Le Parti et les Paysans
Chanson française – Le Parti et les Paysans – Marco Valdo M.I. – 2021
Épopée en chansons, tirée de L’Histoire du Parti pour un Progrès modéré dans les Limites de la Loi (Dějiny Strany mírného pokroku v mezích zákona) de Jaroslav Hašek – traduction française de Michel Chasteau, publiée à Paris chez Fayard en 2008, 342 p.
Épisode 1 – Le Parti ; Épisode 2 – Le Programme du Parti ; Épisode 3 – Le Fils du Pasteur et le Voïvode ; Épisode 4 – La Guerre de Klim ; Épisode 5 : La Prise de Monastir ; Épisode 6 : La Vérité sur La Prise de Monastir
Épisode 7
Campagne tchèque
Rudolf Bém – vers 1900
Dialogue maïeutique
Tout comme, Lucien l’âne mon ami, chez les rats de La Fontaine ou d’Ésope, chez les humains, il existe une forte différence, comme un grand écart entre les modes de vie des humains des villes et des humains des champs.
C’est une histoire de culture, dit Lucien l’âne doctement.
Tu ne penses pas si bien dire, répond Marco Valdo M.I., car ce clash culturel est précisément le sujet de la chanson. Donc, je rappelle que le Parti est né en ville ; c’est un parti citadin et de ce fait, son recrutement, son électorat, son champ d’action, son programme et de façon générale, tout le reste et sa façon de concevoir le monde, les choses, les gens et le futur sont imprégnés de l’air de la ville. Il n’en reste pas moins que l’étrange désir lui est venue de conquérir un espace agricole et le Parti va tenter de pénétrer la zone rurale et de rallier les paysans à ses idées.
À se demander, rétorque Lucien l’âne, ce que diable, il allait faire dans cette galère. Mais tout compte fait, c’est dans la logique de tout parti d’aller ainsi vers le peuple, où qu’il se trouve. De là à le faire adhérer, il y a une longue marche. C’est d’ailleurs vrai dans le sens inverse, car un parti rural a souvent les plus grandes peines à s’installer en ville.
Soit, reprend Marco Valdo M.I., mais nous ne sommes pas ici pour faire un traité de science politique, ni pour débattre de la stratégie et de la propagande des partis dans leur ensemble. Il s’agit de s’intéresser à cet épisode du Parti pour un Progrès modéré dans les Limites de la Loi quand il tente une percée dominicale dans les campagnes tchèques ; c’était il y a cent-dix ans. Au passage, on constatera que les choses n’ont pas beaucoup évolué. La méthode mise en œuvre est assez classique : il faut rassembler le public visé, ici les paysans et le convaincre de l’intérêt du discours du Parti. Et comme on peut le voir, ce premier essai est un remarquable échec : la tentative tourne à la catastrophe comme ce fut également le cas dans la chanson de Mani Matter : « Si hei dr Wilhälm Täll ufgfüert – On a joué Guillaume Tell ».
Oui, dit Lucien l’âne, c’est que tout simplement les cultures ne sont pas les mêmes en ville et à la campagne et ce n’est pas près de s’arranger. Pour le reste et les détails de cette incompréhension mutuelle, il faut aller voir la chanson. Alors, tissons le linceul de ce vieux monde irréductible, divisé, contradictoire, antagoniste et cacochyme.
Heureusement !
Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
Pour atteindre l’autonomie,
Pour améliorer sa condition,
Pour agrémenter sa vie,
Le peuple a besoin d’instruction.
Le Parti a promis de fournir
Une révolution culturelle et un bel avenir.
Le paysan continue à labourer ;
Les vaches, à ruminer et à meugler.
Le monde rural n’est pas prêt
À réaliser un tel progrès.
Au village de Letna, il y a une auberge
Avec une terrasse sur la berge.
Le Parti y programme une séance éducative,
D’un intérêt vital pour les paysans ;
Une conférence très instructive
Sur l’assainissement des prés et des champs
Par l’extermination des rongeurs ordinaires
Selon une méthode révolutionnaire
Inventée par un scientifique anglais
Et perfectionnée par des experts français.
Une telle conférence est une aubaine,
La salle de l’auberge est pleine
Le dimanche au moment convenu.
Après avoir longuement marché
Sous le ciel torride de l’été,
De tous les environs, les paysans étaient venus.
Ils se saluent, ils s’interpellent,
Lentement, le comice s’assemble.
Du comptoir, la bière coule à flots,
La conférence commence bientôt.
En 1812, un savant anglais déclarait
Les mulots stériles.
En 1815, grâce à Wellington, il imposait
À la France, cette thèse débile.
La campagne et l’Université de France
Face à ce délire firent alliance
Et prouvèrent scientifiquement
Qu’un mulot moyen a 240 descendants.
Furieux, les paysans nous chassèrent.
Dure leçon pour le Parti : c’était la première.
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