jeudi 21 août 2014

Si tu t'imagines...

Si tu t'imagines...

Chanson française – Si tu t'imagines... – Juliette Gréco – 1949
Texte : Raymond Queneau – Musique : Joseph Kosma





Si tu t'imagines....





Alors, Lucien l'âne mon ami, nous y voilà...


Nous y voilà... Où ?, demande l'âne Lucien quelque peu raidi de stupéfaction.

Oh, Lucien l'âne mon ami, je disais ça au sens figuré. J'avais promis de présenter la « première chanson de Juliette Gréco », celle qui s'intitule « Si tu t'imagines... » et qui lui fut proposée par Jean-Paul Sartre et qui avait été écrite par Raymond Queneau sous un premier titre « C'est bien connu » (un titre qui sentait son Sally Mara à plein nez) dans « L'instant fatal ». À ce propos, j'imagine – c'est le cas de le dire – que tout cela qui est bien lointain peut paraître vain et insignifiant. Et somme toute, ce l'est comme toute l’histoire humaine. Cependant, si l'on veut considérer...


Certes, si l'on veut bien considérer quoi ?, dit Lucien l'âne un peu surpris de cette suspension...

Si l'on veut bien considérer ceci que cette chanson en apparence assez anodine réunit autour d'elle en plein cœur de l'existentialisme des auteurs de gros calibre : un philosophe et non des moindres, qu'on qualifia grotesquement de « pape de l'existentialisme : le dénommé Jean-Paul Sartre ; un écrivain majuscule, satrape du collège de Pataphysique, co-créateur de l'Oulipo où s'illustrèrent une flopée d'autres écrivains talentueux, directeur de l'Encyclopédie et finalement, académicien, le dénommé Raymond Queneau – auteur de la chanson ; un musicien de haut vol : Joseph Kosma, qui écrivit la musique au pied levé en une nuit et pour couronner le tout : une chanteuse de rêve, jeune personne qui ne chantait pas encore... Juliette Gréco, qui un demi-siècle plus tard, l'interprète encore. Rien que pour ça, pour cette étrange conjonction, il nous faudrait retenir cette canzone... Mais en outre...

Oui, en outre ? Sans doute, vas-tu trouver de bonnes raisons d'en faire une fois encore une chanson contre la guerre ? Je t'écoute, Marco Valdo M .I. mon ami.


En effet, Lucien l'âne mon ami. Mais là, il faut revenir sur le fait que cette idée m'est venue en traduisant « Les Règles de Vie » [[46859]] d'Erich Mühsam avec lesquelles je lui trouve une certaine parenté, cette volonté de vivre en paix, cette injonction à vivre tout simplement – tant que la vie est possible. Et l'est-elle dans la guerre ? La canzone de Mühsam commence par la règle de vie essentielle :
« An allen Früchten unbedenklich lecken », autrement dit : « Goûte sans hésiter à tous les fruits de la vie », qui renvoie à l'évidence au propos des Épicuriens, à cette philosophie matérialiste de l'Antiquité qui serait bien le fondement de toute civilisation « heureuse ». Celle de Queneau dit exactement la même chose, envoyant cependant également à la tradition française remontant à Ronsard et son « 
Cueillez dés aujourd'huy les roses de la vie. » On trouverait pareilles résonnances également chez Corneille – et Brassens , Horace, Lucrèce, Épicure...

Je crois bien que tu en as dit assez et même peut-être trop... Et puis, il nous faut reprendre notre tâche qui, je te le rappelle, est de tisser le linceul de ce vieux monde perclus de massacres, gangrené d'ambitions guerrières, de meurtres collectifs et cacochyme.


Heureusement !


Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane



Si tu t'imagines
Si tu t'imagines
Fillette fillette
Tu t'imagines
Xa va xa va xa
Va durer toujours
La saison des za
La saison de za
Saison des amours
Ce que tu te goures
Fillette fillette
Ce que tu te goures
Si tu crois petite
Si tu crois ah ah
Que ton teint de rose
Ta taille de guêpe
Tes mignons biceps
Tes ongles d'émail
Ta cuisse de nymphe
Et ton pied léger
Si tu crois petite
Xa va xa va xa
Va durer toujours
Ce que tu te goures
Fillette fillette
Ce que tu te goures
Les beaux jours s'en vont
Les beaux jours de fête
Soleils et planètes
Tournent tous en rond
Mais toi ma petite
Tu marches tout droit
Vers ce que tu vois pas
Très sournois s'approchent
La ride véloce
La pesante graisse
Le menton triplé
Le muscle avachi
Allons cueille cueille
Les roses les roses
Roses de la vie
Et que leurs pétales
Soient la mer étale
De tous les bonheurs
Allons cueille cueille
Si tu le fais pas
Ce que tu te goures
Fillette fillette
Ce que tu te goures



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