mercredi 14 août 2013

VARSOVIE

VARSOVIE



Version française – VARSOVIE – Marco Valdo M.I. – 2013
Chanson italienne – Varsavia - Pierangelo Bertoli – 1984
(P.A.Bertoli-G.Brandolini)
Dall'album "Dalla finestra"


Varsavia ou les trahisons des clercs.


Te souviens-tu, Marco Valdo M.I. mon ami, que nous avons promis à Lorenzo, un petit dialogue à propos de la chanson Varsavia que tu as récemment traduite sous le titre Varsovie et à propos de laquelle tu avais fait quelques réflexions en aparté ? Arguant si je ne me trompe qu'il te faudrait du temps pour en dire plus et mettre un peu d'ordre dans ces bribes...


Évidemment que je m'en souviens très bien et si je n'étais pas si fatigué, je le ferais ce soir-même et je m'aperçois d'ailleurs en rentrant que Lorenzo a déjà vendu un peu la mèche... Mais pour bien situer la chose, tout m'est venu de la traduction... enfin, comme j'ai l'habitude de le préciser – et ce n'est pas une précision inutile – ce n'est pas une traduction, mais une version. Je prends toujours cette précaution pour éviter certaines chicanes et aussi, de donner une dimension poétique dans la langue d'arrivée : ici, le français. En quelque sorte, c'est une recréation. Donc, en donnant la version française de Varsovie, durant l'élaboration, il m'a bien fallu aussi essayer de comprendre de quoi cette chanson parlait.


De Varsovie, je présume, dit Lucien l'âne.


C'est l'évidence. Elle raconte un moment de Varsovie, une histoire à Varsovie, une nuit où s'abat sur la ville une pluie effroyable et une répression policière, militaire et politique. Des nuits de ce genre, me dis-je, Varsovie en a connu beaucoup. On est dans une maison ; il y a là un couple : l'un ou l'une veut faire l'amour, l'autre pleure et une voix – homme ou femme – raconte les événements. On a tué le fils ; c'est comme si on tranchait dans l'avenir. Une nuit de coup d'État, une nuit où le pays tout entier bascule.


Jusque là, dit Lucien l'âne en hochant son grand crâne et en balançant ainsi ses oreilles, on pourrait être au Caire, à Tunis, à Berlin, à Paris, à Madrid, Lisbonne, Athènes... En somme, dans presque toutes les villes du monde. Par exemple, Buenos-Aires pourrait très bien convenir aussi ou Santiago ou Shanghai, Pékin, Chicago, Kinshasa, Damas, Stamboul, Ankara ou Moscou... J'arrête mon énumération...


Et c'est exactement ce que voulait l'auteur de la chanson, comme le rappelle Lorenzo dans sa note. Mais tout devient plus complexe par la suite... À cause de cette madone noire et de ce mineur blanc, qui semblent former un couple... Et c'en est un, d'ailleurs. Je cite :
« Sur l'autel, il y a une madone noire
Mais c'est la main du mineur blanc. »
Comme Lorenzo a déjà, comme je l'ai dit, vendu la mèche, je vais directement au fait : il s'agit de la Vierge noire de Czestochowa et son plus ardent admirateur, le mineur blanc, alias Jean Paul II, lui aussi polonais et fervent idolâtre de la Vierge."Totus tuus", tout à toi, telle était sa devise. C'était évident pour moi, mais il vaut mieux préciser les choses pour la suite... et la compréhension de la chanson. Certes, elle a dénoncé un coup d'État militaro-politique (en l'occurrence, celui de Jaruzelsky, opéré sur ordre de Moscou) et donc, la trahison des communistes polonais face au rêve de société égalitaire qu'ils avaient promis aux gens, spécialement aux pauvres. Mais la chanson dénonce immédiatement l’autre grande trahison, celle de Woytila et de son parti... je veux dire de son Église. Lui aussi avait promis aux pauvres gens... Mais il n'était pourfendeur du communisme (l'église concurrente, instrumentée par et pour d'autres puissants, soit dit en passant) que pour appuyer le parti des riches et des puissants du monde. On retrouve là le vrai rôle de l'Église dans la Guerre de Cent Mille Ans : mener le troupeau des pauvres pour le plus grand profit des riches... Ce qui est encore vrai aujourd'hui. Et, c'est ce qui s'est passé en Pologne et les pauvres gens de Pologne connaissent maintenant le prix de cette trahison et en sauront encore plus demain.
« Seule une masse de pauvres gens
À humilier, à rendre impuissants,
Seule une masse de pauvres gens
À faire plier, à rendre obéissants. »


En fait, il me semble à présent que c'est un peu la même chose que racontait la chanson que tu avais écrite à propos des événements de Berlin quelques années plus tard, quand ils ont fait tomber le mur... où tu disais :
« L'Autre Côté du Mur n'a rien d'un « Sunny side of the street ». 
et
« On abat en même temps que le mur
Toute une vie collective
On étend la misère d'un côté, comme de l'autre
C'est la vie

La liberté d'exploiter passe derrière le mur
On crée le chômage individualisé
Richesse d'un côté, pauvreté de l'autre
C'est la vie » [[7911]]







Et tu pourrais ajouter, mais là c'est encore une autre église, mais la même histoire : Regardez ce qu'ils font aux Grecs... Enfin, pour conclure très provisoirement... en ce qui concerne la chanson Varsavia, elle renvoie dos à dos les deux églises (la catholique et la communiste) pour cause de trahison des clercs, en quelque sorte et c'est là le fait essentiel.






Nous, nous qui ne sommes pas chrétiens, nous qui sommes des bêtes de somme – traduction française de notre devise que nous devons aux paysans pauvres de Lucanie qui disaient à Carlo Levi : « Noi, non siamo cristiani, siamo somari », nous essayerons de ne pas trahir et de ne pas tromper... Alors, reprenons notre tâche essentielle qui est de tisser, tels des Canuts modernes, le linceul de ce vieux monde passéiste, clérical, brutal, violent, traître, menteur et cacochyme.









Heureusement !







Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane





C'est la nuit à Varsovie ; il pleut fort
Éclairs et tonnerres brisent
Un ciel plus noir que la mort
À Varsovie , les portes sont closes
Dans une maison, l'un pleure
L'autre voudrait faire la chose
Comment puis-je te tenir sur mon cœur, trésor
Quand cette nuit à Varsovie, on meurt ?
Comment puis-je te tenir sur mon cœur, trésor
Quand cette nuit à Varsovie, on meurt ?

Mon garçon de vingt ans, ils ont tué
De rage ou de peur, ils l'ont tué
Car c'était une force future
Sur la place, j'ai vu tant de fleurs
Piétinées et dispersées avec fureur
Par qui emploie la loi et se sert du bâton
Et sur les autres a des prétentions de maître
Par qui emploie la loi et se sert du bâton
Et sur les autres a des prétentions de maître

Sur l'autel, il y a une madone noire
Mais c'est la main du mineur blanc
Qui a signé des traites en blanc
Sur le dos d'un peuple déjà fatigué
Las, soûlé d'églises et de prophètes
Car sur le terrain
Il n'y a que les hommes normaux
Pas les chefs d'État ou les généraux,
Car sur le terrain
Il n'y a que les hommes normaux
Pas les évêques , ni même les cardinaux

Ils nous ont trahis nombre de fois
Avec cynisme et détermination
Ils ont envoyé frères et camarades en prison
Et ils ont muselé l'illusion
Il n'y a pas de peuple patron
Il n'y a pas encore peuple gagnant
Seule une masse de pauvres gens
À humilier, à rendre impuissants,
Seule une masse de pauvres gens
À faire plier, à rendre obéissants.

Et pour tous aujourd'hui, c'est un jour noir
Trop de queues de paille brûlent
Trop de rage pour qui vit encore de l'espoir
En un monde qui s'écroule
C'est la nuit à Varsovie ; il pleut fort
Une pluie qui ruisselle sur nos douleurs
Comment puis-je te tenir sur mon cœur, trésor
Quand cette nuit à Varsovie, on meurt ?
Comment puis-je te tenir sur mon cœur, trésor
Quand cette nuit à Varsovie, on meurt ?

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