.
("ori", plier et "gami" papier) et en
confectionnant une guirlande de 1000 grues (un senbazuru ou
zenbazuru, せんばづる),
on fait plaisir aux dieux
et
ceux-ci peuvent alors nous faire vivre 1000 fois 1000 ans…
Sadako
se met alors à confectionner des grues de papier, avec tout le
papier qu’elle put trouver.
On
dit qu’elle en confectionna 644.
Elle
mourut le 25 octobre 1955 à l’âge de douze ans.
Ses
camarades de classe terminèrent la guirlande.
Sadako
Sasaki est devenue une héroïne et la grue en papier, "ori-tsuru",
est un symbole de paix à travers le monde.
Chaque
année, des millions de grues sont envoyées au Japon et déposées
autour du Monument des Enfants érigé à la mémoire de Sadako
Sasaki et des milliers d’enfants victimes de la bombe atomique
d’Hiroshima.
Sadako
Sasaki est devenue une héroïne et la grue en papier, "ori-tsuru",
est un symbole de paix à travers le monde.
Ce
monument a été construit en utilisant l’argent provenant d’une
campagne de collecte de fonds menée par les écoliers japonais, dont
les camarades de classe de Sadako.
Le
monument des Enfants (genbaku
no ko no zōa
– Statue
des enfants de la Bombe Atomique)
été inauguré le 5 mai 1958 (le 5 mai est le « jour
des enfants »
au Japon).
Tout
en haut du monument une statue représente Sadako qui tient une grue
dorée au bout de ses bras.
Sous
le dôme du Monument, un carillon fait d’une cloche et d’une grue
dorée, que le vent agite et que l’on peut aussi faire sonner.
Ces
deux objets ont été donnés par le lauréat du prix Nobel en
physique Hideki Yukawa.
À
la base du monument, on peut lire ces paroles gravées, écrites par
les élèves de l’école que fréquentait Sadako :
これはぼくらの叫びです
Ceci
est notre cri.
これは私たちの祈りです
Ceci
est notre prière.
世界に平和をきずくための
Pour
construire la paix dans le monde »
tiré
du site du Mémorial
de la Paix Hiroshima
(https://onsenfuton.jimdo.com/hiroshima-miyajima/hiroshima-m%C3%A9moire/parc-de-la-paix/)
Dialogue
maïeutique
Voici,
insérée aujourd’hui en italien, une chanson que je me suis
empressé de traduire ou plus exactement, dont je me suis empressé
de donner une version en langue française, car, je l’avoue, ma
version n’est pas une « vraie traduction » du texte de
Primo Levi. On y trouvera sans doute des dissemblances qui pourraient
être prises pour des erreurs de traduction ; ce qu’elles ne
sont pas.
Par
ailleurs, je suis persuadé que Primo Levi n’aurait rien trouvé à
y redire ; finalement, l’essentiel, c’est qu’elle existe.
Sans
doute, sans doute, Marco Valdo M.I. mon ami, et il aurait raison.
Car, du moment – et moi, je t’ai vu travailler – du moment que
tu fais ce travail – simple en apparence, et que tu rends in fine
un texte correct et qui tienne en lui-même, bref, qu’il n’ait
pas l’air d’une pièce rapportée, il n’aurait pu qu’en
constater le résultat. Certains pourraient l’aimer, d’autres
pas, mais là, on est dans le domaine de la sensation. C’est une
autre histoire. Peut-être, en effet, aurait-on pu espérer meilleur
interprète, mais enfin, ça faisait près de quarante ans qu’il
attendait. Cela dit, on est très loin des catastrophes lexicales que
sont les traductions des « traducteurs automatiques ». Il
y a d’ailleurs là tout un domaine d’étude, à mon sens d’âne,
d’une complexité quasiment infinie.
Tu
m’as bien compris, Lucien l’âne mon ami. Toutefois, on peut
imaginer qu’un autre fera mieux ; en tout cas, moi, je le
souhaite. Maintenant, je voudrais te parler de la canzone, de ce
qu’elle raconte et surtout, de ses deux héroïnes, puisqu’elle
est bâtie autour de leurs terrifiants destins.
Il
y est donc question de deux écolières, de deux filles aux deux
bouts du monde, aux deux bouts d’une guerre.
L’une,
celle dont le titre dit : « Rien ne reste de l’écolière
d’Hiroshima » me paraît être Sadako Sasaki, une enfant,
encore presque un bébé au moment de la chute de la bombe (le 8 mai
1945), sur la ville où elle était née et où elle vivait, une
enfance commune dans une ville jusque-là tranquille et indemne,
jusque-là, très loin du front et des combats.
L’autre,
que Primo Levi met en résonance
avec la petite Japonaise, est une jeune fille allemande
juive, exilée aux Pays-Bas quand elle était encore une
petite enfant, qui mourut du typhus au camp de Bergen-Belsen sans
doute en février 1945. Comme les autres morts du camp, elle fut
réduite en cendres et fumée dans le crématoire. Elle s’appelait
Anneliese Marie Frank. Elle raconta ses jours de claustration
clandestine dans son journal en néerlandais : Achterhuis
(littéralement, arrière-maison), publié en français sous le
titre : « Le Journal d’Anne Frank ».
Ce
sont là des histoires terribles et il est bon de les raconter, dit
Lucien l’âne. D’une part, tout simplement afin que nul n’en
ignore, mais aussi pour pousser à la réflexion, y compris ceux qui
sont amenés à prendre les décisions les plus graves. Cependant,
malgré le fait que tous les jours ou presque nous disons notre
mépris de la guerre et la nécessité de l’éviter, si nous
trouvons que c’est là une des plus stupides choses à faire, on ne
peut que constater qu’elle se perpétue et resurgit inlassablement
ici, là et ailleurs encore.
En
effet, Lucien l’âne mon ami, on sait
tout autant que la Guerre
de Cent Mille Ans, bien que sa durée
réelle soit indéterminée et indéterminable, implique la longue
durée (très longue durée) du phénomène de la guerre, qui ne peut
que perdurer tant que les hommes voudront des richesses, voudront du
pouvoir, voudront de l’adulation, tant qu’il y aura de l’avidité,
de l’ambition, de l’envie et le goût de paraître. Une telle
mutation de l’espèce dans son entier suppose une autre dimension
temporelle que la vie commune de l’individu humain. Cependant,
il faut par tous les moyens tenter de faire évoluer l’ensemble des
humains. Il est même possible que l’espèce n’arrive pas à le
faire à temps… Cela dit, ces deux jeunes filles me rappellent
d’autres chansons comme La
petite Juive ou Auschwitz ou la Comptine
de Thérésine ou d’autres encore.
Conclure,
Marco Valdo M.I. mon ami, il est difficile de conclure. Sauf à dire
ce que nous disons depuis des années maintenant : tissons,
tissons sans discontinuer le linceul de ce vieux monde malade de la
richesse, de l’ambition, de l’avidité et cacochyme.
Heureusement !
Ainsi
Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
Puisque
l’angoisse de chacun est la nôtre
Nous
revivons encore la tienne, fille maigre
Qui
te serre convulsivement contre ta mère
Comme
pour rentrer en elle
Quand
à midi le ciel est devenu si sombre.
En
vain, car l’air devenu poison s’est infiltré
À
ta recherche par les fenêtres fermées
De
ta maison tranquille aux murs solides,
Enchanté
par ton chant et ton rire timide.
Des
siècles sont passés, la cendre s’est pétrifiée
Emprisonnant
pour toujours ces jolis membres.
Ainsi
tu restes parmi nous, tors calque de plâtre,
Agonie
sans fin, terrible témoignage
De
combien importe aux dieux l’orgueil de nos semences.
Mais
rien ne reste parmi nous de ta sœur lointaine,
De
cette fille de Hollande, entre quatre murs serrée
Qui
raconta pourtant sa jeunesse étouffée ;
Ses
cendres muettes ont été par le vent dispersées ,
Dans
un cahier chiffonné, sa courte vie enfermée.
À
Hiroshima, rien ne reste de l’écolière,
Ombre
confite dans le mur par la lumière
De
mille soleils, victime sacrifiée sur l’autel de la peur.
Puissants
de la terre, maîtres des nouvelles horreurs,
Tristes
gardiens secrets du tonnerre dernier,
On
en a assez des tourments par le ciel donnés.
Avant
de presser votre doigt, arrêtez-vous et réfléchissez.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire