mercredi 30 décembre 2015

Le Bulletin De Santé


Le Bulletin De Santé

Chanson française – Le Bulletin De Santé – Georges Brassens – 1966



Ne dites pas: "C’est tonton Georges qui expire"



L’autre jour, mon cher Lucien l’âne, mon ami, j’avais proposé une chanson de Francesco Guccini, une chanson qui curieusement était absente du site des Chansons contre la Guerre… Enfin quand je dis curieusement, nous nous comprenons. Ça n’a rien d’étrange, car il y a beaucoup plus de chansons qui ne sont pas dans ce site que le contraire. Et puis, bien que ce site soit très mondial, il n’en est pas pour autant une multinationale et c’est déjà « extraordinaire » (au sans premier du terme : qui sort de l’ordinaire) qu’un tel site existe et perdure ; et encore plus quand on sait qu’il est fait par des bénévoles et qu’il est le fait d’une petite équipe héroïque, essentiellement italienne.

J’opine, dit Lucien l’âne en riant. J’opine complètement, car moi aussi, je suis très admiratif de ce qui est fait par l’ « Antiwarsongs staff ». Et comme la chanson s’intitule « Le Bulletin de Santé », j’en profite pour dire qu’il me semble en tant qu’âne que le site se porte bien. Ce qui me réjouit hautement.

Je reprends à partir de la canzone de Francesco Guccini qui disait : « J’ai encore la force », mais en italien : « Ho ancora la forza » [[51228]]. Dans notre dialogue quasi-socratique, façon de parler, j’avais évoqué cette chanson de Tonton Georges. Parenthèse : c’est dans cette chanson-ci qu’il (Georges Brassens) se désigne lui-même par cette locution : « Tonton Georges ». Je cite le quatrain :

« Et si vous entendez sourdre, à travers les plinthes
Du boudoir de ces dames, des râles et des plaintes,
Ne dites pas : « C’est tonton Georges qui expire »,
Ce sont tout simplement les anges qui soupirent. »


À elle seule, cette citation valait d’insérer la chanson. Et tant qu’on y est, outre tout ce qui fut dit à propos de celle de Guccini, raisons sur lesquelles on peut revenir, n’aurais-tu pas une bonne raison pour justifier la présence de cette chanson dans les Chansons contre la Guerre ?


Eh bien, si. J’en ai une et elle figure dans le texte de la chanson elle-même.
« Et si vous entendez crier comme en quatorze :
« Debout ! Debout les morts ! », ne bombez pas le torse,
C’est l’épouse exaltée d’un rédacteur en chef
Qui m’incite à monter à l’assaut derechef. »

Voici donc un passage où il est nettement question de guerre et de la façon qu’ont les « bonobos » d’en sortir.


D’accord, dit l’âne Lucien en se trémoussant de rire. Fameuse manière que celle des bonobos de mettre fin aux conflits. D’ailleurs, elle est souvent utilisée dans les ménages ; et même, chez les ânes et les ânesses, je l’admets. Cependant, je ris, car j’ai soudain la vision d’une partouze mondiale pour mettre fin à la guerre. Il faudrait qu’on se dépêche, car comme ce sera déjà bien compliqué à sept milliards, que sera-ce demain, à neuf milliards ? Je n’ose imaginer plus tard encore au temps du « only stand up » imaginé par un démographe statisticien. Et si en plus, on crie « Debout ! Debout les morts ! ». Ah, vous les humains, vous me faites bien rire.


Tu ris, tu ris, mais c’est ce qui est prévu lors du Jugement Dernier… Tout le monde est réveillé. Imagine le mari assassin se retrouvant en présence de sa femme et de sa maîtresse ou de ses femmes et de ses maîtresses. Fameux jugement en perspective. Allons, Lucien l’âne, pense un instant à Ménélas retrouvant Hélène et Pâris ou à Henry VIII, ses épouses avec ou sans tête…


Et ce pauvre Landru… Comment s’en sortira-t-il, ce vieux séducteur tout feu tout flamme ? Mais tout ça, nous éloigne de la chanson. Que raconte-t-elle vraiment ?



Oh, l’affaire est simple. La presse (en 1965, par là) avait remarqué que Tonton Georges avait subitement maigri et avait lancé la rumeur qu’il souffrait d’un mal incurable qui devait l’emporter rapidement. Il le rejoindra, mais quinze ans plus tard. Et Tonton Georges de répliquer par cette chanson. Sur un mode où l’acide ironique coule à gros bouillons et tant qu’à prouver sa santé autant le faire avec virilité – dérision de la dérision. Pour le reste, comprenne qui pourra.



On y pourvoira, dit Lucien l’âne en balançant des épaules. En attendant, reprenons notre tâche et tissons le linceul de ce vieux monde cancanier, malveillant, rancunier et cacochyme.



Heureusement !



Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane




J’ai perdu mes bajoues, j’ai perdu ma bedaine,
Et, ce, d’une façon si nette, si soudaine,
Qu’on me suppose un mal qui ne pardonne pas,
Qui se rit d’Esculape et le laisse baba.

Le monstre du Loch Ness ne faisant plus recette,
Durant les moments creux dans certaines gazettes,
Systématiquement, les nécrologues jouent
À me mettre au linceul sous des feuilles de chou.

Or, lassé de servir de tête de massacre,
Des contes à mourir debout qu’on me consacre,
Moi qui me porte bien, qui respire la santé,
Je m’avance et je crie toute la vérité.

Toute la vérité, messieurs, je vous la livre :
Si j’ai quitté les rangs des plus de deux cents livres,
C’est la faute à Mimi, à Lisette, à Ninon,
Et bien d’autres, je n’ai pas la mémoire des noms.

Si j’ai trahi les gros, les joufflus, les obèses,
C’est que je baise, que je baise, que je baise
Comme un bouc, un bélier, une bête, une brute,
Je suis hanté : le rut, le rut, le rut, le rut !

Qu’on me comprenne bien, j’ai l’âme du satyre
Et son comportement, mais ça ne veut point dire
Que j’en ai le talent, le génie, loin s’en faut !
Pas une seule encore ne m’a crié « bravo ! »

Entre autres fines fleurs, je compte, sur ma liste
Rose, un bon nombre de femmes de journalistes
Qui, me pensant fichu, mettent toute leur foi
À me donner du bonheur une dernière fois.

C’est beau, c’est généreux, c’est grand, c’est magnifique !
Et, dans les positions les plus pornographiques,
Je leur rends les honneurs à fesses rabattues
Sur des tas de bouillons, des paquets d’invendus.

Et voilà ce qui fait que, quand vos légitimes
Montrent leurs fesses au peuple ainsi qu’à vos intimes,
On peut souvent y lire, imprimés à l’envers,
Les échos, les petits potins, les faits divers.

Et si vous entendez sourdre, à travers les plinthes
Du boudoir de ces dames, des râles et des plaintes,
Ne dites pas: "C’est tonton Georges qui expire",
Ce sont tout simplement les anges qui soupirent.

Et si vous entendez crier comme en quatorze:
« Debout ! Debout les morts ! », ne bombez pas le torse,
C’est l’épouse exaltée d’un rédacteur en chef
Qui m’incite à monter à l’assaut derechef.

Certes, il m’arrive bien, revers de la médaille,
De laisser quelquefois des plumes à la bataille…
Hippocrate dit: « Oui, c’est des crêtes de coq »,
Et Gallien répond « Non, c’est des gonocoques… »

Tous les deux ont raison. Vénus parfois vous donne
De méchants coups de pied qu’un bon chrétien pardonne,
Car, s’ils causent du tort aux attributs virils,
Ils mettent rarement l’existence en péril.

Eh bien, oui, j’ai tout ça, rançon de mes fredaines.
La barque pour Cythère est mise en quarantaine.
Mais je n’ai pas encore, non, non, non, trois fois non,
Ce mal mystérieux dont on cache le nom.

Si j’ai trahi les gros, les joufflus, les obèses,
C’est que je baise, que je baise, que je baise
Comme un bouc, un bélier, une bête, une brute,
Je suis hanté : le rut, le rut, le rut, le rut !

Noël est à nous

Noël est à nous

(Cantate de Noël – Chant du solstice d’hiver)

Chanson de langue française – Noël est à nous (Cantate de Noël – Chant du solstice d’hiver) – Marco Valdo M.I. – 2012



Noël, c’est le Nouvel an de chez nous
Au solstice, la nuit rebrousse chemin





Oh, Marco Valdo M.I. mon ami, voilà-t-il pas que tu chantes Noël à présent… Tu te mets à composer des cantates… J’en suis bien surpris…

Allons, Lucien l’âne mon ami, toi qui circules partout depuis si longtemps, que peux-tu bien trouver de si surprenant à ce que je fasse une cantate sur le thème de Noël. Nous sommes à la fin décembre, que je sache. C’est le début de l’hiver, c’est le moment où les jours sont les plus courts, la nuit la plus longue et où tout va basculer insensiblement. On fête ça depuis toujours ici, aussi loin que tu remontes dans le temps et dans des temps prébibliques, du temps de ces préadamites dont parlait le Duc d’Auge à son chapelain.


Ah, dit l’âne Lucien un peu interloqué. Tu connais aussi le Duc d’Auge et son chapelain… Tu m’en vois fort surpris. Je les avais accompagnés dans le temps entre Lascaux et Altamira où le Duc faisait découvrir à son chapelain les peintures rupestres datant d’avant la création de l’homme selon la Bible. Le chapelain ne savait plus où il en était avec son Paradis et son Enfer, avec son Adam et sa côtelette. Et en effet, le Duc aimait beaucoup évoquer les Préadamites et cela faisait enrager le chapelain. Mais au fait, peut-être, connais-tu Cidrolin ?


Évidemment, mon ami Lucien l’âne. Je connais bien le dénommé Cidrolin et son goût prononcé pour l’essence de fenouil à l’eau plate. Mais, excuse-moi, ce n’est pas le sujet de la chanson. J’y viens donc. Ce n’est pas que j’aie l’instinct propriétaire, ni le goût de l’accaparement, mais j’aime la vérité et je n’aime pas que l’on trompe sciemment les gens. La chose me fâche et d’autant plus, si elle dure longtemps. Et la vérité ici, c’est qu’il y a eu une manipulation du calendrier pour déplacer la grande fête hivernale qui en bonne logique coïncide avec le solstice afin d’en faire une fête de propagande religieuse.


Ah, dit l’âne Lucien un peu interloqué. Tu serais donc fâché…


Et comment donc Ça fait près de deux mille ans que ça dure et je dis assez, basta ! Je dis assez de clowneries, assez de menteries, assez de mensonges, halte à l’escroquerie. Halte au vol de Noël par certaine confrérie ecclésiastique. Ces gens se sont emparé de Noël pour en faire leurs choux gras, ils l’ont détourné de son sens originel pour remplir leurs chapelles et meubler leurs discours de réclame religieuse. Mais, Lucien mon ami l’âne, toi qui viens des temps anciens, tu le sais bien que Noël est une fête populaire, une fête pour tout dire, laïque – de laios qui en grec doit bien vouloir dire le peuple, les gens. Noël n’a que faire de l’Orient, Noël n’est pas né en Palestine, c’est évident. Il fallait être assez au Nord pour imaginer le sapin, la neige et vénérer le solstice pareillement. Avant même l’arrivée des Romains (disons même clairement l’invasion), les druides – saints hommes de ce moment – coupaient le gui, coupaient le houx et bien entendu, fêtaient Noël en Finlande comme dans le Morbihan. Telle était l’Europe, à ce moment ; telles sont ses racines. Il est temps de remettre les pendules à l’heure, crois-moi.


Certes, et je me souviens qu’en Gaule et bien avant qu’elle ne s’appelle ainsi, du temps de Cro-Magnon, à Lascaux, à Altamira, on fêtait Noël, on se rassemblait, on faisait un grand festin autour d’un feu de bois et chacun apportait un cadeau, généralement de la nourriture, car c’était ce qu’il y avait de plus précieux au milieu de l’hiver. Pour la viande et le poisson, c’était assez facile de s’en procurer… Mais les légumes et les fruits, enfin tout ce qui pouvait accompagner ce morceau de renne, de caribou, d’auroch, de volatile ou de poisson, tout cela était chose rare, précieuse, car on était au moment de plus grande pénurie. On chantait, on se regroupait, on se rassurait. C’est ainsi que, plus tard, quand il y eut des maisons, des cabanes, des habitations, les animaux domestiques furent les bienvenus ;d’ailleurs, ils vivaient dans le même habitat et souvent, comme des radiateurs, tenaient les gens au chaud. C’est ainsi que j’ai souvent passé des nuits avec la vache auprès de la litière où la famille mettait à dormir le petit enfant. C’était la coutume chez les paysans. Quant au Père Noël et aux rennes tractant son traîneau dans le ciel, c’est pure allégorie… Cependant, une chose est sûre, il n’y eut jamais de rennes au Moyen-Orient… Dès lors, tu as raison, Noël est bien une invention d’ici, une coutume de nos pays où l’hiver est rude, les jours très courts et les nuits très longues. Mais quand même, pour ne pas le laisser filer, pour le reprendre aux imposteurs, pour nous le réapproprier, chantons Noël et son beau sapin, son Père Noël, son traîneau et ses rennes; si on peut faisons un festin et offrons des cadeaux (oh, modestes, sûrement modestes) et tissons le linceul de ce vieux monde croyant, crédule, dupé et cacochyme.

Heureusement !


Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane

  


C’est la Noël, c’est la Noël
Chantons Noël à pleine voix
C’est la Noël, c’est la Noël
Chantons Noël et reprenons nos droits
Noël est à nous, Noël est à nous
Noël, c’est le nouvel an de chez nous

Noël, c’est ici qu’on l’a inventé
Noël n’est pas ce spectacle importé
De je ne sais quel Orient
Il y a à peine deux mille ans
Par je ne sais quels propagandistes
D’un consortium monothéiste
Ils ont occulté le solstice, ils ont déplacé le nouvel an
Ils ont tout pris : l’âne, le bœuf, la mère et l’enfant
On ne peut laisser notre Noël à ces gens.
Ils nous racontent des fables, un vrai roman
Des récits de déserts, des légendes de pêcheurs,
Des histoires de foi, des contes d’aviateur.
Avec leurs évangiles et leurs croix
Ils ont massacré le monde à tour de bras

C’est la Noël, c’est la Noël
Chantons Noël à pleine voix
C’est la Noël, c’est la Noël
Chantons Noël et reprenons nos droits
Noël est à nous, Noël est à nous
Noël, c’est le nouvel an de chez nous

C’est l’an qui finit, c’est l’an qui commence
Le bébé dans la litière animale
Au milieu de la pièce familiale
C’est l’an qui finit, c’est l’an qui commence
En dépit des homélies de leurs prêtres
Noël est à Cro-Magnon et à nos autres ancêtres
À ces gens-là qui dans des grottes affrontaient le froid
Il y a dix mille ans et plus et qui fêtaient Noël dans nos bois
Et la verdeur du sapin dans les frimas
Noël est à nous autres, ça ne se discute pas
Noël, c’est le tournant des jours
Ici, depuis toujours
À Noël, la nuit rebrousse chemin
À Noël, avance le matin

C’est la Noël, c’est la Noël
Chantons Noël à pleine voix
C’est la Noël, c’est la Noël
Chantons Noël et reprenons nos droits
Noël est à nous, Noël est à nous
Noël, c’est le Nouvel an de chez nous
Au solstice, la nuit rebrousse chemin
Au solstice, avance le matin.




mardi 29 décembre 2015

J’AI ENCORE LA FORCE


J’AI ENCORE LA FORCE

Version française – J’AI ENCORE LA FORCE – Marco Valdo M.I. – 2015
Chanson italienne – Ho ancora la forza – Francesco Guccini – 2000

Interprètes : Francesco Guccini ; Luciano Ligabue





J’ai encore la force de marcher...




Lucien l’âne mon ami, comme tu le vois, cette chanson s’intitule : « J’AI ENCORE LA FORCE ». Elle est de Francesco Guccini.

Quand il l’a écrite, j’imagine qu’il devait se dire : « Je voudrais par cette chanson, rassurer les amis.

Sans doute ; mais, je vois à ton œil frétillant, que tu te dis que je devrais avoir le même désir. Et après tout, pourquoi pas ? Je serais en bonne compagnie avec rien moins que Guccini, Brassens, Rutebeuf et Ferré. Le premier pour cette canzone-ci  - en italien, « Ho ancora la forza » (2000) ; le deuxième, pour sa chanson « Le bulletin de santé » (1966) et le troisième et le quatrième, ensemble, pour la complainte de Rutebeuf, intitulée : Pauvre Rutebeuf (1955). Au passage, je signale que si Rutebeuf, dans ses Poèmes de l’Infortune, se lamentait de la disparition de ses amis, il est mort lui-même bien avant l’âge de la retraite.

Qu’a-t-elle à voir avec les chansons contre la guerre cette canzone ? Je ne pense pas que Guccini ait fait une chanson pour tel un Tartarin, se vanter d’avoir encore la force d’aller au combat.

Je le vois mal faire cela, en effet, dit Marco Valdo M.I. en éclatant de rire. Lucien l’âne mon ami, je te soupçonne très fort d’être un pince-sans-rire et de te moquer ou de Guccini (ce qui ne serait pas correct) ou de moi (ce qui peut être amusant).

Tu as bien résumé la situation, Marco Valdo M.I., mon ami. Sache que ça m’amuse beaucoup de plaisanter. Cependant, je n’ai du coup par la réponse à ma question : « Qu’a-t-elle à voir, etc ? » Si je te pose cette question, c’est pour satisfaire aux exigences du site, même si – comme toi – je pense que toute chanson, pour autant qu’elle soit bonne est une chanson contre la guerre, spécialement si elle n’en parle pas. Et bien évidemment, si je te le demande, c’est qu’en apparence, celle-ci ne comporte pas d’expression directe qui se réfèrent à la guerre.

Je te ferai une réponse en deux temps. D’abord, figurent dans ces Chansons contre la Guerre un tas de chansons qui – en apparence – ne parlent pas de la guerre. Ensuite, tout dépend de la conception qu’on a de la guerre. La Guerre de Cent Mille Ans dans laquelle vivent toutes nos sociétés humaines est en œuvre aussi en dehors de champs de bataille. Elle passe tout au travers de la société et tout au travers du temps. Elle touche chacun en permanence. Et, vois comme on se rapproche du thème de la chanson de Guccini, dans ce continuel affrontement, elle écrase les êtres humains et il suffit de faire un peu attention pour voir qu’une grande (très grande, la plus grande) partie d’entre eux est sont « usés avant l’âge ». Avant, les vieux avaient cinquante-cinq – soixante ans ; ils se tenaient comme les vieux de Brel. Maintenant que les vieux vieillissent plus tard, ce n’est plus la même chanson. Il suffit de réfléchir un instant à la manière dont on essaye de retarder l’âge de la retraite, car – dit-on – les pensionnés (ceux qui survivent) vivent trop longtemps sans travailler. En clair, sans être encore « taillables et corvéables ».

Mais c’est dans l’air du temps : les vieux survivants coûtent trop cher ; en clair, ils mettent à mal les caisses de pensions publiques (qu’il faudra – horreur ! – combler par l’impôt) et celles des sociétés d’assurances complémentaires, dont ces folles dépenses rabotent les profits.

Je ne peux m’empêcher de penser que quand on avait fixé l’âge de la retraite à (par exemple) 65 ans, on comptait bien que les retraités (la plupart) ne dépasseraient pas cet âge de beaucoup. Mauvais calcul ; surtout que cela ne va pas s’arranger ; c’est le triomphe de la médecine. Les vieux se portent mieux et comme Guccini, nombre d’entre eux disent : « J’AI ENCORE LA FORCE DE VIVRE ». Donc, maintenant qu’une part d’entre eux se portent mieux, on (les riches, les puissants et leur basse-cour) veut retarder l’échéance de la libération du travail. C’est ce combat caché que révèle la chanson de Francesco Guccini.

J’ai cependant la nette impression que ce n’est pas le cas de tous.

En fait, pour la plupart des gens – surtout les plus pauvres, même s’ils survivent, cette force-là, ils ne l’ont plus. On peut, on doit considérer cette chanson de Guccini comme celle d’un survivant qui aurait échappé au naufrage ou qui serait revenu vivant de la guerre ; un Chveik en pleine forme et qui chante sa fortune.

Je t’interromps, car tu te lances et on ne sait jamais où tu vas t'arrêter et il nous faut reprendre ici notre tâche et tisser le linceul de ce vieux monde cachottier, lamentable, menteur, tricheur et cacochyme.


Heureusement !


Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I.




J’ai encore la force de marcher,
De réagir pour ne pas me laisser aller.
J’ai encore cette force qui donne confiance
Quand on dit : « On commence ! »

J’ai encore la force de regarder alentour
Mêlant mes mots à deux paquets par jour,
D’aller là où on m’attend,
Toujours plein d’allant.

J’habite toujours chez moi
Dans cette rue qu’on ne reconnaît pas
Et je suis allé par le monde
Et du monde, je suis revenu vif encore.

J’ai encore la force d’être là racontant
Mes histoires de toujours et mes amours
Et mes erreurs que jour après jour
Pour d’étranges raisons, je vais répétant.

J’ai encore la force de ne pas me planquer,
De choisir ma vie en savourant chaque pas,
De compter les amis disparus et de marmonner
« Nous nous reverrons… », à part moi.

J’ai encore la force de choisir mes paroles
Par jeu, pour le goût de m’épancher
Car, que cela plaise ou non, il s’est trouvé
Que c’est ce que je sais faire.

J’habite toujours chez moi
Dans cette rue qu’on ne reconnaît pas
Et je suis allé par le monde
Et du monde, je suis revenu vif encore.

Et j'ai encore la force de demander pardon
Ou, la conscience offensée, d'encore fulminer
De vous dire ma partie de toute façonJe peux vous l'assurer



lundi 28 décembre 2015

CIRCUS LA PAUVRETÉ

CIRCUS LA PAUVRETÉ


Version française – CIRCUS LA PAUVRETÉ – Marco Valdo M.I. – 2015
Chanson italienne – Circus la pauvretéCasa Del Vento – 2001


Je me demande ce que demain on cherchera ;
Le train est passé et qui sait quand il reviendra.





















Comme dirait Marco Valdo, une chanson sur la guerre de 100, 1000 ans.

Vois-tu, Lucien l’âne mon ami, notre ami des Chansons contre la Guerre, DQ82, dit que cette chanson est une canzone sur la guerre de 100, 1000 ans. Et pourquoi pas ? Ce n’est pas faux. Il se peut qu’il y ait aussi des guerres de cent (100) ans (j’en connais au moins une), des guerres de mille (1000) ans et une telle chanson pourrait s’y référer.

Ah, dit Lucien l’âne en souriant, on dirait que cette idée de Guerre de Cent Mille Ans fait son petit bonhomme de chemin.

C’est vrai et j’en suis bien content. Cependant, la Guerre de Cent Mille Ans, telle que je l’avais imaginée, est une guerre un peu particulière, car c’est la Guerre qui contient à la fois les épisodes de guerre (militaire) et les épisodes intercalaires de paix (militaire) ; mais en plus, elle est bien plus vaste, car elle postule que la guerre militaire n’est qu’une des formes possibles de la guerre. C’est une modélisation d’une conception dont le fondement est que la guerre durera tant que les conditions qui la fondent se maintiendront. Le chiffre de Cent Mille Ans servait à montrer son ampleur par rapport à la durée de vie humaine ; c’est un nombre arbitraire qui veut signifier que cette guerre n’est pas un phénomène momentané (disons par exemple une guerre de cent ans pour fixer les frontières entre des États), mais un phénomène de l’évolution comme qui dirait, intrinsèque à l’espèce humaine. Cette Guerre de Cent Mille Ans est le résultat d’une aberration, d’un raté de l’évolution – au sens darwinien.

Je pense bien suivre ton idée, Marco Valdo M.I. mon ami, en disant que dans le domaine du spectacle, on parlerait d’une erreur de casting ou quelque chose du genre.

On peut en effet dire quelque chose du genre, même si ce n’est pas vraiment ça. L’essentiel pourrait bien être que d’une part, il faut tenir compte de sa longueur – qui balaye bien des illusions et d’autre part, de sa nature particulière. Elle est le résultat, lui-même évolutif, d’un processus – toujours en cours – de privatisation du monde, d’un processus d’accaparement par certains humains ou groupes d’humains de ce que l’ensemble de l’espèce produit dans sa relation avec la nature.

Alors, dit Lucien l’âne soudain pensif, le problème est donc de savoir comment l’espèce humaine va se sortir du piège de la richesse, dans lequel elle s’est elle-même enferrée.

Tu parles d’or, Lucien l’âne mon ami. Pour être plus net quant à la richesse (aux richesses…), on la définira comme : « ce que l’ensemble de l’espèce humaine produit ». Il faut également préciser ce qu’elle produit, à savoir : elle-même (des êtres humains), de la vie, des groupes, de l’organisation, des vivres, des objets, des soins, etc. C’est tout cela qu’ils accaparent et bien d’autres choses encore

Arrêtons là, si tu veux bien, car…

Arrêtons, arrêtons, on n’en finirait pas. Je veux juste ajouter ceci que la réflexion sur la nature de la guerre me paraît le sujet central des Chansons contre la Guerre. Cela dit, je n’en ferai pas un traité. D’ailleurs, ici, il se fait tout seul : chanson après chanson.

Admettons ; il doit bien y avoir du vrai dans tout ce que tu racontes, dit Lucien l’âne en agitant la queue. Reprenons notre tâche et tissons le linceul de ce vieux monde polémophile, belliqueux, guerroyant, malade de la richesse et cacochyme.


Heureusement !


Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane.



Il se fait, que le temps ne donne plus
Quelque chose de plus,
Quelque chose que nous n’avons pas là,
Qui ne suffira pas, qui ne durera pas,
Même pas pour celui qui l’a eu.

Je me demande ce que demain on trouvera ;
Le train est loin et qui sait quand il repassera.

Je sais que je ne trouverai pas
Une place pour moi
Il est déjà trop tard, si je le sais
Vraiment je pourrai ?
On verra ce qui va suivre
Le moyen de survivre.

Je me demande ce que demain on cherchera ;
Le train est passé et qui sait quand il reviendra.

Regarde combien nous sommes
Circus la pauvreté
J’imaginais être un homme
Dans cette pauvreté
Le chariot sait déjà
Avec qui il voyagera
Ne reviendra pas, n’échappera pas
À la pauvreté.

Ce qu’ensuite, il y aura
Celui qui nous avilira
Nous tenant dans la pauvreté
Qui nous achètera
Et nous liquidera
En tissant pour la disparité.

Pourquoi vous riez, il ne faut pas se moquer.
Le train ne passe pas et il n’entend pas passer.

Regarde combien nous sommes
Circus la pauvreté
J’imaginais être un homme
Dans cette pauvreté
Le chariot sait déjà
Avec qui il voyagera
Ne reviendra pas, n’échappera pas
À la pauvreté.

dimanche 27 décembre 2015

La Théière Céleste


La Théière Céleste

Chanson française – La Théière Céleste – Marco Valdo M.I. – 2015







La théière est irréfutable comme l'éléphant.
À la disparition du Soleil, elle nous sauvera, pourtant.







Voici, Lucien l’âne mon ami, l’histoire de la théière céleste.


Quoi ? De quoi tu me parles, Marco Valdo M.I., mon ami ? D’une théière céleste, et il faudrait y croire.


Bien évidemment qu’on doit y croire et qu’on ne saurait la nier sous peine de sévère réprobation. Mais je ne t’en veux pas de ta stupéfiante ignorance ; dans le fond, tu es un âne. Écoute bien, Lucien l’âne mon ami, la théière céleste est attestée par les plus grandes écritures, par les livres les plus saints, par les saints les plus ivres. Mordicus d’Athènes, philosophe éminent, inspirateur de l’école éthylique, l’attestait déjà de toute son autorité. T’ai-je dit que c’était une planète, du moins en apparence, mais c’est bien plus que ça. Elle date d’avant le big-bang et ce serait elle qui l’aurait provoqué en laissant couler sur le monde un peu de son thé sacré. Il nous faut donc assurément chanter sa gloire et c’est ce que fait cette chanson.


Cette théière céleste, dis-moi, d’où vient-elle ? Qui donc l’a inventée ? Où l’as-tu pêchée ?


Lucien l’âne mon ami, tu es trop perspicace. On ne saurait se gausser de toi. J’avoue : cette théorie n’est pas de moi, mais elle est l’œuvre d’un grand philosophe, d’un grand mathématicien et d’un grand pacifiste. Tu auras sans doute reconnu Bertrand Russell qui, dans un de ses ouvrages (Is there a god ? - 1952), se demandait en bonne logique – et il était logicien – pourquoi fallait-il que ce soient les sceptiques (entendons ici, les athées) qui prouvent l’inexistence de Dieu ou des Dieux. Il eut fallu d’abord en bonne logique assurer l’existence de Dieu ou des Dieux pour pouvoir aborder la question de leur existence ou de leur inexistence. Que penserait le Pape ou je ne sais quel grand croyant si par exemple, je lui demandais, si je lui enjoignais de prouver l’inexistence du Chlurp, entité surnaturelle de première grandeur qui au nom de la sainte concurrence et des règlements de l’OMC (Organisation Mondiale du Commerce) entendrait s’installer également dans les églises, qui je te le rappelle, sont la plupart du temps financées par les fonds publics. 
 Comme dit tonton Georges dans Tempête dans un bénitier :
« Le souverain pontife avec
Les évêques, les archevêques
Nous font un satané chantier »


Comme ici, on est sérieux, j’aimerais, Marco Valdo M.I. mon ami, que tu me dises exactement où je peux trouver trace en français de cette sacrée théière.


C’est légitime et je te réponds sans hésitation et en pleine transparence. Je l’ai rencontrée dans un petit ouvrage publié aux éditions Perrin (Collection Tempus) d’un certain Richard Dawkins, intitulé « Pour en finir avec Dieu. La traductrice, d’une écriture excellente au demeurant, est Marie-France Desjeux-Lefort. On trouvera cette anecdote de Russell à la page 71.
Une théière, il fallait bien être Anglais pour imaginer une théière. Les Romains, ancêtres des Italiens ont bien imaginé un Dieu… Il est vrai qu’au milieu de tous les objets divers qui circulent dans l’espace, une petite théière a toutes les chances de passer inaperçue.


En tous cas pas ici. Cela dit, reprenons notre tâche et tissons le saint suaire de ce vieux monde rongé par les mythes, imaginatif, halluciné, spirituel et cacochyme.



Heureusement !



Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane.




Beaucoup de croyants disent
Ne pas aimer qu’on les contredise.
Ils n’admettent la discussion
Que si d’avance, on leur laisse raison.

Aux autres, disent-ils, de réfuter
Nos intangibles dogmes.
On ne saurait nous-mêmes
Les prouver.

C’est ici qu’intervient la théière.
J’y crois, je l’ai vue toute entière.
La preuve, elle m’a proposé
Après ma mort, l’éternité.

Entre Mars et la Terre
Gravite la théière
De belle et bonne porcelaine,
C’est une planète naine.

Elle se promène en ellipse
Comme une grande autour du Soleil.
Personne ne peut le contredire
Une planète et une planète, c’est pareil.

Dans l’espace, elle est si petite,
Les télescopes ne peuvent l’apercevoir.
Il faudrait pourtant bien voir
Que quelqu’un la mette en doute.

Son existence est attestée
Par mille légendes sacrées,
Par les livres les plus anciens,
Écrits de la main des plus grands saints.

Tous les dimanches aux offices
On la prêche.
Toute l’année à l’école
On l’enseigne.

Qui la niera sera vilipendé
S’il lui prend l’envie d’en discuter.
La théière est irréfutable comme l'éléphant.
À la disparition du Soleil, elle nous sauvera, pourtant.