lundi 8 juillet 2013

AIDE-MOI VALENTINE



AIDE-MOI VALENTINE 

Version française – AIDE-MOI VALENTINE - Marco Valdo M.I. – 2013
d'après les versions italienne et anglaise de Riccardo Venturi d'une
Chanson chilienne de langue espagnole – Ayúdame Valentina – Violeta Parra – 1962 



 

 Violeta









Ah, Lucien l'âne mon ami, je suis très content de te voir, car...


Car ?, dit Lucien l'âne en redressant le crâne et en papillonnant des deux yeux tout en agitant alternativement les oreilles pour montrer son désarroi. Car quoi ? Alors, maintenant, il te faut une raison pour être content de me voir...


Ho, ne te braque pas ainsi, Lucien l'âne mon ami. Tu as parfaitement raison... Mais tu ne m'as pas laissé le temps de finir ma phrase... Je n'ai pas besoin de raison pour être content de te voir... Je voulais juste ajouter une raison supplémentaire, en quelque sorte la raison du jour... J'insiste : je suis toujours content de te voir et la raison en est que tu es mon ami. C'est d'ailleurs – à mes yeux comme aux tiens – le trait caractéristique de l'amitié que ce plaisir de se voir. Comme tu le constates, et je ne t'en ai pas fait la remarque jusqu'ici, comme tu le noteras dans tes tablettes, ce doit d'être réciproque. C'est là pure logique.


Certes, Aristote lui-même n'aurait pas mieux dit. Mais, maintenant, quelle est cette raison adventice qui justifie ce supplément de joie que tu as eu de me voir ?


Remarque, avant de conclure sur ce point, que cette joie est en quelque sorte de même nature que ce que Plotin appelait l'entropie. Elle vient en quelque sorte en surplus, comme une dimension intangible de l'être...


Mais, s'il te plaît, laisse-là Aristote et les Pères de l'Église, laisse-z-y aussi Plotin et son Dieu qui dégouline de partout... On n'est pas ici pour faire de la théologie et viens-en au fait.


Tu ne crois pas si bien dire ou plutôt, te tromper à un tel point... Car la chanson de Violeta Parra relève quasi-entièrement de l'univers théologique, même s'il s'agit d'une approche des plus ironique. D'abord, rien que son titre est tout un programme... te souviens-tu de Valentine Terechkova ? Sans doute, d'ailleurs, vas-tu me dire à ton habitude que tu l'as rencontrée, que tu l'as véhiculée sur ton dos et toutes ces révélations qui te sont usuelles.


De fait, j'ai connu et promené la mouette... Avant son vol, avant même qu'elle ne soit désignée... Avant même qu'elle imagine de voler... Au temps où on se connut, elle et moi, elle était une jeune et jolie ouvrière et elle aimait assez les promenades... Moi, comme tu le sais, j'étais toujours à la recherche des roses qui doivent me rendre mon apparence humaine... À vrai dire, je n'en ai pas trop envie, mais cela, c'est une autre histoire. Bien sûr, on s'est encore promenés tous les deux plusieurs fois après son exploit...


Tu ne vas quand même pas me dire que tu as connu aussi Violeta Parra, au Chili...


Je ne voudrais pas que tu croies un instant que je me vante, mais je dois à la vérité que je l'ai connue alors qu'elle était encore enfant là-bas à San Fabián de Alico et qu'elle courait les campagnes. Elle avait à peine dix ou douze ans et je me souviens qu'elle chantait tout le temps. Mais laissons mes pérégrinations et je t'en prie, viens-en à la chanson.


Donc, Violeta – on est en 1962, qui n'avait plus douze ans, écrit une chanson où elle demande à la toute récente et toute jeune cosmonaute Valentine, laquelle vient de passer trois jours dans l'espace autour de la Terre – que soit dit en passant, elle a bien failli quitter pour l'infini... Son engin s'éloignait de la Terre au lieu de s'en approcher... Elle a bien eu une solide frayeur, mais à côté de ses nausées, c'était – excuse-moi l'expression, du pipi de chat... pour ne pas dire, de la pisse d'âne. Donc, pour résumer la chose, Violeta demande à Valentine de l'aider – tant elle (et toute la population de son pays et toute la population du monde) est cernée par les bergers, pasteurs, prêtres, lamas, moines, nonnes et autres personnages en robe ou en pantalon... et tant ils l’assomment de discours religieux et théologiques, ce dont elle n'a cure.


Et nous aussi ! Nous qui « non siamo cristiani, siamo somari »... bref, qui sommes d'honnêtes mécréants.


Et que demande Violeta à Valentine ? Je te laisse le découvrir... En fait, ce sont là deux mécréantes de haut vol... Sache simplement qu'il s'agit d'une chanson laïque, athée, anticléricale et étant tout cela, forcément optimiste et de la plus grande humanité. Bref, une chanson selon notre raison et selon notre cœur !


En somme, dit Lucien l'âne en brayant de rire, « Le cœur et la raison sont les deux mamelles de l’athéisme »... Ainsi reprenons notre tâche et tissons le suaire de ce vieux monde gangrené par la religion, bigot, cagot, idiot, calotin, débile, totalitaire, stupide et cacochyme.



Heureusement !



Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane.



Valentine









Qu'allons-nous faire de tant
Et tant de prédicants !
Les uns se prévalent de livres,
D'autres de belles raisons ;
Certains d'étranges histoires
De miracles et d'apparitions,
Les autres de la présence
De squelettes et de scorpions,
Putain de Mère ! Les scorpions.

Qu'allons-nous faire de tant
De prières et de chants
Qui dans toutes les langues évoquent
La gloire et cela et ceci,
Les enfers et les paradis,
Les limbes et les purgatoires,
Les édens et la vie éternelle,
Les archanges et les diables,
Putain de Mère ! Les diables.

Mais oui, ils adorent l'image
De Marie la madone,
Mais ils n'adorent aucune
Dame ou demoiselle ;
Alors, que ce soit oui ou non, demain
Ou un vendredi matin,
Pour entrer en gloire
Il faut des dollars,
Putain de Mère ! Faut des dollars.

On voit qu'ils ne sont pas très propres
Les blés dans cette vigne
Et la zizanie prétend
Manger tout le champ ;
Peu lui chaut la manière
De clouer son épine
Pour sucer le plus faible
Quel diable d'insecte,
Putain de Mère ! L'insecte.

Qu'allons-nous faire de tant
De célestes développements
Valentine, faut m'aider,
Toi qui si haut a volé.
Une fois pour toutes, dis-moi
Que là haut un tel domaine n'existe pas :
Demain saura l'édifier
L'homme avec sa raison.
Putain de Mère ! Avec sa raison.

Qu'allons-nous faire de tant
De dieux et de leurs représentants!
À chaque pas, ils me mordent
De leurs canines féroces.
Valentine, faut te dépêcher
Ils ont multiplié les bergers
Car bientôt tout va s'effondrer
Comme dans l'histoire des sermons,
Putain de Mère ! Des sermons.

Qu'allons-nous faire de tant
De mensonges permanents :
Valentine, Valentine,
Passons le balai.
Messieurs : sous la terre
Se scelle le décès
Et à tout corps en silence
Le temps offre le néant,
Putain de Mère ! Le néant.

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