La
Moribonde
Chanson
de langue française – La Moribonde – Marco Valdo M.I. – 2015
Adieu Berlin, je ne t'aimais pas bien.
Adieu Berlin, je ne t'aimais pas bien, tu sais.
J'en crève de crever aujourd'hui
Alors que toi, tu es bien vivant
Et plus solide que l'ennui.
|
Je
vois, Marco Valdo M.I. mon ami, à son titre que ta chanson raconte
des choses terribles et que c'est une femme ou une personne féminine
qui en est la protagoniste. Et, comme je connais assez bien le
répertoire de Jacques Brel, j'imagine que cette moribonde parle de
sa fin, de sa disparition et de son enterrement. Je pense bien en
outre qu'elle entend régler ses comptes avant de s'en aller. Mais,
dis-moi, qui est-elle, cette moribonde ?
D’abord,
Lucien l'âne mon
ami, tu as raison, c'est
bien une parodie… Tu connais mon goût et celui de la chanson
populaire pour les parodies… Donc, c'est une parodie d'une chanson
du Grand Jacques, comme on l'appelle ici chez nous. Une parodie du
moribond… Chez Brel, elle raconte l'histoire d'un homme qui se sent
partir dans le néant et qui, en effet, comme tu l'as bien dit, règle
ses comptes avec son entourage : son ami, le curé, l'amant de
sa femme et sa femme. Il leur dit leurs quatre vérités. Par
ailleurs, c'est un mourant dont
on ne dit jamais le nom dans la chanson, une
sorte de figure anonyme et générale : « Le »
moribond, un personnage de la grande comédie humaine. Mais ce n'est
pas du tout le cas dans ma chanson. La moribonde, même si on ne dit
jamais son nom, il est aisé de savoir de qui il s'agit. Il
s'agit tout simplement de l'Europe en train de mourir. À ce sujet,
nous ne sommes pas les seuls à le penser ; j'en tiens pour
exemple la revue italienne Micro-Mega et son article de tête :
« La
pagnotta del Quarto Reich. Luglio 2015: il mese che ha riaperto la
questione tedesca »
[http://temi.repubblica.it/micromega-online/la-pagnotta-del-quarto-reich-luglio-2015-il-mese-che-ha-riaperto-la-questione-tedesca/]
L'Europe
en train de mourir ? En voilà une histoire. Ainsi, tu joues
ton Bossuet… « L'Europe se meurt, l'Europe est morte »
aurait d'ailleurs pu être une autre parodie.
C'eût
pu et cela sera peut-être, si j'ai le temps… Ce serait pas mal de
reprendre l'oraison funèbre d'Henriette d'Angleterre telle que la
fit l'Aigle de Meaux en 1670. Pas tout, ce serait un immense pensum ;
cependant cet extrait me paraît s'y prêter :
« O
nuit désastreuse! ô nuit effroyable, où retentit tout à coup,
comme un éclat de tonnerre, cette étonnante nouvelle: Madame se
meurt, Madame est morte! Qui de nous ne se sentit frappé à ce coup,
comme si quelque tragique accident avait désolé sa famille? Au
premier bruit d'un mal si étrange, on accourut à Saint-Cloud de
toutes parts; on trouve tout consterné, excepté le cœur de cette
princesse. Partout on entend des cris, partout on voit la douleur et
le désespoir, et l'image de la mort. Le roi, la reine, Monsieur,
toute la cour, tout le peuple, tout est abattu, tout est désespéré,
et il me semble que je vois l'accomplissement de cette parole du
prophète: Le roi pleurera, le prince sera désolé, et les mains
tomberont au peuple, de douleur et d'étonnement. »
Mais
ce n'est pas cela en ce qui tient à la chanson. On serait plus
proche pour en rester aux classiques du laboureur et ses enfants de
La Fontaine :
« Un
riche laboureur,
sentant sa mort prochaine,
Fit venir ses enfants, leur parla sans témoins... ».
Fit venir ses enfants, leur parla sans témoins... ».
Bref,
en ce beau matin de juillet, l'Europe se réveille moribonde et
s'adresse à quelques-uns des États qui la composent (mais
l'avertissement vaut pour tous : REGARDEZ CE QU'ILS FONT AUX
GRECS, ILS VOUS LE FERONT DEMAIN)
et les interpellant du nom de leur capitale. Elle plaint la Grèce de
son destin d'esclave, elle reproche à la France son inertie, elle
annonce à Bruxelles la fin de son rôle de capitale européenne
et enfin, elle dit à Berlin, qu'elle se
meurt de ce que l'État
allemand poursuit le rêve
d'Otto von Bismarck, c'est-à-dire
la conquête par n'importe quel moyen de tout le continent.
Eh
bien, on n'a pas fini de rire, dit Lucien l'âne en frémissant de
toute son échine et en relevant tel un plumeau sa queue vengeresse.
Par ailleurs, tu as raison de dire par n'importe quel moyen… pour
l'instant, ils ne sont pas militaires, mais il est vrai que – tant
qu'on acceptera ces soi-disant contraintes budgétaires, dettes et
autres fariboles financières – les capitaux suffiront à étrangler
les gens ; le
mécanisme est simple : je te prête de l'argent pour que tu
achètes mes produits ; je te pousse à la surconsommation ;
puis, comme tu ne peux plus faire face aux échéances, je t'étrangle
et je te saisis tout à vil prix.
En fait, on traitait déjà ce point dans tes Histoires
d'Allemagne [[45577]]
«
Avec la même insouciance moutonnière
Des troupeaux qu'on mène à l'abattoir
Marche maintenant l'Europe entière
Accomplissant le rêve d'Otto ou plutôt, son cauchemar. »
Des troupeaux qu'on mène à l'abattoir
Marche maintenant l'Europe entière
Accomplissant le rêve d'Otto ou plutôt, son cauchemar. »
Heureusement,
on peut encore penser que Don
Quichotte [[41719]], Rossinante, Sancho, le plat à barbe et
moi-même l'âne, pourrons faire obstacle à la PanzerKommission…
« Votre
Grande Europe n'est pas notre destin.
Faibles, pauvres, nous sommes l'Europe de demain. »
Faibles, pauvres, nous sommes l'Europe de demain. »
Pour
le reste, reprenons notre tâche et tissons contre vents et marées
le linceul de ce vieux monde hanté par les fantômes, caporalisé,
dressé, tétanisé et cacochyme.
Heureusement !
Ainsi
Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
Adieu
Athènes, je t’aimais bien.
Adieu
Athènes, je t'aimais bien, tu sais.
J'ai
mangé, j'ai bu tous tes vins ;
J'ai
fait danser toutes tes filles ;
J'ai
conduit à la ruine ta famille.
Adieu
Athènes, je vais mourir, tu sais.
C'est
dur de mourir au printemps
Mais
je pars aux fleurs désespérée,
Car
vu que tu es à genoux maintenant,
Je
sais qu'ils te prendront même tes musées.
Je
veux qu'on rie,
Je veux qu'on danse,
Je veux qu'on s'amuse comme des fous,
Je veux qu'on rie,
Je veux qu'on danse,
Quand c'est qu'on me mettra dans le trou !
Je veux qu'on danse,
Je veux qu'on s'amuse comme des fous,
Je veux qu'on rie,
Je veux qu'on danse,
Quand c'est qu'on me mettra dans le trou !
Adieu
Paris, je t’aimais bien.
Adieu
Paris,
je t'aimais bien, tu sais.
Tu
aurais dû virer de bord,
Tu
aurais dû changer de chemin,
Mais
tu n'as pas quitté ton
port.
Adieu
Paris, je vais mourir tu sais.
C'est
dur de mourir à l'été,
J'en
crève de crever à présent,
Alors
que toi, tu perds
ton
temps.
Je
sais qu'ils viendront au printemps
Je
veux qu'on rie,
Je veux qu'on danse,
Je veux qu'on s'amuse comme des fous,
Je veux qu'on rie,
Je veux qu'on danse,
Quand c'est qu'on me mettra dans le trou !
Je veux qu'on danse,
Je veux qu'on s'amuse comme des fous,
Je veux qu'on rie,
Je veux qu'on danse,
Quand c'est qu'on me mettra dans le trou !
Adieu
Bruxelles, je t'aimais bien.
Adieu
Bruxelles, je t'aimais bien, tu sais.
Moi
je prends le train pour le néant,
Tu
prendras
le train après le mien,
Mais
on prend tous un train suivant.
Adieu
Bruxelles, je vais mourir,
C'est
dur de mourir à l'automne, tu sais,
Mais
je pars aux fleurs sans hésiter
Car
vu ce que je t'ai donné jusqu'à
présent
Je
sais
que tu pleureras le
bon vieux temps.
Je
veux qu'on rie,
Je veux qu'on danse,
Je veux qu'on s'amuse comme des fous,
Je veux qu'on rie,
Je veux qu'on danse,
Quand c'est qu'on me mettra dans le trou !
Je veux qu'on danse,
Je veux qu'on s'amuse comme des fous,
Je veux qu'on rie,
Je veux qu'on danse,
Quand c'est qu'on me mettra dans le trou !
Adieu
Berlin, je ne t'aimais pas bien.
Adieu
Berlin, je ne t'aimais pas bien, tu sais.
J'en
crève de crever aujourd'hui
Alors
que toi, tu es bien vivant
Et
plus solide que l'ennui.
Adieu
Berlin, je vais mourir,
C'est
dur de mourir en hiver, tu sais,
Mais
je pars aux fleurs sans un sourire
Car
vu que tu rêves
en
allemand,
Je
sais que tu veux
tout le continent.
Je
veux qu'on rie,
Je veux qu'on danse,
Je veux qu'on s'amuse comme des fous,
Je veux qu'on rie,
Je veux qu'on danse,
Quand c'est qu'on me mettra dans le trou !
Je veux qu'on danse,
Je veux qu'on s'amuse comme des fous,
Je veux qu'on rie,
Je veux qu'on danse,
Quand c'est qu'on me mettra dans le trou !
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