Coupez
les pieds !
Chanson
française – Coupez les pieds ! – Marco Valdo M.I. – 2015
Ulenspiegel
le Gueux – 5
Opéra-récit
en multiples épisodes, tiré du roman de Charles De Coster : La
Légende et les aventures héroïques, joyeuses et glorieuses
d’Ulenspiegel et de Lamme Goedzak au Pays de Flandres et ailleurs
(1867).
JUSTE POUR MONTRER DE QUOI IL S'AGIT... |
Quelle horreur encore me contes-tu, Marco Valdo M.I. mon ami ? Mais qui donc pousse de tels hurlements et pour quelle raison et pour quel supplice ?
Ah,
Lucien l'âne mon ami, il s'agit bien de ça. D'un supplice à la
raison insignifiante. Et le condamné, les pieds brûlés sous la
torture est mené clopin-clopant dans un nid de flammes. Quant à la
raison de pareille déraison, on la connaît : les moines ne
voulaient pas payer un sculpteur de son travail – une statue de la
Madone que ces va-nu-pieds avaient commandée. Alors, l'artiste avait
d'un coup de son ciseau, défiguré la Vierge qu'il venait de
terminer. Ils le dénoncèrent comme iconoclaste ; après
l'avoir copieusement torturé comme il est d'usage dans les tribunaux
de la répression catholique – pour faire avouer le condamné ou
que sais-je, on lui brûle la plante des pieds avant de le faire
aller à pieds à sa mort.
On
comprend qu'il hurle : « Coupez les pieds ! » ;
il parle des siens. Quelle horreur ! Et quelle considération
voudrait-on qu'on ait pour cette catholicité, capable de telles
atrocités ?
Et
puis, Lucien l'âne mon ami, là ne s'arrête pas cette paradisiaque
cruauté. On lie ce brave sculpteur – comme fit Philippe de la
Guenon
Hérétique – à un poteau placé au milieu du cercle de feu fait
de bottes de paille et de fascines croisées…
Sa mort est certaine. Il ne peut s'échapper. Il tire sur sa chaîne
pour y échapper, mais sa
mort en est
juste ralentie
– il n'en criera que plus longtemps
et comme il est dit dans la chanson, Philippe aime beaucoup cette
musique, ce chant de l'hérétique.
Oh,
Marco Valdo M.I. mon ami, combien cruel et délirant est ce prince
qui tolère, qui encourage de pareilles insanités.
Et
puis, je n'en ai encore rien dit, mais comme souvent dans les récits
de Charles De Coster (comme on sait, ce roman est composé d'une
série de courts récits qui
se suivent, sans nécessairement avoir un lien direct
entre eux), il y a une sorte de contre-chant, une histoire parallèle
où en réponse à l'agonie de l'iconoclaste, une autre agonie
déroule son film. C'est l'agonie de la reine Marie que tous, et en
premier lieu,
son
mari Philippe le sadique, et même jusqu'à sa suivante, son amie,
chargée de veiller sur elle, la duchesse d'Albe, tous
abandonnent
pour aller assister au spectacle de l'homme incendié. Curieux
divertissement…
C'est
pire que ce que je n'aurais jamais osé imaginer.
Lucien
l'âne mon ami, laisse-moi t'interrompre une dernière fois, pour te
dire que ce genre de spectacle… sur certains écrans des jours d'à
présent, on peut en voir tout autant ; d'autres gens
recommencent à croire aux vertus de l'horreur. Ainsi s'en va le
monde : d'un pouvoir l'autre, d'une religion l'autre, d'un
fanatisme l'autre…
Marco
Valdo M.I. mon ami, tu avais bien raison avec ton antienne :
« Fanatiques de tous les pays (et j'ajoute : de tous les
temps), calmez-vous ! ». Malheureusement, ils sont durs de
la comprenure, ces gens-là. Et
puis, comment les rendre intelligents ?
Comme
disait Tonton Georges : « Le
Temps ne fait rien à l'affaire »
Enfin,
reprenons notre tâche et tissons le suaire de ce
vieux monde sadique, religieux, brutal, imbécile et
cacochyme.
Heureusement !
Ainsi
Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
Coupez
les pieds ! Coupez les pieds !
Philippe
entendait fort bien crier ;
Il
aimait beaucoup cette musique ;
Pour
lui, c'était le chant de l'hérétique.
Le
sculpteur aux pieds brûlants
Hurlait
encore au milieu des flammes.
Dans
les douleurs de l'enfer le voyant
Grâce !
criaient les bonnes dames.
Et
pendant ce temps-là, la reine Marie
Suait,
frissonnait sur le sol, glacée.
Sentant
venir sa mort et s'en aller sa vie,
La
mère de Don Carlos pleurait désespérée.
Coupez
les pieds ! Coupez les pieds !
Un
chien aboie à la mort, pensait la reine.
Le
sculpteur, fier encore, tirait sur sa chaîne.
Il
se mourut soudain, asphyxié.
La
reine Marie périt dans le vacarme
De
ce sculpteur qu'on assassine.
Suivant
la prédiction de Katheline,
Philippe
semait la mort, le sang et les larmes.
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