La Joyeuse Entrée
Chanson
française – La
Joyeuse Entrée – Marco Valdo M.I.
– 2018
Ulenspiegel le Gueux – 61
Opéra-récit en multiples épisodes, tiré du roman de Charles De Coster : La Légende et les aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d’Ulenspiegel et de Lamme Goedzak au Pays de Flandres et ailleurs (1867).
(Ulenspiegel – III, XXIII)
Ulenspiegel le Gueux – 61
Opéra-récit en multiples épisodes, tiré du roman de Charles De Coster : La Légende et les aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d’Ulenspiegel et de Lamme Goedzak au Pays de Flandres et ailleurs (1867).
(Ulenspiegel – III, XXIII)
Dialogue
Maïeutique
Ce
jour-là,
dit
Marco Valdo M.I., Till
qui
vient de se
marier avec
Tanneke…
De
se marier pour la frime, dit
Lucien
l’âne en
riant et en agitant ses oreilles luisantes.
En
effet, reprend Marco Valdo M.I., rapport à la promesse faite à
Nelle, aux nécessités de la Légende et aux regards d’aigle que
lui lance Hans le véritable fiancé de Tanneke. Donc, Till s’en va
en voyage de noces à Maestricht. Pour cela, il emmène tout le
cortège sur quatre chariots – deux ânes et quatre chevaux – à
travers les champs et les prés de Hesbaye. Cependant, la chose
n’est pas aussi simple , ni si peu risquée qu’on l’imagine
aujourd’hui. Il n’y a là comme accès à Maestricht que la
vieille voie romaine et elle est gardée par les sbires du duc venu
d’Espagne, lequel fait le siège e la ville, tenue par les Gueux.
Et sur les chars de la noce, il n’y a qu’un fort parti (plus de
cinquante personnes) de faux catholiques et de vrais Gueux. Mais sous
la conduite de Till le rusé, toute cette troupe prend des aires de
kermesse héroïque.
Je
vois, dit Lucien l’âne, je vois même très bien cette kermesse
héroïque qui nous fit tant rire et qui reprenait, à sa manière,
la pièce du Grec Aristophane, intitulée Lysistrata, où les femmes
jouent un rôle essentiel. Dans le film de Feider, elles sont plutôt
des émules de Circé, l’enchanteresse. Mais je t’en prie,
poursuis ton propos.
Lors
donc, Lucien l’âne mon ami, la petite troupe de Till fait
littéralement tout un cinéma au duc d’Albe en personne qui est
venu voir cette noce ambulante qui les fête lui et ses soudards et
qui leur offre outre le spectacle, du vin à foison. Du coup, le
barrage les laisse passer et Till et ses comparses peuvent faire leur
joyeuse entrée en ville. Cependant, à propos de la joyeuse entrée,
il importe de rappeler le sens politique et juridique de cette
expression, car elle est assez particulière.
Oh,
je vois, dit Lucien l’âne, il s’agit d’une sorte de triomphe
où Till entre en ville en cortège tel un César après ses
victoires ou comme le Christ à Bruxelles, tel que le vit Ensor.
Ce
n’est pas faux, dit Marco Valdo M.I., mais ce n’est qu’une des
possibilités. Figure-toi que la Joyeuse Entrée dans son sens
politique et ici, polémique, fait référence, je pense, à la
Joyeuse Entrée de Brabant, promulguée par le Duc de Brabant en
1356, qui accorde le droit (et le devoir) de sanctionner le pouvoir
quand on considère qu’il attente à la liberté et aussi d’autres
droits du même tonneau dont les droits individuels de liberté
personnelle et d’inviolabilité du domicile. Cette Joyeuse Entrée
est exceptionnelle dans l’histoire et bien évidemment, elle
n’arrange pas les puissants ultérieurs et moins encore, l’occupant
espagnol.
Comme
à l’ordinaire dans tes chansons, Marco Valdo M.I. mon ami, il faut
se défier d’interpréter trop vie ce qui est dit, car un mot peut
en cacher un autre. Il y a là comme un jeu de facettes multiples, un
kaléidoscope polyphonique.
En
attendant, reprenons notre tâche
et tissons
le linceul de ce vieux monde univoque, sourd, nigaud, niais et
cacochyme.
Heureusement !
Ainsi
Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
Par
deux ânes et six chevaux tirés,
Quatre
chariots garnis
De
houx, de sapin et de fleurs de papier
Et
la noce s’ébranlent en plein midi.
Plus
de vingt-cinq hommes
Et
les filles et les femmes
Vont
nuptialement équipés –
Danger
de mort ! Danger !
Au
grand trot, les bannières d’épousailles
Et
les enseignes au vent
Chantant,
tambourinant, buvant
Ils
avancent comme à la bataille.
Nous
sommes de Zélande,
À
Maestricht, nous allons.
Nous
sommes de Zélande,
Prendre
la mer, nous allons.
Au
camp d’Albe, dans la méridienne, assoupi,
Les
sentinelles sonnent l’alarme.
Tous
courent aux armes
Pour
affronter ce soudain ennemi.
Et
voici, surgissant de l’horizon lointain,
Face
aux arquebusiers,
Au
déboulé du chemin,
Les
quatre chars pour la fête ornés
Et
dessus, femmes et hommes dansent,
Filles
et gars se dévoient,
Les
bouteilles en l’air festoient
Et
s’époumonent les cornemuses.
Devant
le barrage, la noce fait halte.
Albe,
le duc, vient en personne
Voir
Tanneke l’épousée et Till l’époux.
Les
paysans se contorsionnent et les fifres sonnent.
Pour
les soudards, des chars coule le vin ;
Pour
les soudards, roucoulent les tambourins
Et
les arquebuses tirent une salve
Pour
saluer la joyeuse entrée de Till en ville.
Pour
Albe, les soudards firent un couplet :
« Duc
de sang niais,
As-tu
vu l’épousée ? »
Au
duc, elle sert le quolibet.