vendredi 28 février 2014

TOMBES

TOMBES


Version française – TOMBES – Marco Valdo M.I. – 2014

Chanson allemande - Gräber – Wolf Biermann - 1990

Paroles et musique de Wolf Biermann


En Crète, j'ai trouvé un cimetière
Pour Patrie et Führer
Beaucoup de soldats allemands y dorment
Dans la colline au bord de la route




Le père de Wolf Biermann, Dagobert, non seulement était juif mais aussi ouvrier, non seulement était ouvrier, mais aussi communiste. Et non seulement il était communiste, mais aussi membre de la résistance antifasciste. Il fut arrêté et condamné à six ans de captivité pour avoir saboté les pièces destinées à un navire de guerre. En 1942, lorsque les nazis décidèrent d'appliquer la « solution finale au problème juif », le père de Wolf Biermann fut aussi déporté dans un camp d'extermination, à Auschwitz, où il fut assassiné le 22 février 1943.

En Allemagne démocratique de l'après-guerre, Wolf Biermann devînt ami et élève de Hanns Eisler, revenu au pays après avoir été chassé des USA car il était communiste ; avec le maestro , il partagea rapidement une attitude critique envers le « socialisme réel ». À partir de 1963, peu après la mort d'Eisler, les autorités communistes commencèrent à censurer les œuvres de Biermann et en 1965, ils le marquèrent officiellement comme « traître de la classe ouvrière ». Comme il le raconte lui-même dans cette chanson, il fut même empêché de voyager en Pologne voisine pour rendre hommage à son père tué à Auschwitz (« Je n'ai pas besoin de chercher la tombe de mon père : il est partout, où je vois une cheminée fumer »). Ensuite en 1976, pendant qu'il se trouvait en tournée en Allemagne de l'Ouest, le gouvernement de l'Est lui rétira la citoyenneté, l'empêchant de rentrer et le forçant à l'exil.


En Crète, j'ai trouvé un cimetière
Pour Patrie et Führer
Beaucoup de soldats allemands y dorment
Dans la colline au bord de la route
Et sur eux mûrit
Le vin jaune
Trop doux ! Le vin jaune
Que j'ai englouti.

Et à Formentera, les morts habitent
Dans le confort, juste à côté
Du grand cimetière de voitures.
Cela m'a un peu effrayé
Qu'avec leurs armes, comme des guerriers
Ils reposent, morts, disposés
Au voyage dans l'éternité
Dans des voitures démobilisées

À Moscou, au cimetière des nonnes
Se tiennent là sous les images et les pierres
Les meurtriers et leurs victimes
Os sur os, ils gisent
Et jurent et geignent et cognent
Et à vif se griffent l'un l'autre
Et crient avec la terre sanglante
Dans leur bouche béante

Ainsi, j'ai brouté quelque tombe
J'ai bouffé des fleurs mortes
Et sur mon âme pèse
Une pierre de juif de Prague
Les morts ont une vie particulière
Ils parlent calme et clair
Même les mensonges de leur vie
Deviennent vrais dans le silence

Moi je sais, les morts vivent
Et veulent, que leur rende visite
Celui qui passe froid près d'eux, froids
Damné et maudit, il sera – Moi pas !
La pierre tombale de mon père
Est partout. Moi je n'ai pas
À chercher longtemps sa tombe
Elle est très facile à trouver
Là, où fume une cheminée.



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