mardi 10 novembre 2015

Tuez les hérétiques, leurs femmes et leurs enfants !


Tuez les hérétiques, leurs femmes et 


leurs enfants !


Chanson française – Tuez les hérétiques, leurs femmes et leurs enfants ! – Marco Valdo M.I. – 2015

Ulenspiegel le Gueux – 11




Marie et Philippe

Un joyeux couple royal





Opéra-récit en multiples épisodes, tiré du roman de Charles De Coster : La Légende et les aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d’Ulenspiegel et de Lamme Goedzak au Pays de Flandres et ailleurs (1867).
(Ulenspiegel – I, LII)
Cette numérotation particulière : (Ulenspiegel – I, I), signifie très exactement ceci :
Ulenspiegel : La Légende et les aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d’Ulenspiegel et de Lamme Goedzak au Pays de Flandres et ailleurs, dans le texte de l’édition de 1867.
Le premier chiffre romain correspond au numéro du Livre – le roman comporte 5 livres et le deuxième chiffre romain renvoie au chapitre d’où a été tirée la chanson. Ainsi, on peut – si le cœur vous en dit – retrouver le texte originel et plein de détails qui ne figurent pas ici.


Nous voici, Lucien l’âne mon ami, à la onzième canzone de l’histoire de Till

 le Gueux. Les dix premières étaient, je te le rappelle :

01 Katheline la bonne sorcière  (Ulenspiegel – I, I)
02 Till et Philippe (Ulenspiegel – (Ulenspiegel – I, V)
03. La Guenon Hérétique (Ulenspiegel – I, XXII)
04. Gand, la Dame (Ulenspiegel – I, XXVIII)
05. Coupez les pieds ! (Ulenspiegel – I, XXX)
06. Exil de Till (Ulenspiegel – I, XXXII)
07. En ce temps-là, Till (Ulenspiegel – I, XXXIV)
08. Katheline suppliciée (Ulenspiegel – I, XXXVIII)
09. Till, le roi Philippe et l’âne (Ulenspiegel – I, XXXIX)
10. La Cigogne et la Prostituée (Ulenspiegel – I, LI)


« Tuez les hérétiques, leurs femmes et leurs enfants. », quel est le grand macabre qui énonce de pareilles horreurs ? Ne serait-ce pas encore une fois Charles le sanguinaire, dit Lucien l’âne en relevant sa queue en point d’interrogation. Ou alors, peut-être, son fils Philippe ?

De fait, tu ne te tropes pas du tout, Lucien l’âne mon ami, il s’agit bien de ces deux-là. Oh, ils ne sont sans doute pas les seuls à avoir ce genre d’idées ; l’espèce court le monde depuis longtemps et elle s’y répand encore aujourd’hui. Cependant, ce titre reflète bien l’esprit de ces rois catholiques. L’Église et les supposés souhaits de sa divinité en sont la suprême autorité.
Il y a entre ceux-ci et celle-là un jeu subtil ; à savoir qui va tirer profit de l’autre. Mais à terme, comme elle joue une pièce éternelle ; entre les rois et l’Église, c’est toujours l’Église qui finit par gagner. C’est du moins la conviction profonde qui la maintient en place.


Finalement, à t’entendre, Marco Valdo M.I. mon ami, les rois ou les pouvoirs temporels sont en quelque sorte les bedeaux du monde.


On peut dire ainsi les choses. Maintenant, j’en reviens à la canzone en commençant par la fin, où Charles dit :
« Tuez les hérétiques, leurs femmes et leurs enfants.
Vous ferez bien, car de cela, Dieu sera ravi. »
Ce qui me semble conclure ce point.


Oui mais, la chanson, que raconte-telle ?


Cette chanson, Lucien l’âne mon ami, précédemment, est une sort de mise en scène de deux lettres. Une de Philippe à Charles et la réponse dudit à Philippe. Si tu t’en souviens, on en avait déjà touché un mot précédemment dans la neuvième chanson de ce cycle : «  Till, le roi Philippe et l’âne  » quand Philippe se plaignait à son père de son destin de « roi consort ». Cette fois, on a droit au détail de sa récrimination. Bref, ça se passe mal entre Philippe, mari de Marie Tudor, et les Anglais. Véritablement, il n’en peut plus et toute la puissance espagnole qu’il mettra en œuvre plus tard ne pourra renverser cet état de leurs relations. Elle s’épuisera comme sa grande Armada sur les brisants des côtés anglaises.

Donc, Philippe se plaint de son sort à son père Charles et que répond ce dernier ? Je suis très curieux de le savoir, insiste Lucien l’âne en se dandinant.

Avant de te faire connaître la réponse de Charles, laisse-moi, Lucien l’âne mon ami, attirer ton attention sur les exécrables relations qui – en plus du reste – meublent les jours et les nuits du couple royal. Voici ce qu’en dit Philippe :
« Et la Reine, ma femme est stérile
Et jalouse et farouche et gloute d’amour.
Elle me poursuit nuit et jour. »
Et en plus, on le sait, il ne la trouve pas jolie, pas à son goût et ne rêve que de lui échapper. Pour un peu, on le plaindrait. Si ce n’était le goût qu’il partage avec elle de massacrer les hérétiques et autre manifestation de sa folie sadique, qu’on avait déjà croisée dans son enfance (voir La Guenon Hérétique ), il aime jouer de la musique (et quelle musique !) sur un clavecin de son invention où à l’aide d’un fer rouge, il fait miauler les chats. Et, tiens-toi bien, il trouve cette pratique normale.


Il n'est pas le seul… D’autres cinglés s’y sont essayé dans ces temps barbares avec ce qu’on connaît sous le nom d’ « orgues à chats » (https://fr.wikipedia.org/wiki/Orgue_%C3%A0_chats) ...


Quant à la réponse de Charles son père, elle va vite le rassurer. D’entrée de jeu, Charles lui annonce qu’il va bientôt lui céder la place et ce n’est pas peu de choses. Tout un empire et de plus hors d’Angleterre. Philippe sera Roi d’Espagne… Et Charles de conclure : « Entretemps, tuez les hérétiques... ».


Voilà un père et un fils qui s’entendent comme larrons en foire pour régler leur problème de succession. Ce serait chose bien rassurante s’ils n’étaient l’un et l’autre de dangereux fanatiques, attachés à réduire par le fer, l’eau et le feu toute liberté de conscience et au-delà de pensée. Car ce sont là gens d’Inquisition qui vont jusque dans le plus intime de la vie quotidienne tenter d’imposer (à peine de tortures et de mort) la vraie foi, le règne du Christ par l’entremise de son Église (catholique, apostolique et romaine). Et, on n’en est pas encore débarrassés hic et nunc (ici et maintenant) et dès lors, pour notre part, reprenons notre tâche et tissons le linceul de ce vieux monde inféodé, croyant, crédule, catholique et cacochyme.



Heureusement !


Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane



Monsieur et père, écrivait Philippe,
Il me déplaît de devoir vivre en ce pays
Où pullulent comme puces, chenilles et sauterelles
Ces hérétiques que notre Mère l’Église honnit.

Ici, je ne suis pas le roi
Mais tout bonnement le mari de la Reine
Et ces gens se moquent de moi,
Du Pape et de notre Mère l’Église souveraine.

On m’insulte, on me dit parricide,
Prêt à frapper votre Majesté pour hériter.
Ce sont là des propos méchants et acides.
Longue vie et long règne à votre Majesté !

On invente, on calomnie, on médit, on dit aussi
Que par le feu, je torture les chats pour mon plaisir.
Et ces gens sont si assotés d’animaux en ce pays
Qu’ils me reprochent jusqu’à cet innocent loisir.

Et la Reine, ma femme est stérile
Et jalouse et farouche et gloute d’amour.
Elle me poursuit nuit et jour.
Je souffre parmi cette engeance incivile.

Monsieur et fils, répondait Charles,
Vos ennuis sont grands, soyez patient.
Apprenez que bientôt vous attend
La couronne ; vous savez de quoi je parle.

Je suis vieux, goutteux maintenant.
Il devient temps de céder aux jeunes gens.
À Metz, j’ai perdu quarante-mille soldats
J’ai fui devant Saxe et je ne m’en remets pas.

Alors, Monsieur et fils, je suis d’avis
De vous laisser mes royaumes. Entretemps,
Tuez les hérétiques, leurs femmes et leurs enfants.
Vous ferez bien, car de cela, Dieu sera ravi.

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