mercredi 4 juillet 2018

Les Fiancés de Mai


Les Fiancés de Mai


Chanson française – Les Fiancés de Mai– Marco Valdo M.I. – 2018
Ulenspiegel le Gueux – 63
Opéra-récit en multiples épisodes, tiré du roman de Charles De Coster : La Légende et les aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d’Ulenspiegel et de Lamme Goedzak au Pays de Flandres et ailleurs (1867).
(Ulenspiegel – III, XXV)








Dialogue Maïeutique

Au commencement, il y avait Till et Philippe, disait l’autre chanson, commente Marco Valdo M.I., une chanson qui montrait la face sombre de la Légende. Ainsi, à l’opposé, il a une face claire de la Légende qui est faite des amours de Till et de Nelle ; c’est le fil de la vie qui se dénoue et qui illumine la Légende. Cependant, on l’avait un peu perdue de vue.

En effet, dit Lucien l’âne, on se perdrait un peu au travers de ces massacres et de ces assassinats et les bûchers de l’Inquisition catholique ne faisaient qu’assombrir le paysage. Mais je t’en prie, dis-moi, mon ami Marco Valdo M.I., ce qu’il en est des Fiancés de mai.

Les Fiancés de mai ?, sans doute, Lucien l’âne mon ami, en as-tu entendu parler autrefois lors de tes pérégrinations ; c’est un de ces rites paysans ou païens qui se perpétuent dans les régions où subsiste une certaine ruralité. Il s’agit d’assurer l’avenir. En fait, le mois de mai est lui-même chargé de cette énergie de renouveau, c’est le moment, dans nos régions, où le printemps s’affermit et où l’année entre dans sa plus lumineuse saison. C’est aussi le moment des accordailles qui se font pour donner naissance au printemps suivant ; c’est le moment le plus propice pour faire bénéficier la génération des meilleures conditions de vie. Comme tu le sais, pour faire naître au printemps suivant, il faut s’y prendre à temps… 

Soit, dit Lucien l’âne, en voilà assez pour les considérations générales et en quelque sorte, anthropologiques ou sociologiques de la gloire de mai. Et si je ne t’interrompais pas, il y a de forte chance que j’aurais vu venir la légende du Joli Mois de mai, du bois de Chaville et Mai, mai, mai, du temps des barricades. Mais justement, j’aimerais mieux en savoir plus sur la chanson elle-même.


Certainement, Lucien l’âne mon ami. Tu as certainement raison de mettre le holà à mes débordements ethnologiques et de me ramener à ce qui doit être dit. Dans les faits, il s’agit de rappeler que Nelle existe, que pour elle, en l’absence de Till, la vie continue et qu’il faut qu’elle reste à la maison pour prendre soin de Katheline que la torture a rendu folle. Ce n’est pas un rappel anodin que celui-ci qui met en avant la nécessité de la solidarité et de la protection des plus faibles. Mais, mais, mais, Nelle est sollicitée par toute la société de Damme pour rentrer dans le giron commun, se laisser engluer dans le conservatisme social et ses figures rituelles et par cela, abandonner Till et son combat pour la liberté et l’indépendance de la pensée et de l’être. Ce que Nelle se refuse à faire ; pour elle, c’est aussi et hautement, l’affirmation de son individualité et de son droit à la rêverie et à la poésie. Voilà ce que raconte la chanson. Pour les détails et l’anecdote, il suffit de se référer au texte.

Je m’empresse de le faire et de reprendre notre tâche qui consiste à tisser le linceul de ce vieux monde engluant, conservateur, socialisant, enrégimentant, banalisant et cacochyme.


Heureusement !

Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane



En ce temps-là, Till vaguait au lointain
Pour défendre la liberté
Et les dames de Damme, un matin
Nelle viennent trouver.

Nelle, disent-elles, tu es celle
Qui de mai est la fiancée
Par tous les gars désignée
Pour te cacher dans les roseaux et les prêles.

Je vous remercie, mes sœurs,
Dit Nelle, souriante et confuse,
C’est un grand honneur,
Mais il faut que je refuse.

Nelle si fraîche, si sage, si belle,
Tous les garçons rêvent de celle
À la beauté si fière,
Que les commères disent œuvre de sorcière.

Si vous accusez Katheline de ce délit,
Vous êtes lâches, médisantes et bêtes.
La justice des hommes lui a brûlé la tête ;
Avec la fumée, s’en est allé son esprit.

« Ôtez le feu ! », il reviendra !
Accroupie dans son coin,
Katheline geint.
« Ôtez le feu ! », il reviendra !

Dans les hautes herbes, les fiancés de mai
Se dissimulent sans peine.
Celui qui trouvera celle-ci sera roi ;
Celle qui trouvera celui-là sera reine.

Et Nelle entend les cris de joie,
Et Nelle écoute la lointaine voix.
Commères, dit Nelle, mon cœur n’est pas ici,
Il vague au loin avec mon ami.

Mon ami Till, le libre esprit
Qui marche de pays en pays,
Semant partout les pépins de liberté
Qui poussent et repoussent dans l’éternité.

Nelle songe au doux temps
Où ardemment, elle cherchait
Dans les prêles, le fiancé de mai
Et trouvait Till son galant.

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