Visite
à la Ferme
Chanson
française – Visite
à la Ferme
– Marco
Valdo M.I. – 2018
Ulenspiegel le Gueux – 115
Opéra-récit en multiples épisodes, tiré du roman de Charles De Coster : La Légende et les aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d’Ulenspiegel et de Lamme Goedzak au Pays de Flandres et ailleurs (1867).
(Ulenspiegel – IV, XVII)
Ulenspiegel le Gueux – 115
Opéra-récit en multiples épisodes, tiré du roman de Charles De Coster : La Légende et les aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d’Ulenspiegel et de Lamme Goedzak au Pays de Flandres et ailleurs (1867).
(Ulenspiegel – IV, XVII)
Chez Lamme, on dîne |
Dialogue
Maïeutique
L’autre
jour, dit Lucien l’âne, on a fait ici la version française d’une
chanson italienne (La
fattoria degli animali), une version qu’on avait
intitulée « La Ferme des Animaux ». Est-ce la suite ?
Oh
non, pas du tout, se récrie Marco Valdo M.I., et tu le sais fort
bien, puisque celle-ci est une chanson de la Légende, un épisode de
la Geste de Till. De plus, faux devin, elle ne raconte pas du tout la
même chose. C’est forcé, rappelle-toi, nous avions laissé Till,
Lamme et compagnie – toute une flotte en vérité – devant
Amsterdam. Depuis des jours, Till et son équipage vivaient sur la
Brielle prise par le gel au beau milieu du détroit de l’IJ et le
temps passant, les vivres vinrent à manquer.
Ohé,
ohé !, chante soudain Lucien l’âne. Ohé, ohé, matelot…
Non,
Lucien l’âne mon ami, on ne tirera pas à la courte paille pour
savoir qui sera mangé, car Lamme se révèle et impose une
expédition à terre pour s’emparer de la ferme du félon afin de
réapprovisionner la flotte entière. Till décide de prendre la tête
de ce raid. On en était resté là.
De
ça, je me souviens, déclare Lucien l’âne, et je brûle de
connaître la suite ; d’autant, si je m’en souviens bien
qu’il est aussi question d’aller châtier ce traître, le dénommé
Slosse, qui avait vendu des Gueux aux Espagnols ; des Gueux que
les Espagnols avaient décapités sur le marché aux Chevaux du Petit
Sablon à Bruxelles, un jour en plein midi.
Exactement,
dit Marco Valdo M.I., la Visite à la Ferme commence là, quand le
commando s’élance dans la nuit et s’empare de la ferme, du
fermier, des autres gens, de vivres et du bétail. Il fait également
main basse sur le trésor (dix mille florins, une fortune !) du
délateur. Puis, ils ramènent le tout au bateau. Voilà pour
l’action.
Pour
de l’action, s’exclame Lucien l’âne, on peut dire qu’il y a
de l’action. Aller-retour en pleine nuit, un vrai rezzou. Mais tu
voulais ajouter quelque chose ?
Bien
sûr, assure Marco Valdo M.I. sans acrimonie, et merci de me le
rappeler. Je voulais une fois encore attirer ton attention sur la
métamorphose de Lamme, qui soudain devient non pas un scarabée,
mais un chef, un maître, par la grâce de la cuisine. Non seulement,
au nom de son engagement à nourrir l’équipage, il impose à Till
son autorité en imposant cette razzia du la ferme, mais ensuite, de
son propre chef, il organise la célébration de sa victoire en une
fête de cuisine.
« Demain,
tous ensemble, chez Lamme, on dîne. »
Oui,
poursuit Lucien l’âne, on est loin du Lamme, pleutre et
pleurnichard, qu’on a connu au début de la Geste. Voyons ça et
puis, tissons le linceul de ce vieux monde lâche, pleutre, traître,
veule, félon et cacochyme.
Heureusement !
Ainsi
Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
« Silence
les Gueux ! Sans parler, sans chanter,
Sans
bruit, filons tout droit à l’étoile. »
Les
fins patins de fer griffent la glace.
« Qui
tombe se relève !, dit Till. Venez ! »
Pas
une ombre humaine sur le sol gelé,
Pas
un oiseau ne frémit dans l’air léger,
« Les
chiens de la ferme ont aboyé.
Déchaussez
vos patins, on est arrivés. »
Till
frappe le portail du grand heurtoir,
À
l’étage, une fenêtre s’ouvre dans le noir.
« Qui
va là ? », « Messager d’Albe ».
La
porte s’ouvre. Vingt Gueux entrent.
Till
dit : « Slosse, traître batelier
Qui
en embuscade fit tomber
Dix-huit
Gueux, l’autre printemps,
Paie
à présent le prix du sang ! »
« Ô
Gueux ! Votre pitié, votre pardon !
Je
ne savais, j’ignorais
Le
sort qui les attendait. »
« Où
caches-tu le salaire de l’espion ? »
« Je
n’ai pas cet argent, je n’ai plus cet or. »
D’une
planche, un pot à fleurs tombe alors ;
Ducats
et florins roulent à terre en tintant fort.
« Tiens,
le voilà revenu, le trésor ! »
Et
Slosse tempête et hurle « Aux voleurs ! »
Valets
et servantes viennent au secours.
Les
Gueux garrottent les hommes en un tour ;
Les
femmes, en linge, sanglotent de peur.
Plus
tard, tous repartent vers les bateaux,
Poussant
les traîneaux chargés de tonneaux,
Pourchassant
par les cornes, par les naseaux,
Bœufs,
cochons, moutons, chevaux.
Mettez
les ceintures aux vaches et aux veaux,
Tirez
les poulies, hissez bien haut !
Les
pigeons dans les paniers roucoulent,
Dans
les cages, caquètent chapons et poules.
Dans
la cale, oies et poulardes seront mieux.
Je
suis le Maître Queux ! Vive les Gueux !
« Demain,
dit Lamme, sera musique de cuisine ;
Demain,
tous ensemble, chez Lamme, on dîne. »
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