lundi 1 août 2022

MIL NEUF CENT TRENTE-SIX

 

MIL NEUF CENT TRENTE-SIX


Version française — MIL NEUF CENT TRENTE-SIX — Marco Valdo M.I. — 2022

d’après la version italienne de Lorenzo Masetti

d’un poème espagnol — 1936 — de Luis Cernuda — 1961




En 1961, le poète espagnol Luis Cernuda, exilé aux États-Unis, un pays où il était profondément malheureux, donne une conférence dans une université. Un monsieur dans le public s’est levé pour lui serrer la main et lui a dit qu’il avait combattu en Espagne. C’était un milicien de la Brigade Lincoln — composée de volontaires venus des États-Unis (USA). Cernuda fut si ému que le soir même, il écrivit ce poème.

Et de sa poésie d’exil, on retiendra ceci :


« Devant les portes bien fermées,
Sur un fleuve d’oubli, va la chanson ancienne.
Une lumière pense au loin
Comme à travers un ciel.
Tous dorment peut-être,
Tandis que solitaire il porte son destin.
Fatigué d’être vivant, d’être mort… »


(Un fleuve, un amour — Luis Cernuda)


 

 

BRIGADE LINCOLN — Espagne 1936




Souvenez-vous et remémorez aux autres

Dégoûtés de la bassesse humaine,

Enragés de la dureté humaine :

Cet homme seul, cet acte seul, cette foi seule.

Souvenez-vous et remémorez aux autres.


En 1961 et dans une ville étrangère,

Plus d’un quart de siècle

Après. Circonstance triviale,

Forcé à une lecture publique,

Vous avez parlé ce soir-là,

À cet homme-là,

De la Brigade Lincoln, ancien soldat.


Vingt-cinq ans avant, cet homme-,

Sans connaître votre pays, en tout étranger

Et pour lui lointain, a choisi d’y aller.

Et si tel était le sort, il décida de jouer sa vie, là,

Jugeant que la cause en cause

Alors, était digne

De la foi qui comblait sa vie.


Que cette cause sembla perdue,

N’importe en rien ; que tant d’autres,

Prétendant y croire,

S’occupèrent seulement d’eux-mêmes,

Importe encore moins. Ce qui compte seul

Et nous suffit, est la foi d’un seul.


Aujourd’hui encore, la cause vous semble

Comme en ces jours-là,

Si noble et si digne de se battre pour elle.

Et lui, il l’a gardée, sa foi, cette foi.

Au long des années, à travers la déroute,

Quand tout semble la trahir. Mais cette foi,

Dites-vous, seule importe.


Merci, mon ami, merci

Pour l’exemple. Merci

De me dire que l’homme est noble.

Il importe peu que si peu le soient.

Un, un seul suffira

Comme témoin irréfutable

De toute la noblesse humaine.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire