Le Troupeau nu
Chanson
française – Le troupeau nu – Marco
Valdo M.I. – 2018
Ulenspiegel le Gueux – 55
Opéra-récit en multiples épisodes, tiré du roman de Charles De Coster : La Légende et les aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d’Ulenspiegel et de Lamme Goedzak au Pays de Flandres et ailleurs (1867).
(Ulenspiegel – III, XVI)
Ulenspiegel le Gueux – 55
Opéra-récit en multiples épisodes, tiré du roman de Charles De Coster : La Légende et les aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d’Ulenspiegel et de Lamme Goedzak au Pays de Flandres et ailleurs (1867).
(Ulenspiegel – III, XVI)
Et
donc,
Lucien l’âne mon ami, Till
s’en allait par tous les lieux de terre porter aux gueux
clandestins qui chantent le chant du coq le chant de l’alouette qui
dit que la guerre s’en va sur la mer et l’océan et que tous se
portent là-bas en Zélande au nid des Gueux de Mer.
Dans
les champs de France, Till tournoyait au cœur de l’hiver ; il
cherchait la route de Meuse qui s’en va vers Maastricht. Sur la
neige, il vaguait ainsi armé de sa bonne arquebuse.
Ainsi
va Till, dit Lucien l’âne malicieusement rieur.
Oui,
reprend Marco Valdo M.I., ainsi va Till par les champs et les orées
des forêts d’Ardenne. Il fuit les loups qui le suivent à la
trace ; il doit en tuer un pour décourager les autres qui le
serrent de trop près. Entretemps,
le soleil s’était caché dans les brumes et en ce dimanche, à
l’heure de la grand-messe, au bout de la prairie toute de gris et
de blanc vêtue, sous la lueur pâle de la neige, Till distingue une
cohorte fantomatique. C’est un troupeau d’hommes nus guidés au
fouet par des gardians espagnols. Till planqué dans un bosquet
élimine les soldats et emmène les prisonniers, qui se révélaient
être des hommes de la même armée et du même régiment que lui, à
la bonne ville de Mézières.
Que
voilà-t-il pas un Till héroïque, dit Lucien l’âne.
Que
nenni, réplique Marco Valdo M.I. ; il ne fait que ce que lui
inspire sa conscience. Ensuite, avant son départ, Till laisse aux
hommes l’or des Espagnols et le fruit de la vente des chevaux et
sans en tirer nulle gloriole, il reprend sa route de Meuse.
Ah,
dit Lucien l’âne, les routes sont parsemées d’embûches et Till
s’y entend pour les éviter, les contourner ou les réduire à
néant.
Certes,
dit Marco Valdo M.I., c’est un exemple pour tous ceux qui partagent
le goût de liberté et la tranquillité de l’esprit.
Ainsi,
conclut Lucien l’âne, tissons le linceul de ce vieux monde
tricheur, menteur, flou, bluffeur, vantard, absurde et cacochyme.
Heureusement !
Ainsi
Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
Vêtu
d’un mantelet en loques,
D’un
pourpoint en guenilles,
D’un
haut-de-chausses à la mode de Séville
Une
plume flottant sur sa toque,
Son
arquebuse à la main,
L’épée
arrimée à la hanche,
Till
s’en va bon train
Vers
l’est, un dimanche.
Au-delà
du talus, la neige empile
Les
flocons sur la plaine toute pâle,
Un
grand vent ronfle ;
En
tourbillons geignent les rafales.
Trois
loups prennent sa trace.
Till
de sa bonne arquebuse tire
Et
d’un coup abat le premier sur place.
Les
autres s’arrêtent pour le secourir.
Soulagé,
Till reprend son chemin.
Au
bout de la plaine, il voit des points,
De
grises statues dans le brouillard.
Derrière
avancent deux hautes formes noires.
Le
vent lui dit un long murmure,
Des
pleurs, des plaintes lugubres.
Peut-être
des pèlerins chantant,
Allant
dans la neige en habits blancs ?
De
plus près, il les voit
Vieux,
jeunes hommes nus trébuchant
Et
les deux cavaliers, noirs harnas
Sur
leurs destriers trop grands.
Ces
deux caballeros silencieux
Poussent
lentement devant eux,
Comme
des gardians, des taureaux,
À
coups de fouet, ce pauvre troupeau.
L’arquebuse
fait son œuvre encore
Et
délivre les rebelles prisonniers,
Faute
de payer rançon, d’avance, condamnés
À
la torture, aux galères, à la mort.
Rendus
à Mézières,
Les
rescapés reçoivent soupe et bière,
Abri,
habits aux frais de la commune
Et
Till reprend sa route à la brune.
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