mercredi 7 octobre 2015

Coupez les pieds !


Coupez les pieds !

Chanson française – Coupez les pieds ! – Marco Valdo M.I. – 2015


Ulenspiegel le Gueux – 5

Opéra-récit en multiples épisodes, tiré du roman de Charles De Coster : La Légende et les aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d’Ulenspiegel et de Lamme Goedzak au Pays de Flandres et ailleurs (1867).


JUSTE POUR MONTRER DE QUOI IL S'AGIT...



Quelle horreur encore me contes-tu, Marco Valdo M.I. mon ami ? Mais qui donc pousse de tels hurlements et pour quelle raison et pour quel supplice ?


Ah, Lucien l'âne mon ami, il s'agit bien de ça. D'un supplice à la raison insignifiante. Et le condamné, les pieds brûlés sous la torture est mené clopin-clopant dans un nid de flammes. Quant à la raison de pareille déraison, on la connaît : les moines ne voulaient pas payer un sculpteur de son travail – une statue de la Madone que ces va-nu-pieds avaient commandée. Alors, l'artiste avait d'un coup de son ciseau, défiguré la Vierge qu'il venait de terminer. Ils le dénoncèrent comme iconoclaste ; après l'avoir copieusement torturé comme il est d'usage dans les tribunaux de la répression catholique – pour faire avouer le condamné ou que sais-je, on lui brûle la plante des pieds avant de le faire aller à pieds à sa mort.


On comprend qu'il hurle : « Coupez les pieds ! » ; il parle des siens. Quelle horreur ! Et quelle considération voudrait-on qu'on ait pour cette catholicité, capable de telles atrocités ?


Et puis, Lucien l'âne mon ami, là ne s'arrête pas cette paradisiaque cruauté. On lie ce brave sculpteur – comme fit Philippe de la Guenon Hérétique  – à un poteau placé au milieu du cercle de feu fait de bottes de paille et de fascines croisées… Sa mort est certaine. Il ne peut s'échapper. Il tire sur sa chaîne pour y échapper, mais sa mort en est juste ralentie – il n'en criera que plus longtemps et comme il est dit dans la chanson, Philippe aime beaucoup cette musique, ce chant de l'hérétique.


Oh, Marco Valdo M.I. mon ami, combien cruel et délirant est ce prince qui tolère, qui encourage de pareilles insanités.


Et puis, je n'en ai encore rien dit, mais comme souvent dans les récits de Charles De Coster (comme on sait, ce roman est composé d'une série de courts récits qui se suivent, sans nécessairement avoir un lien direct entre eux), il y a une sorte de contre-chant, une histoire parallèle où en réponse à l'agonie de l'iconoclaste, une autre agonie déroule son film. C'est l'agonie de la reine Marie que tous, et en premier lieu, son mari Philippe le sadique, et même jusqu'à sa suivante, son amie, chargée de veiller sur elle, la duchesse d'Albe, tous abandonnent pour aller assister au spectacle de l'homme incendié. Curieux divertissement…


C'est pire que ce que je n'aurais jamais osé imaginer.


Lucien l'âne mon ami, laisse-moi t'interrompre une dernière fois, pour te dire que ce genre de spectacle… sur certains écrans des jours d'à présent, on peut en voir tout autant ; d'autres gens recommencent à croire aux vertus de l'horreur. Ainsi s'en va le monde : d'un pouvoir l'autre, d'une religion l'autre, d'un fanatisme l'autre…


Marco Valdo M.I. mon ami, tu avais bien raison avec ton antienne : « Fanatiques de tous les pays (et j'ajoute : de tous les temps), calmez-vous ! ». Malheureusement, ils sont durs de la comprenure, ces gens-là. Et puis, comment les rendre intelligents ? Comme disait Tonton Georges : « Le Temps ne fait rien à l'affaire » Enfin, reprenons notre tâche et tissons le suaire de ce vieux monde sadique, religieux, brutal, imbécile et cacochyme.


Heureusement !


Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane



Coupez les pieds ! Coupez les pieds !
Philippe entendait fort bien crier ;
Il aimait beaucoup cette musique ;
Pour lui, c'était le chant de l'hérétique.

Le sculpteur aux pieds brûlants
Hurlait encore au milieu des flammes.
Dans les douleurs de l'enfer le voyant
Grâce ! criaient les bonnes dames.

Et pendant ce temps-là, la reine Marie
Suait, frissonnait sur le sol, glacée.
Sentant venir sa mort et s'en aller sa vie,
La mère de Don Carlos pleurait désespérée.

Coupez les pieds ! Coupez les pieds !
Un chien aboie à la mort, pensait la reine.
Le sculpteur, fier encore, tirait sur sa chaîne.
Il se mourut soudain, asphyxié.

La reine Marie périt dans le vacarme
De ce sculpteur qu'on assassine.
Suivant la prédiction de Katheline,
Philippe semait la mort, le sang et les larmes.



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