La
Résurrection
Chanson
française – La Résurrection – Marco Valdo M.I. –
2020
ARLEQUIN
AMOUREUX – 44
Opéra-récit
historique en multiples épisodes, tiré du roman de Jiří Šotola
« Kuře na Rožni » publié en langue allemande, sous le
titre « VAGANTEN, PUPPEN UND SOLDATEN » – Verlag C.J.
Bucher, Lucerne-Frankfurt – en 1972 et particulièrement de
l’édition française de « LES JAMBES C’EST FAIT POUR
CAVALER », traduction de Marcel Aymonin, publiée chez
Flammarion à Paris en 1979.
Dialogue
Maïeutique
Que
voilà un titre bien réjouissant !, s’exclame Lucien l’âne
en riant.
Oui,
répond un Marco Valdo M.I. faussement sinistre, surtout en ces temps
morbides et hypocondriaques que nous vivons, où par avance, tous se
croient malades et grandement souffrants. D’autant plus que la
quarantaine, qui confinera bientôt toute la planète en elle-même,
ne pourrait nous effrayer grandement, nous qui vivons habituellement
en retrait dans notre réserve indienne de Wallonie. Les
rassemblements, les regroupements, les entassements, les
attroupements et toutes ces sortes de choses, bref, le troupeau :
très peu pour nous.
Tout
comme d’ailleurs, prolonge Lucien l’âne, les abois, les
brouhahas et les tracas ne sont pas pour moi, ne me vont pas. Mais
enfin, quand même, par les temps qui courent, une résurrection, ça
ne se refuse pas. On pourrait même dire que c’est une bonne
nouvelle. Mais au fait, quelle est-elle ? De quoi s’agit-il
très exactement ?
De
quoi s’agit-il très exactement ?, Lucien
l’âne mon ami, je m’en vais te le dire en te renvoyant à la
chanson elle-même, qui te le dit dès le début :
« Eine
ganz neue Pantomime
mit Harlekin. »
(Toute
une pantomime avec Arlequin)
Voilà
ce que c’est cette résurrection, en quoi, tu le conviendras, elle
ne se distingue aucunement de toutes les autres. En réalité, tout
fantasmagorique et baroque qu’elle est, elle décrit son irréelle
réalité.
D’accord,
j’entends bien, Marco Valdo M.I. ; mais dis-moi de quel irréel
réel tu parles ?
Oh
moi ?, je ne parle de rien, répond Marco Valdo M.I. ;
c’est la chanson qui raconte et philosophe. Elle raisonne et
dévoile le mystère de la résurrection en général ; je veux
dire, en dévoilant le sien, elle dévoile le mystère de toutes les
autres. En fait, c’est un peu la description méticuleuse du
phénomène.
Oui,
c’est une bonne chose, approuve Lucien l’âne, que de lever le
voile sur cette histoire de résurrection qui m’a toujours semblé
suspecte. Je l’ai toujours tenue pur une histoire de
charlatan, pas une blague, mais une véritable escroquerie
intellectuelle juste capable d’abuser ceux qui veulent y croire.
Certes,
dit Marco Valdo M.I., mais pur la chanson, la chose est plus subtile.
Je résume en considérant que les trois parties de la chanson sont
trois actes d’une pièce de théâtre jouée par la petite troupe
de Matěj Kuře, alias Matthias, Sevastiano, Andrea, etc., dans le
théâtre de verdure qu’elle s’est improvisé dans la grotte de
la marnière. Donc, l’acte I voit la nécessaire mort d’Arlequin.
Nécessaire ?,
s’étonne Lucien l’âne.
Mais
oui, Lucien l’âne mon ami, c’est logique. Arlequin doit
absolument mourir au premier acte, car sinon comment pourra-t-il
ressusciter ?
En
effet, dit Lucien l’âne, c’est logique : il faut mourir, si
l’on veut ressusciter. Ainsi, on
ne ressuscitera
jamais. Et puis ?
Et
puis, Lucien l’âne mon ami, c’est le deuxième acte où les
compagnons du défunt (Pierrot et Pantalon et même le Docteur Faust)
s’affairent à vouloir contrarier la mort. Deux expressions fortes
se font entendre sous la forme d’impératifs destinés à relever
l’Arlequin défaillant : Trompe la mort ! et Debout les
morts !
Fort
bien, dit Lucien l’âne, mais que veulent-elles exprimer de si fort
ces fortes expressions ? Je te le demande.
D’abord,
mon ami Lucien l’âne, honneur aux trompe-la-mort, qui idéalement,
sont des gens comme nous qui jouent à cache-cache avec la camarde,
qui se refusent à
l’épouser et n’ont
pas l’air de vouloir se
décider à en finir . Ce sont des casse-cous, parfois.
Et
puis, dit Lucien l’âne, c’était aussi l’idée de Tonton
Georges qui disait, si je me souviens bien, sous ce titre de
« Trompe-la-mort »,
sa petite résurrection :
« Et
puis, coup de théâtre, quand
Le temps aura levé le camp,
Estimant que la farce est jouée,
Moi tout heureux, tout enjoué,
Je n’exhumerai du caveau
Pour saluer sous les bravos »
Le temps aura levé le camp,
Estimant que la farce est jouée,
Moi tout heureux, tout enjoué,
Je n’exhumerai du caveau
Pour saluer sous les bravos »
Quant
à Debout les morts !, Lucien l’âne mon ami, l’imagination
s’en va directement à la grande guerre où le cri fusa dans une
tranchée et comme le racontait ma grand-mère, qui vivait là-bas
dans un hôpital à soldats, on cria
« Debout
les morts ! Et les morts se levèrent et nous eûmes la
victoire »
De
l’autre côté, Bertolt Brecht raconte, dans sa Legende
vom toten Soldaten – La
Légende du Soldat Mort,
le mort ressuscité de
force
par l’état-major et
Georges Brassens encore chantait dans Le
Bulletin de Santé :
« Et
si vous entendez crier comme en quatorze:
« Debout ! Debout les morts ! », ne bombez pas le torse »
« Debout ! Debout les morts ! », ne bombez pas le torse »
Évidemment,
dit Lucien l’âne, on ne pouvait passer à côté de ça. Donc,
avant que tu ne te relances, je résume ton résumé : Acte I :
la mort ; Acte II : le refus de la mort. Et quid de l’Acte
III ?
Dans
l’Acte III, dit Marco Valdo M.I., on assiste à la résurrection
d’Arlequin, réanimé par le souffle et puis, il est triste de
l’avouer, abandonné par ses souffleurs, le pantin remeurt. Cette
fois, définitivement.
C’est
triste comme Venise, dit Lucien l’âne. Alors, restons-en là et
concluons à notre ordinaire, plus encore de circonstance. Tissons le
linceul de ce vieux monde submergé, calamiteux, morticole,
mortifère, thanatophile,
nécrophile, nécropole et cacochyme.
Heureusement !
Ainsi
Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
Eine
ganz neue Pantomime mit Harlekin.
Assis
sur le gazon, Arlequin le bouffon
Masse
ses joues, passe ses lèvres au vermillon,
Scrute
ses mains, décharnées, vieilles, ses mains
Pierrot
plâtré de blanc et Pantalon
Ânonnent
l’épilogue de la Résurrection.
Arlequin
bat des mains et s’écroule.
Πάντα
ῥεῖ / Pánta
rheî : tout s’écoule.
Oui,
Monsieur Po, oui, Monsieur Li,
Oui, Monsieur Chi,
Oui, Monsieur Nelle,
Oui, Monsieur Polichinelle.
Oui, Monsieur Chi,
Oui, Monsieur Nelle,
Oui, Monsieur Polichinelle.
Pantalon
veut creuser la tombe. Pas encore,
Pierrot
veut garder le corps .
Le
Docteur Faust surgit du décor :
Harlekin,
Arlequin, Arlecchino : Trompe la mort !
Les
morts peuvent-ils ressusciter ?
Natürlich,
naturellement et pourquoi pas ?
Ô
Pantalon ! Comment faire ça ?
« Debout
les morts ! », il faut crier.
Oui,
Monsieur Po, oui, Monsieur Li,
Oui, Monsieur Chi,
Oui, Monsieur Nelle,
Oui, Monsieur Polichinelle.
Oui, Monsieur Chi,
Oui, Monsieur Nelle,
Oui, Monsieur Polichinelle.
Pour
ranimer la dépouille, vie lui redonner,
Inutile
de crier, un souffle divin, il faut souffler.
Ils
soufflent sur les jambes, ils soufflent sur les bras
Abracadabra,
une fois et le pantin ressuscite déjà.
Pierrot,
Pantalon retournent à leurs affaires.
Abandonné,
désespéré, Arlequin retombe à terre ;
Arlequin
n’est plus qu’un remort solitaire ;
Arlequin
n’est plus qu’un mort sous la terre.
Oui,
Monsieur Po, oui, Monsieur Li,
Oui, Monsieur Chi,
Oui, Monsieur Nelle,
Oui, Monsieur Polichinelle.
Oui, Monsieur Chi,
Oui, Monsieur Nelle,
Oui, Monsieur Polichinelle.
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