La
Guerre frappe à la Porte
Chanson
française – La Guerre frappe à la Porte – Marco Valdo M.I. –
2020
ARLEQUIN
AMOUREUX – 45
Opéra-récit
historique en multiples épisodes, tiré du roman de Jiří Šotola
« Kuře na Rožni » publié en langue allemande, sous le
titre « VAGANTEN, PUPPEN UND SOLDATEN » – Verlag C.J.
Bucher, Lucerne-Frankfurt – en 1972 et particulièrement de
l’édition française de « LES JAMBES C’EST FAIT POUR
CAVALER », traduction de Marcel Aymonin, publiée chez
Flammarion à Paris en 1979.
Dialogue
Maïeutique
Comme
tu l’avais remarqué depuis longtemps, Lucien
l’âne mon
ami, la chanson est chose poétique et souvent, énigmatique, elle
s’exprime de façon cryptique. Elle joue sur la sensation de
mystère, elle s’appuie sur le sentiment d’incertitude. On ne la
comprend pas toujours immédiatement, mais toujours, on sent ce
qu’elle veut dire. Ensuite, il y faut du temps et certaines
répétitions.
Parfois,
la chanson, vois-tu Marco Valdo M.I. mon ami, me fait penser à une
ânesse qui se fait prier pour vous inviter à la danse du printemps.
C’est
un peu ça, assurément, dit Marco Valdo M.I. ; c’est une
demoiselle ou une dame qui aime prendre son temps, qui apprécie
qu’on la regarde d’un œil ardent. Donc, la chanson est ainsi
faite qu’il lui faut apprivoiser les gens.
Excellentes
considérations, répond Lucien l’âne, un peu interloqué par la
tournure de la conversation, mais – car il y a toujours un mais –
mais que raconte cette chanson-ci au titre si ronflant ?
Avec
les chansons précédentes : La
Sainte Famille et La
Résurrection, explique Marco Valdo
M.I., on avait assisté à un spectacle à rebondissements.
Oh,
dit Lucien l’âne, excuse-moi de t’interrompre, mais c’est
toujours comme ça avec ces choses -là ; les gens sont
tellement influençables.
Oui,
reprend Marco Valdo M.I. en souriant, et même, fort crédules.
Cependant, revenons aux faits. C’était le spectacle d’adieu de
la petite troupe d’Andrea Sereno. Elle se donnait dans une caverne
ou un lieu tout comme et elle s’achevait par la mort, la
résurrection et la remort d’Arlequin.
Je
me souviens, dit Lucien l’âne. La remort est inévitable dès lors
qu’il y a résurrection.
Dès
lors, on pourrait imaginer l’affaire classée, mais – car il y a
toujours un mais – mais il n’en est rien, comme je m’en vas te
le conter. Arlequin remort vient sur scène, silencieux et raidement
étrange, Matthias pour qui aussi c’est la dernière représentation
de son théâtre de marionnettes. Comme Matthias ne rajeunit pas, que
ses cheveux sont partis
presque tous on ne sait où, qu’il est vêtu à la va comme je te
pousse, c’est une sorte de vieil épouvantail que
le public distingue et comme tous les publics, il croit que c’est
là une partie du spectacle, d’un spectacle censément comique,
baroque, grotesque, il rit. Il rit de ce vieil homme qui fait ses
adieux, planté sans rien dire au milieu de nulle part.
Ça
me rappelle, dit Lucien l’âne, l’histoire tragique de ce clown
au pied de l’échelle qui regarde avec un sourire béat de comédie
la lune tout là-haut
et finit sous les rires, par mourir à l’endroit où son cœur
l’a lâché ; ou cet autre qui jouait du violon dans cette
chanson si poignante
de
Gianni Esposito
qui portait justement
ce titre : « Le
Clown », sans
doute une des plus belles chansons françaises.
Oui,
Lucien l’âne mon ami, c’est bien cette atmosphère ambiguë de
rire trompeur et de pleurs pour de rire dont s’habille la chanson.
Et tous finalement s’en vont, le clown n’a pas bougé et dans le
fond, tout en haut dans le noir, un silhouette féérique se tint
immobile comme une statue. Ainsi,
on n’a
plus que deux statues en une sorte de jeu de miroir : le
Commandeur et la Commandeuse.
Mais
quand même, Marco Valdo M.I. mon ami, on ne joue pas Don Juan.
Eh
bien, répond Marco Valdo
M.I., si ! Ça se pourrait, car souviens-toi de l’épisode en
chanson : « Une
Statue ne porte pas de Caleçon », tout comme « Les
cadavres ne portent pas de costard », épisode où
Sevastiano, alias Matthias, Andrea et consorts, était le Commandeur.
Oui,
en effet, répond Lucien l’âne, c’était un moment fort
dramatique, d’une comicité remarquable, un instant-clé de
l’histoire du déserteur. Cela dit, quoi ensuite ? Qu’est-ce
qui se passe entre ce Commandeur et cette Commandeuse ?
Lucien
l’âne mon ami, ce sont les retrouvailles d’Arlecchino et
d’Arlecchina, où Arlecchina va danser la danse du ventre, chose
orientale, qu’elle fera voilée aux endroits cruciaux de son
anatomie, comme il se doit. Le reste, la chanson te le dira, ainsi
que la rumeur de la guerre qui se rappelle aux acteurs du monde.
En
attendant d’en savoir plus, nous qui vivons, rions, rions et
tissons le linceul de ce vieux monde solennel, en état d’urgence,
en alerte, couronné
et
cacochyme.
Heureusement !
Ainsi
Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
Sur
les planches, l’Arlequin de bois est mort,
L’Arlecchino
de chair, heureusement, pas encore.
Sur
la scène, mutique commandeur anonyme,
Matthias
est venu, salut ! Dernière pantomime,
Sans
geste, sans mot dire,
Et
le public de sourire
Et
les gens de rire du message
Du
vieux clown si sage.
Oui,
Monsieur Po, oui, Monsieur Li,
Oui, Monsieur Chi,
Oui, Monsieur Nelle,
Oui, Monsieur Polichinelle.
Oui, Monsieur Chi,
Oui, Monsieur Nelle,
Oui, Monsieur Polichinelle.
L’assistance
se disperse dans le noir.
Là-haut,
tout là-haut, en haut du perchoir,
Une
silhouette est assise, silencieuse :
Une
femme, pas une gourgandine licencieuse.
Vous
là-haut, approchez, ne restez pas là !
Qui
êtes-vous ? Je ne vous vois pas.
C’est
moi, Arlecchina, Arlecchino !
Alors,
tu n’es pas fâché, Pollo ?
Oui,
Monsieur Po, oui, Monsieur Li,
Oui, Monsieur Chi,
Oui, Monsieur Nelle,
Oui, Monsieur Polichinelle.
Oui, Monsieur Chi,
Oui, Monsieur Nelle,
Oui, Monsieur Polichinelle.
Oh,
dis-moi, Pollo, es-tu heureux ?
Avec
mes gens de bois, on a joué un peu ;
Heureux,
dis-tu ? Je ne sais pas.
Je
suis, je suis, je suis moi.
Danse,
Arlecchina, mon ombre !
Danse
la danse des voiles sombres
Et
cache bien ce qu’on ne voit pas.
À
la porte, la guerre frappe encore une fois.
Oui,
Monsieur Po, oui, Monsieur Li,
Oui, Monsieur Chi,
Oui, Monsieur Nelle,
Oui, Monsieur Polichinelle.
Oui, Monsieur Chi,
Oui, Monsieur Nelle,
Oui, Monsieur Polichinelle.
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